Elles se sont présentées sur la scène du TNM dans leurs robes ringardes dont Martha Wainwright nous a dit qu'elles étaient un cadeau de leur frère Rufus qui a toujours voulu saboter sa carrière. Le ton était donné: avec sa soeur Lucy Wainwright Roche, Martha pratiquerait l'autodérision et le gros clin d'oeil pendant un peu plus d'une heure.

Le prétexte de ce concert, qu'elles ont donné à Londres, à New York et au Centre Phi l'an dernier, est le premier album commun que les deux soeurs ont enregistré dans un petit chalet bâti par le grand-père de Martha, Frank McGarrigle, à Saint-Sauveur. Ces Songs in the Dark sont des comptines et des berceuses macabres, nous ont répété jusqu'à plus soif Martha et Lucy tout au long de leur récital dépouillé.

Ça a démarré du bon pied avec Our Mother the Mountain, la très belle chanson à saveur folk de Townes Van Zandt qui mettait en valeur les harmonies vocales de Martha et Lucy, un trait caractéristique du clan McGarrigle-Wainwright. Ces femmes-là ont la musique dans le sang, ça s'entend et ça se voit même à l'occasion dans la dégaine de Martha, la chanteuse passionnée qui joue ses chansons, ou chez sa soeur qui, malgré sa réserve que ne masque pas tout à fait son attitude pince-sans-rire, est tout aussi intense quand elle s'investit les yeux fermés dans une chanson avec sa voix de tête.

Martha et Lucy ont un talent naturel, mais, hier, elles donnaient vraiment l'impression de souffrir du syndrome de l'imposteur.

Comme si elles n'assumaient pas tout à fait cet album qui n'obtiendra jamais le succès monstre au sujet duquel elles blaguaient, mais qui n'en demeure pas moins un beau disque. Ça se sentait dans leurs échanges dignes d'un duo de stand-up qui devenaient redondants à la longue, dans cette façon qu'avait Martha de parler souvent à côté de son micro comme si ce qu'elle avait à dire n'était pas si important ou encore quand elles s'interrompaient au début d'une chanson parce qu'elles n'étaient pas dans la même tonalité. « Ça fait longtemps qu'on s'est vues... », a lancé Martha comme pour justifier le côté un peu brouillon de leur numéro.

Une fois lancées dans leurs chansons empruntées à papa, maman, tante Terre et Richard Thompson, elles étaient pourtant belles à entendre. Et on a pu apprécier leur sérieux quand chacune à tour de rôle nous a servi seule deux de ses chansons, celles de Martha devant paraître sur un nouvel album prévu à l'automne.

En début de programme, on a entendu Archer, un Australien intense qui donne l'impression d'avoir appris son métier en côtoyant les grands folk singers américains du milieu du XXe siècle tout en frayant avec les auteurs-compositeurs aborigènes de son pays. Sa voix imposante et son sens de l'humour un peu décalé nous ont donné le goût de le revoir.

Ce concert sera repris au TNM ce soir et demain, à 20h.