Lors du premier de ses deux spectacles présentés à l'occasion des FrancoFolies pour clore sa tournée De colère et d'espoir, Richard Séguin a montré vendredi à l'Astral qu'il avait encore toute sa pertinence. Entouré des « deux meilleurs guitaristes du Québec», Hugo Perreault et Simon Godin, il a rempli tout l'espace possible de sa voix riche et profonde, dans un spectacle aux éclairages subtils et aux décors évocateurs.

Derrière, un champ de blé, surmonté d'un écran où toutes les ambiances sont projetées. Les tableaux sont multiples: d'un lever de soleil dans Pour retrouver le monde et l'amour, un texte de Miron, au rouge incandescent de La maison brûle, à la lumière éblouissante de la route pour L'Ange vagabond, hymne américain d'exil et de solitude qui n'a pas pris une ride.

C'est ce qui frappe dans ce spectacle intime: les plus vieilles chansons de Séguin, avec cet habillage cru de guitares et les voix fortes des trois hommes, ont gardé leur essence folk et se marient parfaitement aux nouvelles pièces tirées de ses deux plus récents disques, les Écris, écris, Qu'est-ce qu'on leur laisse ou In God We Trust.

Dans cet enrobage de guitares de toutes sortes - 14 en tout!-, le corpus de Séguin prend en fait une cohérence totale et le chanteur de 60 ans porte ses chansons avec vigueur et conviction. Ses interventions sont la plupart du temps punchées et drôles : il faut l'entendre évoquer l'horizon lointain de la fin du mandat de Stephen Harper - octobre 2015 -, le premier ministre qui se met « la tête dans les sables bitumineux».

Rock ou lancinant, blues ou folk, americana jusqu'au bout des ongles, Séguin est toujours debout, les mots en avant, les siens comme ceux des autres. En cadeau, en rappel, il a même chanté la traduction que Hugues Aufray a fait du Monde et des temps changent, de Dylan.

Certes, son public a vieilli. Il est loin, le temps où les spectateurs faisaient la file deux heures avant l'ouverture des portes du Spectrum. Vendredi, l'Astral n'était pas plein à craquer : les gens étaient à l'écoute et l'ambiance était plus au recueillement qu'à faire sauter le plafond.

Mais avec l'écho des succès au loin, reste un homme et ses chansons, rassembleur, qui offre un spectacle léché et réfléchi, qui s'adresse à tous ceux qui ont envie d'entendre parler d'espoir, à tous ceux qui ont envie d'écouter. Dommage pour les autres.