Gabino Rodríguez poursuit son projet théâtral sur la démocratie au Mexique. L'artiste mexicain est de retour au Festival TransAmériques avec Tijuana, portant sur cette ville cauchemar à la frontière du rêve américain.

Narcotrafic, corruption, violence, impunité... Les sujets de conversation ne manquent pas avec les Mexicains. Plusieurs d'entre eux croient que les gouvernements se succèdent sans s'attaquer aux vrais problèmes. Démocratie, quelle démocratie?

«On a cru que l'alternance politique allait changer le pays, mais aujourd'hui, les gens sont méfiants, désillusionnés. Moi, je crois toujours à l'idée de la démocratie pour gérer une société humaine. Ce que nous faisons comme artistes est justement d'entamer un débat sur les enjeux démocratiques. Notre rôle est d'offrir de nouveaux outils de réflexion, même si les choses vont mal», dit Gabino Rodríguez.

L'homme de théâtre est donc devenu, pendant six mois, l'homme de la rue: Santiago Ramirez, un citoyen de Tijuana qui trime dur pour payer ses fins de mois. 

Le groupe Lagartijas tiradas al sol (Lézards étendus au soleil), dont Gabino Rodríguez fait partie, ne souhaitait pas tant montrer qu'il est difficile de vivre à Tijuana avec le salaire minimum que de voir comment l'art peut s'impliquer dans des problèmes sociaux.

«On souhaite que le spectateur puisse réfléchir à ces réalités avec nous. On veut faire comprendre la réalité d'un homme qui travaillera, toute sa vie et sans espoir d'avancement, au salaire minimum.»

Tijuana, ville frontière, ville commerciale, ville pauvre où les maquiladoras (usines en sous-traitance) emploient une main-d'oeuvre bon marché pour fabriquer des produits destinés au marché américain, est à l'inverse de l'opulente Californie, située à deux pas de là.

Enquête

En réfléchissant à la façon d'écrire la pièce, Gabino Rodríguez a pensé à une stratégie s'approchant de l'enquête journalistique.

«Nous sommes des admirateurs du journalisme dans un esprit d'immersion dans la réalité. Le journalisme tente de révéler l'inconnu, alors que nous voyons le théâtre comme un endroit qui existe et qui n'existe pas tout à la fois.»

PHOTO GABINO RODRÍGUEZ, FOURNIE PAR FESTIVAL ESCENAS DO CAMBIO

Gabino Rodríguez est devenu, pendant six mois, l'homme de la rue: Santiago Ramirez, un citoyen de Tijuana qui trime dur pour payer ses fins de mois.

Est-ce à dire qu'une pièce comme Tijuana vient remplir un certain vide médiatique ou pédagogique, un peu comme l'a fait ici J'aime Hydro en parlant de notre société d'État?

«Le journalisme est en crise ici comme ailleurs. Il se fait moins d'enquêtes et les réseaux sociaux ont causé beaucoup de dommages. Mais je ne crois pas que le théâtre peut remplacer le journalisme. Nous avons dans ce projet un objectif pédagogique, mais nous ne cherchons pas à reconstituer des faits. On travaille à partir de la réalité pour amener le spectateur à se faire une opinion sur elle, sans rien lui imposer.»

_______________________________________________________________________________

À Espace libre du 24 au 27 mai, dans le cadre du Festival TransAmériques. En espagnol avec sous-titres anglais et français. Il y aura une rencontre avec Gabino Rodríguez après la représentation du 25 mai.

Photo fournie par Festival escenas do cambio

Gabino Rodriguez dans Tijuana