Peu avant le rappel, Angélique Kidjo essayait de chanter Afrika au milieu du parterre, pendant qu'une fan l'étreignait. Elle a encaissé la dose d'amour et a enfin soulevé la foule, après plus d'une heure d'efforts, avant d'entonner l'entraînante et fédératrice Agolo. Peu après, il manquait de place sur scène pour toutes les convulsions dansantes de bassin.

La Grande fête multiculturelle d'Angélique Kidjo relevait comme prévu du métissage, autant pour la musique que les musiciens et musiciennes, en fait. La Béninoise installée aux États-Unis avait invité plusieurs musiciens québécois - une section de cuivre féminine et deux percussionnistes, Luc Boivin et Mélissa Lavergne.

Au menu: worldbeat, rythmes mandingues, chansons françaises et succès rock ou soul. Bref, une fricassée de compositions originales et de reprises, comme dans ses disques.

Kidjo a commencé avec son matériel original de worldbeat accessible. Pas le début le plus électrisant qu'on ait vu. La foule, qui réussissait à remplir la place des Festivals, semblait découvrir les Kelele, Arouna et Senamou. Dans Arouna, la voix de Kidjo claironnait par-dessus un groove pesant et un tantinet arabisé, mais pas vraiment assez pour dégourdir la foule.

Vient ensuite Petite fleur, version Henri Salvador, avec seulement une basse et sa voix. C'est mi-groovy, mi-nostalgique.

La Béninoise, qui a déjà enregistré avec Peter Gabriel et Carlos Santana, ne fréquente pas seulement l'élite musicale. Elle a aussi invité hier sa «soeur québécoise», la comédienne Guylaine Tremblay, pour interpréter Le monde comme un bébé. Ça ne servirait à rien de critiquer la voix de la populaire comédienne. Le duo se voulait sympathique, et durait seulement une chanson.

L'hôtesse de la soirée a ensuite invité la soprano Marie-José Lord. Les deux ont entonné une jolie version de Summertime, en anglais et dans une autre langue que nous n'avons pas reconnue.

Autre femme capable de feux d'artifice vocaux, Béatrice Bonifassi a interprété avec Kidjo une version bizarre de Gimme Shelter. Guitares effacées, extra cuivre et rythme complètement déconstruit, qui semblait résonner depuis Conakry. Bonifassi est remontée plus tard sur scène pour chanter une autre reprise, Move On Up de Curtis Mayfield.

Même si le spectacle est éclectique et un peu inégal, Kidjo réussit à créer un véritable crescendo. Plus ça avance, plus ça s'améliore, comme le prouveront les imparables Afrika et Agolo. Et ça continue de s'améliorer, avec une version contagieuse de Tumba. La scène se noircit de danseurs professionnels comme de simples spectateurs. Il y avait une mère de famille à l'allure respectable, un gamin, un danseur aux muscles plats et fibreux. Il y avait même Normand Brathwaite. C'était la fête.