Ça fait des lunes qu'on rêve chez Spectra d'une vraie fête de la lumière. Après avoir visité des fêtes similaires dans le monde, Montréal en lumière lancera, le 22 février, son premier Illuminart avec 25 oeuvres réparties sur un parcours de plus de 3 km au centre-ville, dont 6 nous viennent de Lyon, ville à l'honneur cette année.

Le festival dans le festival

Pour célébrer le 375e anniversaire de Montréal, Montréal en lumière travaille depuis plusieurs années à créer un festival dans le festival, une fête des lumières digne des plus grands événements du genre dans le monde: Illuminart.

En lançant Illuminart cette année, Montréal en lumière veut frapper un grand coup: créer un nouveau rendez-vous récurrent en hiver à Montréal. De plus, il s'agit d'un nouvel événement majeur qui survient en début d'année du 375e anniversaire de Montréal. 

«On a une trentaine de partenaires à la production, création, diffusion, dont la célèbre Fête des lumières de Lyon, dans un parcours très inclusif, liant les pôles est et ouest du Quartier des spectacles», explique le vice-président production chez Spectra, Mikaël Frascadore. 

Il faut dire que les fêtes des lumières représentent une tendance majeure dans le monde des festivals un peu partout en ce moment. 

«C'est une explosion. Il y a cinq ans, il y avait une vingtaine de festival des lumières. Maintenant, il y en a 115 qui se déroulent essentiellement entre septembre et février.»

Question de se réchauffer, de s'allumer. 

Le premier Illuminart compte sur six artistes de Lyon, où la Fête des lumières a soufflé 164 bougies en décembre 2016, et deux autres d'Australie et des Pays-Bas. 

«Cet événement permet autant un rayonnement international de nos artistes et, à l'inverse, il y a un intérêt pour des pays à être mis en valeur ici», croit Mikaël Frascadore, qui planche sur le projet depuis trois ans. 

Quatre codiffuseurs - Australie, Pays-Bas, République tchèque, Canada - ont notamment collaboré pour présenter ici Fantastic Planet de l'Australienne Amanda Parer afin d'aider l'artiste et de réduire les coûts. 

La fête de Montréal 

Mais même s'il s'agit d'un véritable rendez-vous international, Illuminart a misé beaucoup sur les artistes et les citoyens montréalais pour créer plusieurs des 25 oeuvres. 

«Des oeuvres d'artistes professionnels et de citoyens se côtoient, note le vice-président de Spectra. L'une des caractéristiques principales d'Illuminart est de favoriser les échanges, de mettre des gens ensemble pour créer quelque chose.»

Le parcours fera connaître des coins méconnus du Quartier des spectacles. On verra une animation relatant l'histoire des Habitations Jeanne-Mance, des créations d'élèves participant aux ateliers du Musée d'art contemporain et d'écoles primaires, Villeray et Rosemont. Ceux-ci ont travaillé sur 1000 tiges représentant la ville de Montréal. Même les graphistes de Spectra ont contribué à une oeuvre. 

Illuminart en promet pour tous les goûts: ludique, intello, familial, interactif. Les étudiants en médias interactifs de l'UQAM ont, pour leur part, créé un projet d'intelligence artificielle. 

«C'est extrêmement intéressant. C'est un cerveau qui collecte de l'information sur les gens et qui fait des recommandations pour optimiser la ville. Les profs de l'UQAM et Moment Factory sont impliqués.»

Petite histoire

L'idée de créer une fête des lumières ne date pas d'hier chez Spectra. Elle est même à la source du festival Montréal en lumière. 

«Au début des années 90, Alain Simard a eu l'idée de préparer un symposium de concepteurs éclairagistes fortement inspiré de Lyon, mais on n'était pas prêt. Le festival Montréal en lumière est quand même né. On a toujours eu une place pour la lumière avec du multimédia et du mapping. Là, c'est un retour aux sources.»

Amateur d'art contemporain et de multimédia, Mikaël Frascadore a retroussé ses manches pour que la lumière soit faite enfin.

«On a créé un réseau le printemps passé, l'International Light Festivals Organization, pour coproduire et faire des échanges de pratiques efficaces. On a travaillé fort, mais c'est un chantier très intéressant. On veut frapper un grand coup cette année pour aller chercher d'autres partenaires financiers et des commanditaires. Ce n'est pas le 375e anniversaire de Montréal tous les ans.»

Illuminart se déroulera du 22 février au 11 mars, du mercredi au samedi de 17 h 30 à 23 h, sauf lors de la Nuit blanche qui se terminera à 3 h du matin.

Un parcours de 3 km

Illuminart, c'est 25 oeuvres réparties sur un parcours de 3,6 km dans le Quartier des spectacles. Six oeuvres proviennent de la célèbre Fête des lumières de Lyon, sept du Québec, dix sont le produit de collectifs ou d'étudiants et deux autres viennent des Pays-Bas et d'Australie. Le vice-président production chez Spectra, Mikaël Frascadore, nous en présente 11.

1- Bétonnière boule miroir de Benedetto Bufalino et Benoit Deseille (angle Sainte-Catherine et De Bleury)

«Pour respecter la vision des artistes, on a placé la bétonnière, qui est une immense boule disco, en début de parcours, là où était situé avant le Spectrum, donc un endroit encore en friche», note Mikaël Frascadore.

2- Évolutions de Yann Nguema et EZ3kiel (église Saint-James, 463, rue Sainte-Catherine Ouest)

«Dans cette oeuvre qui a remporté un prix à Lyon cette année, on utilise de l'éclairage, du laser et du mapping vidéo. Avec ce qu'ils font, j'y vois une clé pour l'avenir du mapping vidéo. C'est très spectaculaire.»

