Un peu de reggae en plein février, comme une dose de vitamine C pour nous aider à traverser ce qu'il reste des grands froids. Demain, la légende jamaïcaine Aston «Family Man» Barrett, chef d'orchestre original des Wailers du regretté Bob, amène sa troupe reconstituée pour déballer les classiques du Maître, dont on soulignera le 30e anniversaire de la mort en mai prochain.

D'abord, démêlons les marques de commerce. Les Wailers de Family Man ne sont pas les Original Wailers de Junior Marvin et Al Anderson, depuis la dissension entre ces deux clans autrefois associés au sein d'une seule et même formation. Encore ces jours-ci, ça s'invective par médias interposés, les derniers traitant «d'attardé» le premier, qui lui se drape dans son authentique et solide amitié avec feu Robert Nesta Marley pour clamer être l'unique et véritable gardien de la légende.

«C'est franchement incroyable, la chance de tourner avec Aston Barrett. Ce type, c'est l'expérience, l'assurance, et toutes ces histoires qu'il passe son temps à nous raconter», s'emballe Danglin, un des chanteurs des Wailers, version 2011, joint à sa résidence près de New York.

Family Man (ainsi surnommé parce qu'on lui prête d'avoir plus d'une quarantaine d'enfants!), ce n'est pas qu'un bassiste, mais sans doute le plus important bassiste de l'histoire du reggae. Avec son frère Carlton à la batterie, il formait l'une des plus efficaces sections rythmiques de l'époque - des modèles pour les Sly & Robbie qui ont suivi.

Outre ses fonctions de chef d'orchestre, Aston Barrett est considéré comme cocompositeur des succès de Bob Marley & The Wailers, puisqu'il signe toutes les lignes de basses des succès de Marley. Avant ça, il faisait partie des Hippy Boys, groupe de studio qui comptait en ses rangs l'organiste Glen Anderson, récemment disparu. Les frères Barrett étaient aussi des Upsetters de Lee Perry, ils ont joué sur nombre d'albums classiques de Max Romeo, Bunny Wailer (Black Heart Man), Peter Tosh (Legalize It), Augustus Pablo (King Tubby Meets Rockers Uptown), etc. L'histoire de la pop jamaïcaine avec un grand H, pardonnez le jeu de mots.

«L'important, c'est de bien rendre l'esprit des chansons de Marley», dit Danglin, jeune chanteur ayant grandi au New Jersey mais dont les chansons sont devenues de modestes succès sur la scène roots en Jamaïque. «C'est comme ça qu'on m'a découvert, que j'ai reçu un coup de fil pour faire partie des Wailers», raconte-t-il. «On ne refuse pas l'appel de Barrett».

Jah Cutta

En raison de Bob Marley, le cheval de Troie du reggae dans la conscience populaire. Son message, sa voie, ses mélodies, son charisme. Le Montréalais Jah Cutta, le vieux lion du reggae québécois, est aussi tombé sous le charme. «J'ai rencontré Bob Marley, dans les coulisses, lors de son concert à l'Université (au CEPSUM, en mai 1976, la tournée Rastaman Vibration). J'avais 15 ans. Je lui ai dit que je chantais, il m'a dit de ne pas lâcher. Puis, il m'a donné son joint! Pendant les mois qui ont suivi, j'ai écrit des chansons sans arrêt.»

Le chanteur, qui compte près de 25 ans de métier, entend traverser les époques, tout en proposant les chansons de son très bon dernier album, A Me Dis. «Rocksteady, lovers, roots, et des nouvelles!» promet Cutta, qui croque plus que jamais dans la vie, après avoir été victime, lui et son orchestre, d'un très grave accident de la route l'hiver dernier, alors qu'il tournait dans l'Ouest canadien.

«Le concert de demain sera le premier de ma nouvelle tournée, avec le Determination Band, dit le miraculé de sa voix calme. Désormais, sur la route, on ne se presse plus: l'idée est de partir à l'heure, et de ne pas s'en faire si on prend du retard.» Rester cool, le chanteur reggae l'aura enfin compris.

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The Wailers en spectacle au Métropolis, demain soir à 20 h. Première partie: Jah Cutta.