Voir une pièce de Lemi Ponifasio, c'est toujours vivre une expérience ultrasensitive, avec tous les sens, mais aussi extrasensorielle, parce qu'en grand maître de cérémonie, il excelle à transporter le spectateur dans un état de transe méditative proche de celui qui prévaut dans les rituels chamaniques.

Pour la deuxième fois invité au FTA avec Birds with Skymirrors, présenté au Théâtre Maisonneuve hier et avan-hier il ne faillit pas à sa réputation ni à la façon unique d'utiliser la danse, le mouvement et l'espace scénique comme un élément d'un grand tout.

On est assis dans une salle de spectacle urbaine. Peu à peu, au fil de la succession des tableaux qui se reflètent dans un miroir à l'arrière-scène, la projection de l'image d'un pélican pris dans le pétrole, les sons stridents qui agressent les tympans par leur irritation métallique ou magnétique, on se souvient que nous appartenons tous à une dimension globale, qui nous dépasse et nous englobe.

Tous les jours, la réalité météorologique et écologique nous rappelle ce discours de planète en danger, mise à mal par notre insouciance humaine, mais il s'agit d'une oeuvre ici, donc non d'un discours, mais d'une forme.

Une forme bouleversante de beauté esthétique, que ce soit les corps et les gestes des sept hommes, à la fois moines et oiseaux aux bras d'albatros, ou ceux des femmes, puissantes et sensuelles, hypnotiques.

Beauté des voix, chants de pleurs ou de harangues. Beauté de la dévastation elle-même rendue par une atmosphère sombre, entièrement noire, noir mat ou scintillant. Beauté d'une incantation métaphysique qui livre le message plus fort que tous les discours, mais va aussi beaucoup plus loin que lui. Birds with Skymirrors, encore une oeuvre inoubliable de Ponifasio.