3- Passage de Serge Maheu (Jardin Domtar, 395, boul. De Maisonneuve Ouest)

«C'est un tunnel interactif qui, à l'aide de détecteurs infrarouges, permet aux gens d'interagir avec la séquence lumineuse et l'ambiance sonore. C'est un projet qu'on essaie d'amener à l'étranger. Plusieurs collègues des fêtes des lumières dans le monde seront à Illuminart.»

4- Fantastic Planet d'Amanda Parer, Australie (le Parterre, angle De Maisonneuve et Clark)

«Il y aura 5 humanoïdes blancs de format géant, dont le plus haut fait 12 m, qui seront disposés au sol et sur les toits de la Maison symphonique et du Quartier général de la police. Les gens pourront tourner autour et les toucher.»

Photo fournie par Montréal en lumière

Fantastic Planet d'Amanda Parer

5- Large Pendulum Wave d'Ivo Schoofs, Pays-Bas (îlot du métro Saint-Laurent)

«C'est un boulier géant qui nous vient d'Eindhoven. C'est une ville importante en recherche en optique et en lumière. On y trouve une école technique qui forme des ingénieurs en optique. L'un d'eux a imaginé ce boulier qui fonctionne avec la gravité et des électroaimants. C'est hypnotisant.»

6- 4U2C et l'École nationale de théâtre du Canada (Monument-National, 1182, boul. Saint-Laurent)

«4U2C a travaillé avec des étudiants de l'École nationale pour imaginer un mapping vidéo de près de sept minutes qui relate l'histoire du Monument-National et de l'enseignement qui est fait à l'École. On va découvrir ce qui se passe à l'intérieur des murs.»

7- KEYFRAMES de Groupe LAPS (Cinémathèque québécoise) 

«C'est un projet qui nous vient de Lyon et qui consiste en une centaine de personnages allumettes, faits de tubes lumineux, disposés sur la façade de l'édifice. L'artiste change la position de la tête, des bras et des jambes pour recréer des séquences qui ont un rapport avec le site, tout comme la bande sonore.» 

8- United Fish de Lucion (cégep du Vieux Montréal)

«C'est un mapping vidéo d'environ huit minutes qui raconte l'histoire d'une communauté de poissons qui est menacée par des industriels qui veulent les déloger de leur fond marin. On a travaillé avec des étudiants du cégep en design et en graphisme qui ont adapté le contenu et vont créer une nouvelle scénographie.»

9- Bamboo de Christophe Mayer (Habitations Jeanne-Mance, angle Hôtel-de-Ville et Ontario)

«Il s'agit d'une installation qui comprend une centaine de tubes lumineux entre deux et trois mètres de haut. L'artiste lyonnais va faire la mise en place le long de la rue pour créer un tableau. Il y a aussi une bande sonore qui accompagne l'oeuvre.»

10- Éléphant rouge de Bibi (promenade des Artistes)

«C'est un artiste lyonnais qui travaille avec des bidons d'eau et la lumière. C'est un projet impressionnant qui devrait beaucoup plaire aux familles et aux enfants. On a essayé de penser à tout le monde en sélectionnant les oeuvres de cette première édition.»

11- Face de Thomas Voillaume (parc Paul-Dozois)

«C'était aussi présenté à Lyon en décembre dernier. Il y a deux mappings projetés sur ce buste géant: l'un est davantage artistique, tandis que l'autre montre, sur le buste, le visage des festivaliers qui pourront interagir. C'est très ludique.»

Photo fournie par Montréal en lumière

Bamboo de Christophe Mayer

Fête des lumières de Lyon: LA fête des lumières

Les Lyonnais, où qu'ils soient dans le monde, allument spontanément des lumignons à leur fenêtre depuis 164 ans. Une statue en l'honneur de la Vierge Marie, qui aurait sauvé la ville de la peste au XVIIe siècle, a en effet été inaugurée sur la colline de Fourvière le 8 décembre 1852.

Ce qui fait de la Fête des lumières de Lyon l'un des plus vieux événements du genre dans le monde. Aujourd'hui, la Fête comprend projections, lasers, DEL, tout ce que la lumière moderne peut offrir, mais les Lyonnais continuent d'allumer des lumignons aux fenêtres. Même en 2015 lorsque la fête a dû être annulée en raison des attentats de Paris, le 13 novembre.

Sous la surveillance de 1500 policiers, militaires et agents de sécurité, l'événement était de retour du 8 au 11 décembre 2016 dans un espace limité essentiellement au Vieux-Lyon, à la presqu'île de Lyon, entre le Rhône et la Saône.

La Presse y était et a pu constater que, pendant trois jours, les foules, moins nombreuses que d'habitude selon les observateurs, ont eu droit à une quarantaine d'installations, dont trois seront présentées à Montréal lors d'Illuminart.

Pour un visiteur, la Fête des lumières revêt un charme particulier avec ses lumignons aux fenêtres, ses spectacles d'animation, ses projections sur les édifices comme la mairie, la grande roue de place Bellecour et, cette année, un soleil géant qui se levait sur les hauteurs de la ville, à côté de la basilique de Fourvière.

Les nombreux stands de bouffe de rue et de vin chaud étaient tous plus accueillants les uns que les autres. Et la foule, quoique fort compacte par endroits, particulièrement chaleureuse à l'endroit des néophytes porteurs de l'accent... québécois!

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Les frais du voyage à Lyon ont été assumés par ONLYLYON, organisme de promotion internationale de Lyon.

Photo archives Reuters

La tradition sur laquelle est fondée la Fête des lumières de Lyon remonte à il y a 164 ans.