Difficultés à attirer des artistes, réorganisation d'horaire, couverture médiatique réduite et même parfois diminution de l'achalandage. Les craintes formulées l'an dernier par plusieurs organisateurs d'événements à la suite de l'annonce du déménagement des FrancoFolies en juin étaient fondées, affirment-ils.

La première page du calendrier estival a été tournée en emportant avec elle les 22es FrancoFolies qui se tenaient plus tôt cette année, soit du 10 au 19 juin. Si les organisateurs de l'événement estiment que ce changement de case horaire a été bénéfique - avec un record de recettes de billetterie -, plusieurs festivals ayant eu lieu pendant la même période ont, pour leur part, déchanté.

Déjà l'an dernier, lorsque le grand patron des Francos, Laurent Saulnier, avait annoncé ce changement de dates, des événements comme le Fringe, le Festival Suoni per il popolo, Présence autochtone, le Festival d'été de Québec et même le Festival de la chanson de Tadoussac avaient manifesté haut et fort leur mécontentement. Un an plus tard, ils affirment tous sans détour ne pas avoir crié au loup pour rien.

D'abord, plusieurs organisateurs ont dû remanier leur programmation. Conséquence directe du déménagement des Francos, Présence autochtone a décidé de tenir son événement en deux temps - en juin et en août - en s'assurant ainsi de pouvoir bénéficier des installations de la place des Festivals à la fin de l'été. Un changement d'horaire qui a obligé les organisateurs à faire plusieurs contorsions.

«On a été drôlement désorganisés, mentionne le directeur général de Présence autochtone, André Dudemaine. Il a fallu travailler très vite et dans l'urgence. Ce ne sont pas des conditions idéales, admet-il. Tout ça est très acrobatique.» Et lors de la première portion de l'événement, en juin, M. Dudemaine, a noté une baisse de l'achalandage en salles lors de la présentation de films organisée dans le cadre de l'événement.

Du côté de Québec, où le Festival d'été bat présentement son plein jusqu'au 18 juillet, le directeur général, Daniel Gélinas, admet lui aussi que le changement de dates des Francos lui a donné du fil à retordre puisqu'il est plus difficile pour son organisation d'attirer des artistes européens qui ont d'abord été invités à se produire sur les scènes du festival montréalais.

Plusieurs observateurs ont d'ailleurs reproché aux organisateurs de l'événement de la Vieille Capitale de mettre moins d'accent sur les spectacles francophones. «On a essayé de trouver la voie qui nous permettait d'aller chercher ce qu'on voulait en contenu en francophone, explique M. Gélinas. Il va falloir qu'on travaille plus fort. Je pense que c'est un work in progress

Couverture médiatique

Autre difficulté: avoir une couverture médiatique. Difficile de se tailler une place quand les cahiers et les reportages culturels se consacrent presque entièrement aux Francos. «On a connu une très grande baisse de visibilité dans les médias francophones, souligne Steve Guimond, directeur artistique du Festival Suoni per il popolo, fête de la musique d'avant-garde et de pop audacieuse. Avant, il y avait plus d'attention apportée à nos spectacles.» Si les organisateurs n'ont pas encore fait le bilan, M. Guimond croit que son événement a enregistré une baisse du nombre de spectateurs.

Le festival Fringe, qui célèbre toutes les disciplines des arts de la scène, a lui aussi eu du mal à se tailler une place dans la presse culturelle francophone. Cette année, afin de célébrer le 20e anniversaire, les organisateurs ont mis le paquet en investissant davantage en publicité. Pourtant, ils ont calculé une baisse de 10% de l'achalandage pendant la manifestation qui s'est tenue du 1er au 20 juin. «On a fait plus et on a reçu moins, constate le directeur général de Fringe, Jeremy Hechtman. (Le déménagement des Francos), ça ne va pas nous tuer, mais ça ne va pas nous aider.»

Même le fondateur de Juste pour rire, Gilbert Rozon, qui avait pourtant soutenu ce changement de dates, admet que lorsque les FrancoFolies et le Festival de jazz battent leur plein, il est plus difficile de faire parler de son événement qui se déroule jusqu'au 25 juillet.

«(Pendant cette période), ça affecte un peu nos ventes, dit-il, ajoutant du même souffle que, une fois ces deux manifestations terminées, les billets de spectacle de Juste pour rire trouvent rapidement preneur. En même temps, c'est la vie. Il y aura toujours de la compétition et j'en souhaite plus. J'espère qu'il va y avoir 10 festivals en même temps que le mien.»