Salle Wilfrid-Pelletier à guichets fermés, foule cosmopolite, tenues élégantes, coiffures soignées, 120 $ le billet au parterre - du moins à la dernière rangée. Erykah Badu, Prix Ella-Fitzgerald 2015, est désormais une destination chic. Plus chic que hip, hier? Voyons voir.

La diva commence par se laisser désirer, débarque une heure et demie après le début d'une première partie dont on se serait passé. Enfin, les musiciens s'installent: DJ, batteur, bassiste, claviériste esquissent une version instrumentale de The World Is a Ghetto, allongent une sauce jazzy soul pendant dix autres minutes.

Un écran de neige s'allume, voilà finalement la reine afro-américaine. Enturbannée, couverte d'une grande cape à carreaux qui recouvre son chemisier. Altière, dites-vous? 20 Feet Tall, comme dit la chanson.

Une ballade jazzy, vaporeuse, nous est servie et puis le public est debout pour On & On qui se transforme progressivement en jazz hip-hop.

Erykah a la situation en main! Toutes et tous sont suspendus à son Appletree, qui débouche sur une série d'impros percussives et vocales, choristes à l'appui.

Le groove repart de plus belle sur I Want You. Erykah a retiré sa cape, la prochaine séquence s'annonce plus physique, presque aérobique, en tout cas bien assez pour que décolle Cleva, assortie d'improvisations au clavier, à la basse électrique, du côté des choristes comme de la soliste. All right it's gonna be all right, tel est le mot d'ordre sur scène et dans la salle.

Et tous les corps ondulent sur Time's a Wastin, jusqu'à ce que l'impératrice mobilise ses troupes pour Soldier, coiffée d'un prêche sur la résistance et la solidarité des moins nantis à travers le monde.

La suivante est dédiée à Outkast, son «groupe préféré» dont elle reprend Liberation, entrecoupée d'un épisode de vigoureuse percussion.

La prestation d'Erykah Badu était en marche depuis plus de 90 minutes, c'était Window Seat, et ça allait culminer avec Bag Lady et ces milliers de bras qui balayaient les particules de l'atmosphère.

Après avoir reçu le prix Ella-Fitzgerald de la main d'Alain Simard, elle conclura sur des versions bien senties de Believe in Yourself et Tyrone.

À la cour de Son Altesse Erykah, tous les sujets respiraient le bonheur.