Le festival Montréal complètement cirque débute ce soir avec la présentation de Séquence 8 de la troupe montréalaise Les 7 doigts de la main. Un autre spectacle très attendu est celui des Vikings suédois, Undermän, un trio inusité défiant toute logique, en plus des lois de la gravité.

La bande-annonce de ce spectacle créé l'an dernier par la compagnie suédoise Cirkus Cirkör a des airs de film de fiction: «Ceci est la vraie histoire de trois porteurs qui vivaient un rêve... Avec leurs partenaires, ils ont connu le succès, la gloire et l'amour... Jusqu'à ce qu'ils perdent tout... Seuls et sans personne vers qui se tourner, ils se sont retrouvés...»

Bien qu'on en rajoute une couche dans la narration, tout est vrai et tout part de là. De ces trois porteurs, séparés de leurs voltigeuses pour cause de rupture amoureuse. Qui ont décidé d'unir leurs forces pour créer un spectacle. Ces spécialistes de main à main, qu'on appelle «Undermän», habituellement dans l'ombre de leur partenaire, se sont retrouvés du jour au lendemain Gros-Jean comme devant...

Que devient le porteur sans son voltigeur? Voilà la question.

«Il y a eu pour ces trois acrobates une véritable remise en question, explique le metteur en scène Olle Strandberg au cours d'une entrevue téléphonique. Non seulement ils ont perdu leurs partenaires, mais ils ont du coup perdu leur boulot! Seuls, que valaient-ils? Ils n'avaient plus de numéros! Ce n'est pas aussi évident qu'on le croit de trouver quelqu'un d'autre. Il faut une complicité extraordinaire, une confiance absolue, un engagement...»

C'est dans ce contexte qu'a vu le jour, au printemps 2011, Undermän, 15e production de Cirkus Cirkör, une compagnie de cirque qui est aussi à l'origine d'une école secondaire du même nom, avec un programme de cirque préparatoire. Depuis la création, les trois acrobates - Mattias Andersson, Peter Aberg et Matias Salmenaho - n'ont cessé de promener leur spectacle.

Le résultat, on l'imagine aisément, sort des sentiers battus. D'abord parce que ces trois armoires à glace font des numéros de main à main «homme à homme», une épreuve de force d'autant plus impressionnante quand on sait que certains d'entre eux avaient peur des hauteurs! Ensuite, parce qu'ils ont dû repartir à zéro, en réinventant des numéros de cirque. Undermän, c'est un peu l'histoire de leur renaissance artistique.

«C'est vrai qu'il y a une démonstration de force et une prise de risque, poursuit le metteur en scène. Mais en même temps, ces gars-là sont capables de montrer leur vulnérabilité et leur tristesse. On les voit essayer plein de nouveaux trucs. L'un d'entre eux a une passion pour le cube Rubik; on a trouvé le moyen de l'intégrer dans le spectacle. Il reste qu'Undermän est un spectacle très physique.»

Autre particularité de ces trois Vikings en chemises de chasse, qui évoquent nos bûcherons du Cirque Alfonse: ils jouent tous de la musique. Ils seront guidés sur scène par le musicien Andreas Tengblad, leader de la formation Ripple & Murmur. À la fin du spectacle, Tengblad poursuivra la représentation en interprétant quelques-unes de ses chansons.

Bref, c'est une histoire «entre hommes», qui finit plutôt bien, si l'on en croit le chemin parcouru par nos trois esseulés... Mais le cirque contemporain suédois a-t-il des caractéristiques qui lui sont propres? «C'est une question difficile, répond Olle Strandberg. Je dirais qu'il y a un esprit scandinave que je résumerais en deux mots: franchise brute. Nous sommes conscients des difficultés de la vie, mais on est capable d'en rire. Avec une émotion contenue, pas débordante. Nous sommes un peuple du Nord, peut-être semblable à vous.»

Les circonstances ont fait que ces trois gars du Nord puisent en eux les ressources qui leur ont permis de continuer à faire ce qu'ils aiment. «C'est quelque chose qui devait être fait, indique Olle Strandberg. Au moment où ils l'ont vécu. Et ça les a fait grandir.»

Les trois porteurs ont-ils de nouvelles flammes? «Je ne veux pas tout révéler parce qu'ils en parlent dans le spectacle, répond-il, mais oui, certains sont retombés amoureux. Mais aucun n'a encore de partenaire de scène...»

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Du 9 au 14 juillet au National.