Il est entré en scène en bobettes. Un t-shirt lui couvrait le haut du corps, mais ce n'est pas ce qui a retenu l'attention de l'auditoire. Supposition: Yann Perreau cherchait une manière de dire, sans avoir à le formuler, que son spectacle solo d'hier soir constituait pour lui une mise à nu. Ceci établi, ne lui restait qu'à se rhabiller. Ce qu'il a fait dans un loufoque numéro de dress tease qui, comme chacun sait, est le contraire du striptease.

Une fois vêtu - pantalon et veston pâles, souliers de crocodile (?) noir et blanc -, il a interprété Soul Circus. D'une voix douce, en touchant délicatement son instrument. Solo, pour Yann Perreau, ça veut bien sûr dire seul au piano. Mais le chanteur n'a pas cherché à jouer les concertistes lyriques. Il a livré ses chansons avec ses tripes, passant du brut au sensible, dans un spectacle déluré marqué par la spontanéité.

Ce qui est ressorti le plus, c'est un désir de sortir du cadre. Yann Perreau a convié ses fans à un «buffet» (l'expression est de lui) tout inclus: cabotinage (il a lancé des petits sandwiches dans la foule), chair de poule (Invente une langue pour me nommer, l'une de ses plus belles chansons), bouffonnerie (une danse sur un poème de Jean-Paul Daoust) et prise de parole politique.

Grimpé sur le banc de son piano, le chanteur a en effet profité de l'occasion pour gueuler contre les va-t-en-guerre et l'apathie généralisée. «Tirons sur tout ce qui ne bouge pas», a-t-il clamé. Il a parlé avec ses mots à lui, mais pour dire le fond de sa pensée et ce qu'il avait dans le coeur, il a aussi emprunté ceux de Nelson Mandela, Walt Whitman ou Céline.

Ce n'était pas un concert, c'était un moment de musique et de liberté arraché au présent. Imparfait, forcément, mais habité et prenant. Et puis à la fin, Yann Perreau a triché. Le rideau s'est ouvert et il a rejoint son groupe sur la scène du Club Soda pour conclure son spectacle avec fracas. La table était mise pour son spectacle rock prévu à 22h.