Isabelle Boulay montera demain soir sur les planches du Théâtre Maisonneuve dans le cadre de sa tournée En vérité, du titre de son plus récent album. La chanteuse a laissé entrer La Presse dans son atelier, un lieu très intime qu'elle considère comme «le prolongement de [sa] vie intérieure».

Isabelle Boulay partage depuis maintenant 25 ans sa vie et sa carrière entre Paris et Montréal. Mais c'est à Pointe-Saint-Charles que se trouve son havre de paix, un atelier dans lequel elle se plaît à créer, entourée d'objets et de souvenirs qui lui sont chers.

«Mon atelier est en dehors de mon lieu de vie, de mon quotidien avec mon petit garçon. C'est ce qui me permet de pouvoir garder un équilibre et de continuer de créer, un peu comme les garçons qui ont bien souvent leur studio d'enregistrement», explique Isabelle Boulay.

«C'est un peu comme dans l'oeuvre de Virginia Woolf, Une chambre à soi. J'ai toujours eu besoin, même enfant, de pouvoir être en réclusion quelque part parce que je vis toujours entourée de plein de gens.»

Alors qu'elle évoque son attachement pour ce jardin secret, la chanteuse se plaît à revenir sur la petite histoire qui se cache derrière les murs de son sanctuaire. «J'ai grandi dans un bar et un restaurant en Gaspésie et on a découvert que cet endroit-là était la salle de billard de la plus vieille taverne de Pointe-Saint-Charles. On ne se refait pas! Quand je suis entrée pour la première fois pour visiter, je trouvais que ça sentait comme chez mon père. Disons que c'est venu me chercher», confie-t-elle.

Célébrer l'interprète

Sur scène, demain soir, Isabelle Boulay promet de faire partager au public certains des moments marquants de sa carrière, mais aussi des chansons de son plus récent album, En vérité. «Je ne dirais pas que c'est un spectacle rétrospectif comme celui que j'ai fait sur les plaines d'Abraham», indique la chanteuse qui sera accompagnée par cinq musiciens, sous la direction de Simon Godin.

«C'est un spectacle à l'image de l'interprète façonnée par le temps et un certain nombre de chansons. Toutes les dimensions de ma carrière se retrouvent dans ce show-là.»

Isabelle Boulay laissera ainsi le public entrer dans les coulisses de certaines chansons phares de sa carrière, n'hésitant pas à diffuser des extraits audio de la voix de Carla Bruni quand celle-ci lui a offert Le garçon triste, titre tiré d'En vérité, ou à raconter l'histoire qui se cache derrière Je t'oublierai, je t'oublierai.

«Quand j'ai quitté Starmania pour poursuivre ma carrière, Luc Plamondon est venu taper à la porte de ma loge et il m'a donné une enveloppe qui contenait une cassette en me disant: "Richard Cocciante et moi avons fait une chanson pour toi. Si tu l'aimes, elle t'appartient"», se souvient la chanteuse.

Alors que la tournée En vérité se poursuivra un peu partout au Québec, Isabelle Boulay est déjà prête à se lancer dans un nouveau projet d'interprète. «Je dois trouver l'idée qui va me parler le plus et obéir à mon instinct. Mais je vais d'abord m'arrêter un peu et laisser l'eau remonter dans le puits», conclut-elle.

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Au Théâtre Maisonneuve, le 1er mars, à 20 h

Les trésors de l'atelier d'Isabelle Boulay

Un album de diamant

«On m'a remis cette sculpture pour célébrer le million d'albums vendus en France de Mieux qu'ici-bas. On s'est rendus à 1,6 million au final! Je trouve cet objet très beau. On dirait des marches qu'on monte à l'infini, mais qui partent d'un socle solide. Il y a une très belle symbolique, comme une quête qui ne finit jamais. Je crois que dans la vie, on ne peut atteindre le succès que si on est bien ancré dans le réel.»

Premiers pas

«C'est le prix d'interprétation de la chanson de Granby que j'ai remporté en 1991. J'avais chanté Amsterdam de Brel et Naufrage de Gilbert Langevin et Dan Bigras. Ce dont je me souviens le plus de mes participations au festival, c'est d'y avoir rencontré Dédé Fortin. Je me souviens très bien qu'à partir de ce moment, je notais dans mon calendrier les dates de concert des Colocs et je m'arrangeais toujours pour revenir au Québec à cette période-là. Dédé me touchait et m'impressionnait beaucoup.»

À la conquête de la France

«J'avais gagné deux trophées aux 16es victoires de la musique [Album découverte et Artiste découverte de l'année]. C'était symbolique pour moi d'avoir un prix comme celui-ci. Ce n'était pas rien! C'est la première marque d'affection de l'industrie et du public français. Réussir outre-Atlantique venait au bout d'une somme assez importante de travail. Ma mère écoutait beaucoup de variété française et j'ai commencé à rêver de la France très jeune. Je suis un peu la plus française des petites Québécoises. Ce prix célébrait donc un peu mon enfance aussi.»

Un rêve de petite fille

«C'est une robe de Christian Lacroix que j'ai portée pendant toute la tournée de Nos lendemains. Il m'a tellement fait rêver! C'est un grand artisan de la mode française. Avant de le rencontrer, il m'a ouvert les portes de son atelier. Je pouvais aller choisir toutes les tenues que je voulais. Il m'a habillée pendant presque 10 ans. Ma mère était couturière et m'a fait ma robe de finissante. Porter du Christian Lacroix était un rêve de petite fille pour moi.»

Souvenir de Starmania

«J'ai subtilisé cette robe qui appartient à la production de Starmania! Je voulais un souvenir de mon passage dans cette comédie musicale. De toute manière, elle n'aurait fait à personne d'autre que moi et il en existe une autre! Cette robe est importante, car quand j'étais étudiante au cégep de Limoilou, j'écoutais beaucoup le disque de Starmania. Le personnage dont je me sentais le plus proche à 16 ans était Marie-Jeanne. J'avais passé trois auditions et je me souviens très bien de m'être retrouvée sur la galerie de la maison de Plamondon à Outremont et de lui avoir pris les deux mains en disant: "Donne-moi le rôle, je t'en supplie, tu ne seras jamais déçu." J'ai voulu garder un souvenir de cette deuxième peau dans laquelle j'ai vécu pendant presque trois ans.»

Pour l'amour de Johnny

«Johnny est une icône, une idole. Je le croisais à la salle de sport quand j'étais à Paris pour Starmania et quand il entrait, il y avait une sorte de silence. Je n'ai jamais osé l'aborder. J'ai fait l'Olympia et son associé en restauration Claude Bouillon l'a amené me voir. Johnny est descendu dans ma loge et m'a demandé si je voulais aller chanter avec lui pour son 60e anniversaire au Parc des Princes. La photo a été prise pendant la tournée des stades avec lui en 2003. Je n'ai jamais vu une tournée aussi grandiose!»

Photo Martin Chamberland, La Presse

Une sculpture a été remise à Isabelle Boulay pour célébrer le million d'albums vendus en France de Mieux qu'ici-bas.