Le populaire chorégraphe français Christian Rizzo fera sa première incursion au festival TransAmériques (FTA) en présentant au Théâtre Jean-Duceppe, demain et samedi, sa plus récente création, D'après une histoire vraie, chaudement applaudie au Festival d'Avignon l'été dernier.

Artiste multidisciplinaire, Christian Rizzo a chanté dans un groupe rock, créé une collection de vêtements, étudié les arts plastiques et collaboré avec des chorégraphes comme Mathilde Monnier, Mark Tompkins, Vera Mantero et Rachid Ouramdane à titre d'interprète, de créateur de costumes ou de concepteur sonore.

Pour sa première participation au FTA, il a choisi d'offrir au public montréalais D'après une histoire vraie qui, comme son nom l'indique, a été créée à partir d'un souvenir bien réel.

Le chorégraphe garde en effet en mémoire une performance de danse folklorique à laquelle il a assisté au cours d'un festival de danse à Istanbul, il y a 10 ans.

«Cette expérience m'a beaucoup touché et est venue se loger très profondément en moi. Chaque fois que je me mettais à créer, j'avais envie de repartir sur les traces de ce souvenir. J'ai donc rouvert la boîte de Pandore», explique le chorégraphe.

Communauté masculine

La pièce, qui met en scène huit danseurs et deux batteurs, est avant tout une histoire d'hommes, un rituel qui mêle danses contemporaine et folklorique au son d'un rock tribal énergisant.

Pieds nus martelant le sol, bras tendus vers le ciel, le bassin ondulant et le corps tournoyant, les interprètes de D'après une histoire vraie nous plongent dans la communauté des hommes, réunissant les mouvements de base qu'on retrouve dans la plupart les danses folkloriques.

«Je ne suis pas satisfait des représentations de l'homme aujourd'hui. Il existe soit une version très machiste, soit une présence homosexuelle très stéréotypée. J'ai voulu montrer ce que c'est d'être ensemble, entre mecs. Je me suis presque retrouvé comme chef de gang en même temps que chorégraphe!», raconte Christian Rizzo, qui a ainsi rassemblé des hommes capables d'être ensemble dans la joie, la tendresse et l'écoute.

Pourtant, D'après une histoire vraie est tout sauf une pièce de groupe: Christian Rizzo revendique en effet l'importance des singularités comme ciment du groupe.

«Cinquante personnes sur scène faisant la même chose, c'est impressionnant, mais c'est aussi avec cette philosophie qu'on a créé des dictatures. Le groupe est beau quand des multitudes de singularités y apparaissent», lance-t-il.

Rapport à l'histoire

Alors qu'il avait pour ambition de parcourir les pays du pourtour méditerranéen à la recherche de ses interprètes, Christian Rizzo a dû revoir ses plans et créer D'après une histoire vraie en cinq semaines seulement, à cause de restrictions budgétaires.

D'après une histoire vraie est également un dialogue entre danse et musique. Les deux batteurs rock martèlent ainsi des pièces rythmiques tribales qui évoquent celles qu'on retrouve dans le folklore. Mais Christian Rizzo souhaite avant tout, dans cette création, repenser la notion de modernité.

«En voyant, 10 ans plus tôt, cette petite danse à Istanbul, je me suis dit qu'il était temps de questionner la modernité au regard de ce qu'on appelle le folklore ou le populaire. Je refuse un peu les questions d'histoire, la séparation entre le savant et le populaire. Cette pièce prend à bras le corps ces deux pôles dits antinomiques qui, d'après moi, ne le sont pas», explique Christian Rizzo.

«J'en ai assez qu'on considère que l'histoire en danse commence avec des compagnies comme la Judson Dance Theater ou la Black Mountain. Il est vraiment temps d'aller plus loin que ça», conclut-il.

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Au Théâtre Jean-Duceppe de la Place des Arts, demain et samedi.