Le Cirque Invisible, qui s'amène pour la première fois à Montréal, se situe au carrefour de toutes les expériences artistiques, politiques et sociales qu'ont connues le couple formé de Jean-Baptiste Thierrée et Victoria Chaplin. Depuis une vingtaine d'années, il est considéré comme une institution même si les deux artistes refusent systématiquement tout contact avec les médias et toute forme de promotion.

En 1969, Thierrée, qui vient de laisser le théâtre pour le cirque, aperçoit dans un magazine féminin une photo de Charlie Chaplin et de sa fille Victoria. La jeune femme, qui a une formation en danse et musique classique et qui a tâté un peu du cinéma, raconte en entrevue qu'elle rêve de faire du cirque. Il lui écrit en Suisse et elle vient le rejoindre à Paris au début de 1970.

Naît de cette rencontre le Cirque Bonjour que Jean Vilar invitera au Festival d'Avignon en 1971 et qui connaîtra un engouement immédiat. Trois ans plus tard, Jean-Baptiste et Victoria sabordent le Cirque Bonjour, trop traditionnel à leurs yeux, et optent pour une formule plus légère, le Cirque Imaginaire, recentrée sur le couple et ses deux jeunes enfants, dont James Thierrée qu'on a applaudi à La TOHU l'automne dernier. Le Cirque Invisible, leur troisième spectacle, sera créé à Florence en 1990.

J'ai eu le bonheur de les voir à l'oeuvre au Théâtre du Rond-Point à Paris, en novembre 2008: un spectacle à la fois simple et sophistiqué, naïf et esthétisant, qui a séduit aussi bien les enfants que leurs parents. Les numéros, qui s'enchaînent sans avertissement, vont du tour de magie à moitié raté avec un gros clin d'oeil de Jean-Baptiste à une chorégraphie-contorsion de Victoria dans un des costumes magnifiques qu'elle a créés elle-même. Y participe également toute une ménagerie, lapins, oiseaux, etc.

Si les mots poésie et magie sont trop souvent galvaudés, ils retrouvent leur sens véritable avec le Cirque Invisible.

Le Cirque Invisible, au Théâtre Outremont, jusqu'à dimanche.