Marcus Youssef est un pur produit de la scène théâtrale anglo-montréalaise. Depuis sa sortie de l'École nationale de théâtre en 1992, le comédien d'origine égyptienne a vécu à Toronto, puis à Vancouver, où il a créé la plupart de ses pièces. Cette semaine, il est de retour à Montréal, où il vit désormais, pour présenter Winners and Losers.

L'idée de ce spectacle créé au mois de novembre dernier à Vancouver est née d'un petit jeu qui a commencé entre Marcus Youssef et son ami James Long, qui dirige le théâtre Replacement. Les deux directeurs artistiques qui ont récemment franchi le cap de la quarantaine ont commencé à faire un bilan de leur première moitié de vie. Au départ, il s'agissait d'une discussion où les deux hommes se parlaient de leurs choix de vie.

«Un jour, j'ai reçu un courriel d'un ami impliqué dans un projet de vente pyramidale, raconte Marcus Youssef au cours d'une entrevue téléphonique à Brighton, en Angleterre, où il présente Winners and Losers. Je l'ai appelé pour l'aviser qu'il avait été «spammé». Mais il était sérieux... Je me suis dit, c'est winner ou loser, ça? Tout est parti de là.»

Un jeu dangereux

Les deux hommes ont agrandi le terrain de jeu, en se demandant, par exemple, Pamela Anderson, gagnant ou perdant? En justifiant leurs réponses. Petit à petit, le jeu est devenu plus compétitif et plus personnel. Ta mère, gagnante ou perdante? À la fin du jeu, les questions ne portent plus que sur les deux protagonistes. En cuisine, gagnant ou perdant? Père de famille, gagnant ou perdant?

«C'est excitant et dangereux à la fois! détaille Marcus Youssef. Il y avait une règle: ne pas inclure nos femmes et nos enfants... Mais c'est un jeu qui peut être très confrontant. On commence par se prononcer sur Disney, les Stones, un événement politique, peu importe, mais quand on porte un jugement sur quelqu'un qu'on connaît et qu'on aime, ça peut être plus délicat. Ce jeu de la vérité peut aller très loin.»

Comment cette expérience de jeu a-t-elle changé votre relation avec James Long? «C'est intéressant parce que je crois que ça nous a rapprochés, répond Marcus Youssef, même s'il y a des jours où après avoir verbalisé certaines choses, on a besoin de prendre un peu de distance. Parce qu'on se place volontairement dans des zones ombrageuses, où on ne veut pas toujours aller.»

Pour ne pas répéter inlassablement les mêmes questions et réponses, les deux acteurs se donnent le droit d'improviser de nouvelles questions. «C'est important pour nous de se surprendre. Dans ce sens, il y a une grande part d'improvisation dans le show, dit Marcus Youssef. Et puis, on fait aussi participer le public. La plupart du temps, les gens abordent un sujet d'actualité et nous demandent de nous prononcer: gagnant ou perdant?»

La scénographie est minimaliste. Il n'y a qu'une table et deux chaises. «C'est un spectacle d'une heure vingt avec deux gars assis face à face. Nous avons une cloche, que nous sonnons lorsque nous avons l'impression d'avoir gagné le débat. Il y a aussi un quiz de musique où j'essaie de deviner ce qui joue. C'est un spectacle qui nous confronte à nos perceptions, sur nous-mêmes et sur les autres.»

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À l'Espace libre du 27 au 29 mai. En anglais seulement.