Le NoShow a ouvert le 8e Festival TransAmériques jeudi soir. Retour sur un non-spectacle qui se penche avec compassion sur les maux qui affectent la pratique du théâtre de nos jours.

Ceci n'est pas une critique. Il n'y a pas eu de spectacle à proprement parler lors de l'ouverture du festival TransAmériques jeudi; il ne saurait donc y avoir de critique non plus.

L'objet qu'est ce NoShow nous propose une réflexion-discussion sur les coûts réels d'une production théâtrale et des billets de spectacle, sur les conditions de travail des artisans du théâtre, mais aussi, et malgré tout, sur l'amour et la nécessité de cet art millénaire.

«Vivre dans le doute»

D'entrée de jeu, même s'ils ne jouent pas tout le temps, sept comédiens en quête de spectacle s'assoient à une longue table, leur unique «décor», pour tenir une assemblée générale extraordinaire. Ce décorum minimal servira de ligne directrice à la soirée, chaque point de l'ordre du jour se voulant un numéro présenté par un nombre prédéterminé de participants.

Les comédiens expliquent les raisons qui les poussent à faire ce métier, que ce soit «pour la recherche et vivre dans le doute» ou «pour aimer vivre dans la marde et, surtout, s'en sortir».

Ils nous communiquent la somme des recettes aux guichets - 4299$ récoltés avant la présentation selon le bon vouloir des «spectateurs» -, soit juste assez pour payer trois comédiens. Après une collecte dans la salle, un quatrième comédien est ajouté. Chacun se présente et le public vote pour les candidats de son choix.

Non-théâtre

Jeudi, la distribution était assurée par François Bernier, Hubert Lemire - deux des «coauteurs» de la proposition scénique - ainsi que par le Français Julien Storini et la Vénézuélienne Francesca Barcenas. Tous les quatre excellents, comme meneurs de discussion et comme «comédiens», voire humoristes.

Enfin, oui, parce qu'il y a bel et bien du théâtre dans le NoShow, du texte écrit et interprété, de l'émotion et beaucoup d'humour, même si le spectacle est dominé par une démonstration engagée sur le rôle du théâtre dans notre société «marchande».

Longue démonstration, parfois redondante, échevelée et non exempte de clichés. En outre, la troupe prêche devant un public de convertis!

Avouons qu'il est difficile de ne pas faire de critique devant du non-théâtre qui n'arrive pas à échapper à sa nature théâtrale. Mais reprenons-nous!

Critique acidulée

Les comédiens font dans la critique acidulée aussi. On parle, chiffres à l'appui, de subventions gouvernementales et d'une certaine chroniqueuse de droite d'un certain quotidien mont-réalais; d'un sex-symbol masculin bien connu sur le retour; de couchette pour obtenir un rôle; de l'émission La voix, de Vincent Guzzo, etc.

Le message est clair et répété sur tous les tons, sur scène et en vidéo: il est difficile de vivre et de faire du théâtre aujourd'hui. Mais tout n'est pas que noir; il y a le plaisir aussi, comme le démontrent des batailles de guimauves qui ponctuent à deux reprises la proposition d'Alexandre Fecteau.

Interactivité

Les spectateurs sont invités à prendre part à la «représentation» à quelques reprises. Une spectatrice monte sur la scène, par exemple, pour donner la réplique, créant un moment d'hilarité générale.

Mais puisqu'il s'agit d'un débat, en conclusion, disons qu'il y a dans ce groupe une belle énergie, un réel amour du théâtre, quoique bien des illusions et des techniques - allô Brecht, le théâtre de rue et l'interactivité - n'offrent rien de bien nouveau à ceux qui vont au théâtre depuis quelques décennies.

Il est vrai que tout a été dit et redit. Mais pas par eux. Il est toujours utile de convier le public à la réflexion, encore nécessaire, sur l'art théâtral et sa place dans la société.

À la Cinquième Salle de la PdA les 3, 4 et 5 juin.