Au fil des ans, les FrancoFolies ont monté des dizaines d'hommages à des artistes, vivants ou disparus : Brel, Léveillée, Dédé Fortin, Nino Ferrer même. Avec des bonheurs divers...

« Des affaires à la chaîne, souvent », lance Yann Perreau qui s'est vu confier la mise en scène d'un hommage à Édith Piaf, qui célébrerait ses 100 ans le 19 décembre prochain. Piaf a 100 ans. Vive la môme ! sera présenté une seule fois dans le cadre des FrancoFolies - mercredi à la Maison symphonique - puis en tournée à travers le Québec en novembre.

« On ne veut pas faire une bio mais évoquer le personnage d'Édith Piaf dans ses passions et son humour », nous a expliqué Yann Perreau, rencontré avant que ne commencent les répétitions, avec Betty Bonifassi, l'une des interprètes de ce spectacle où l'on entendra aussi Florence K, Sylvie Moreau et Daniel Lavoie.

Un Perreau qui commence à avoir l'expérience des collectifs : l'an passé, il a été de la merveilleuse Symphonie rapaillée avec l'OSM et de ce tiède hommage à Félix Leclerc au Festival d'été de Québec.

L'expérience de la mise en scène aussi : l'ancien de Doc et les Chirurgiens a signé celle de Légendes d'un peuple (il y chante aussi), présenté samedi prochain au théâtre Maisonneuve en clôture de ces 27es FrancoFolies. « On est tous des pros. Dans des affaires comme ça, tu dois prendre ta place mais sans jamais oublier que ce n'est pas ton show... »

S'écouter l'un l'autre

Pour Vive la môme !, dans le dénuement relatif de la Maison symphonique, Perreau a choisi une approche où « chaque interprète sera le spectateur des autres ».

« On va tous se retrouver dans un bistro, à applaudir et chanter en choeur, avec les cinq musiciens dirigés par Yves Desrosiers qui a fait un magnifique travail d'arrangements avec les 25 chansons choisies. Dans le respect total de l'oeuvre... »

« Yann a cette capacité d'inventer des univers », dira pour sa part Betty Bonifassi pour qui Piaf, « la femme à hommes », est amour, passion et rage de vivre. « Ma grand-mère napolitaine chantait cette chanson, Plus bleu que tes yeux, qui dit "Plus gris que le gris de ma vie"... » Mercredi, Betty B. interprétera aussi Padam, padam : « Des "Je t'aime" de 14-juillet / Des "Toujours" qu'on achète au rabais... »

Parmi ses quatre ou cinq chansons, Daniel Lavoie interprétera Je sais comment et L'accordéoniste ; Florence K, Mon Dieu et Le billard électrique ; Perreau, Milord ; tandis que Sylvie Moreau a hérité, entre autres, de la pièce Les mots d'amour.

« L'actrice qui chante », comme Sylvie Moreau se décrira elle-même au cours d'un bref entretien téléphonique, apprécie ce coup du hasard. « Dans Le dernier délire permis, une pièce [de Jean-Frédéric Messier, 1989] qu'on avait jouée au théâtre Momentum, je récitais la chanson Les mots d'amour que Yann Perreau, sans savoir cela, m'a offert de chanter... »

Sylvie Moreau, avec Sandra Dumaresq dans les Country Girls ou ailleurs, a toujours chanté dans des environnements théâtralisés. Pour Piaf, c'est autre chose, mais la théâtralité n'est jamais loin de ce « personnage hautement dramatique »...

« Interpréter Piaf, avec ces chansons d'un autre temps, représente un grand défi technique et rythmique. Elle avait une voix brute, crue, pas travaillée du tout, avec ses défauts. Mais quelle voix ! Pour l'instant, je travaille seule et je me crois... »

Martha Wainwright sera aussi de la représentation « francofolle » de Vive la môme !, de même que Quartom, un quatuor vocal qui pourrait évoquer Les Compagnons de la chanson, octuor venu au Québec avec Édith Piaf tout de suite après la Seconde Guerre. Le ténor Paul Buisonneau (1926-2014) n'a jamais repris le bateau...

Le paris d'Édith

Yann Perreau rappelle qu'Édith Piaf, « une control freak totale ! », a aussi contribué à l'émergence de Charles Aznavour, d'Yves Montand et de l'Américain Eddie Constantine qu'elle avait pris avec elle dans le musical La p'tite Lili. « Mais nous n'avons pas voulu faire de référence directe à des personnes ou à des événements », répète le metteur en scène, tout en précisant que l'environnement « parigot » sera évoqué sans en faire une caricature : « Piaf était une enfant de la rue... »

Marie-Thérèse Fortin, quant à elle, sera la voix qui fera le lien entre les tableaux librement inspirés du récit Piaf (Robert Laffont, 1993), écrit par Simone Berteaut alias Momone, la demi-soeur de la chanteuse et la seule personne qui a partagé sa vie pendant 30 ans.

Yann Perreau, donc, s'est donné comme mission de faire renaître la magie d'Édith Piaf en montrant les aspects moins connus de la personnalité de la célèbre chanteuse : « Elle était pas mal plus rock'n'roll qu'on pense », lance le metteur en scène - dans un biopic, serait-il le fougueux Marcel Cerdan ou le beau Théo Sarapo ? - qui semble avoir pris le pari de laisser le mythe Piaf dans les seules chansons.

Mais sans nous dire, le coquin, à qui il a confié l'interprétation de La vie en rose, de Sous le ciel de Paris et de L'hymne à l'amour...

À la Maison symphonique le 17 juin, dans le cadre des FrancoFolies