Afin qu'il compose une fresque substantielle pour le Jazzlab, le Conseil des arts et des lettres du Québec a consenti à financer une commande d'oeuvre au saxophoniste Alexandre Côté (alto, baryton, etc.) Ce mercredi au Gesù, seront joués les huit mouvements de cette Suite québécoise créée par le musicien de 37 ans.

Ainsi, Alexandre Côté a entrepris de mettre en valeur les huit musiciens du Jazzlab. Huit jazzmen, huit mouvements inspirés de huit régions fréquentées par le compositeur, arrangeur et improvisateur. Alors? Question d'être bien préparés, refaisons le parcours avec lui:

«Nord perdu, explique-t-il, évoque séjour dans le Grand Nord. Je me souviens d'un gros soleil tapant... à -40 degrés ! La musique de ce mouvement est assez free, je l'ai écrite pour le batteur Isaiah Ceccarelli, actuellement à l'étranger pour un séjour prolongé - Richard Irwin le remplacera pour l'occasion.

«Rangs de garnotte et espaces vides désigne la zone immense entre le Grand Nord et les Laurentides, de la forêt, de la forêt et de la forêt! Ce mouvement a été créé pour le saxophoniste Frank Lozano, j'y évoque l'idée que je me sais des ténormen, c'est-à-dire un swing modal relativement lent.

«Les Hautes Gorges me rappellent un séjour de plein-air dans les Hautes Gorges de la rivière Malbaie, un site très impressionnant, idéal pour le canoë. Ce mouvement est construit sur une mesure composée (15/4) et commande un jeu aérien au soliste, le trompettiste Aron Doyle. Comme s'il était un oiseau survolant la région!

«À l'est du Bic évoque les paysages grandioses et apaisants de l'estuaire du St-Laurent, vers Rimouski et Sainte-Luce-sur-Mer. J'ai conçu ce mouvement comme on peint un tableau. Destinées à mettre en relief le pianiste John Roney, ces ambiances façon ECM (années 70-80) sont calmes et planantes.

«L'Île d'Entrée oubliée rappelle ce ce lieu oublié des Îles de la Madeleine; population consanguine, vaches et moutons qui se «suicident», enfin qui peuvent perdre pied et tomber des falaises. Triste... Ce cinquième mouvement a pris la forme d'une ballade écrite pour le tromboniste Richard Gagnon, le romantique du groupe.

«Jarrets noirs est l'expression qui désigne les habitants de la Beauce. Puisque ma mère est d'origine beauceronne et que j'ai passé plusieurs étés dans cette région avec ma famille, je rends hommage à la Beauce. Ainsi, j'ai écrit un groove afro-swing en 6/8 avec un solo de baryton prévu pour Bruno Lamarche.

«Et puisqu'on ne peut parler du Québec sans parler des Laurentides et que j'y ai aussi passé plusieurs étés de ma jeunesse, j'ai écrit Paysage laurentien. J'en ai fait une valse en 3/4 pour la contrebasse d'Alain Bédard.

«Le huitième mouvement s'intitulait  Phil's Spirit sur l'album Octo portraits (le plus récent du Jazzlab); dans le contexte de la Suite Québécoise, il a été renommé Métropolitain, un bebop assez intense.»

Au programme du Jazzlab seront aussi jouées d'autres pièces d'Alexandre Côté composées antérieurement pour le Jazzlab. La Suite québécoise en sera le plat principal.

«Je n'ai pas voulu réinventer la roue, se défend le compositeur. J'ai préféré donner une identité musicale à chaque tableau tout en essayant d'éviter les clichés. Et j'oserais me compter très satisfait du résultat. Une partition de 195 pages, 1328 mesures, durée d'une heure. Pendant un an, vous savez, j'ai songé aux paramètres de cette Suite. Puis j'ai arrêté de me casser la tête et j'ai écrit. À un moment donné, il faut se faire confiance!»

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Dans le cadre de Montréal en lumière, la Suite québécoise d'Alexandre Côté sera jouée par le Jazzlab ce mercredi, 20h, au Gesù.