Le groupe liégeois Été 67 porte bien son nom puisque l'approche qui y est préconisée s'inspire directement des années 60 et autres périodes antérieures... à la naissance de ses membres. Tous dans la vingtaine! Alors? Alors rock, folk-rock, folk, bluegrass, blues ou jazz primitif. Alors basse, batterie, guitares électriques et acoustiques, harmonica, flûte traversière, claviers.

Musiques amerloques d'une autre époque en Belgique francophone? Nicolas Michaux corrobore gentiment, sans y voir quoi que ce soit de péjoratif:

«Nous sommes tous des adorateurs de Bob Dylan, Neil Young Johnny Cash et beaucoup d'autres musiques venues d'Amérique. Forcément, ça se ressent dans nos compositions et notre façon d'enregistrer. À la manière des enregistrements qu'on aime, on cherche quelque chose d'assez rude. On évite de trop lécher la facture, notamment en enregistrant tous dans une même pièce. À l'ancienne quoi. On aime jouer ensemble dans les bars, sur des scènes... En studio, on avait envie de la même chose», explique le chanteur et parolier du groupe.

Été 67 assume totalement ses choix, c'est le moins qu'on puisse dire.

«Aujourd'hui, soulève notre interviewé, faire de la musique sans utiliser les ordinateurs, sans être soumis aux dictats de la technologie, cela peut être aussi un engagement artistique assez fort. Bien sûr, cet engagement est personnel, ce n'est pas une revendication politique! On aime ce son, on a les bons outils pour exprimer ce son.»

Nicolas Michaux est invité à faire la genèse de ce groupe dont Passer la frontière, chanson titre de son plus récent album, s'avère un «coup de coeur  francophone 2011» de l'Académie Charles Cros.

«L'aventure a commencé sur les bancs d'école, tout simplement. Les dimanche et les mercredi après-midi, on répétait dans le grenier de Nicolas Berwart, le bassiste du groupe. Puis on a joué dans les bars, les fêtes de famille, etc.  Parallèment à nos études, l'aventure musicale a fini par devenir une profession. Nous faisions beaucoup de reprises au départ: Rolling Stones, Beatles, puis le Velvet Underground, Johnny Cash, Neil Young ou du vieux blues comme celui de Blind Willie Johnson.

«Mais nous avons aussi repris du Brassens. Nous sommes absolument francophones, notre langue maternelle est le français. Nous pensons en français, rêvons en français, commandons en français nos croissants le matin. Ainsi, l'écriture de nos chansons françaises originales remonte à nos débuts.»

Un premier EP d'Été 67 fut rendu public en 2005, s'y trouvait la chanson Café de la gare, alors sélectionnée par le réseau des Radios publiques de langue française.

«À partir de ce moment-là cette chanson fut connue en Belgique, un petit peu en France... ce qui nous a permis de nous lancer dans une assez longue tournée qui nous a menés dans plusieurs pays européens et même jusqu'aux  FrancoFolies de Montréal. En formule acoustique, nous sommes venus au Coup de coeur francophone l'automne dernier, nous revenons aux Francos en formule électrique.»

Nicolas Michaux écrit les textes d'Étét 67, la musique est composée collectivement. Re-classicisme dans la façon de faire?    «C'est vrai, admet-il de nouveau, sans broncher. On n'essaie pas à tout prix d'être innovant ou totalement original, on essaie d'exprimer ce qu'on a envie d'exprimer. La démarche est comparable à celle d'un chanteur traditionnel qui a des choses à dire, quel que soit son instrument d'accompagnement.»

D'accord, Nicolas, arrêtons d'insister. Dites-nous plutôt ce qui se trame entre les frontières que traverse Été 67, enfin comme le deuxième album de la formation semble le suggérer.

«Ce sont plusieurs frontières, pose-t-il. D'abord, la métaphore des frontières physiques permet de raconter les expériences qu'on a pu vivre sur la route. Nous avions 20 ans, nous sommes partis en tournée, nous avons vécu beaucoup de choses depuis. La frontière peut également être celle du temps: celle séparant l'adolescence d'un âge plus mûr, par exemple. Passer la frontière est aussi une douce invitation à regarder au-delà des barrières entre les gens: ceux qui ont leurs papiers et ceux qui ne les ont pas, ceux qui ont du travail et ceux qui n'en ont pas...

«Cet album, conclut Nicolas Michaux, est une sorte de carnet de voyage à plusieurs niveaux. Voyage dans l'espace, voyage dans le temps, voyage dans l'esprit d'un homme un peu en marge du monde qui l'entoure. Qui peine à rentrer dans le moule. Qui peut s'évader dans l'alcool, stupéfiants ou histoires d'amour foireuses... tout en essayant de se rattraper. Passer la frontière n'est pas un album concept, mais, au bout du compte, on a dressé inconsciemment le portrait d'un personnage qui s'y retrouve partout.»

Été 67 se produit ce lundi, 21h, Scène Loto-Québec et demain, 21h, au Métropolis en première partie de Catherine Ringer.