À son premier concert à Montréal, en 1985, François Bourassa a remporté le concours du Festival de jazz où il a joué chaque année depuis. La Presse a rencontré ce pianiste de renom à l'aube du concert marquant ses 30 ans de carrière.

Trente ans de jazz, c'est beaucoup de musique. Parlez-nous de votre parcours...

Enfant, j'ai étudié le piano classique, mais je n'ai pas touché au piano de 12 à 17 ans. J'ai joué de la guitare et j'ai écouté du rock progressif et du jazz fusion: Genesis, Emerson, Lake&Palmer. Je me suis remis au piano au collège Brébeuf. J'ai donné mon premier concert professionnel à Sorel en 1984; dans le temps, je faisais un bac en composition à McGill pendant que j'explorais le jazz en autodidacte. J'ai donné mon premier concert à Montréal en 1985, au Festival de jazz... et j'ai gagné le concours avec mon trio. L'un des prix était la production d'un disque et j'ai sorti mon premier album l'année suivante alors que j'avais commencé ma maîtrise en composition classique au New England Conservatory of Music, à Boston.

Comment voyez-vous l'évolution du jazz à Montréal depuis 30 ans?

C'est toujours difficile... Je ne sais pas s'il y a plus ou moins de clubs qu'à l'époque où on allait au Rising Sun. Chose certaine, il y a plus de joueurs et les programmes de formation sont beaucoup plus nombreux. Dans le temps, si tu voulais étudier en jazz, c'était McGill, point. Aujourd'hui, plusieurs cégeps (Saint-Laurent, entre autres) et universités (Concordia, Montréal) offrent des programmes de jazz. Le Festival, par ailleurs, est devenu une affaire énorme. Personnellement, je dois beaucoup à cette organisation: c'est là que tout a vraiment commencé pour moi. Et j'ai joué au festival chaque année depuis 1985...

Et votre évolution comme musicien au fil des ans?

Avec les années, les voyages et les concerts - j'ai joué beaucoup -, on prend de l'assurance dans la recherche d'un son, d'une personnalité, d'une identité propre, l'aspect le plus important du métier, à mon avis. Moi, j'ai toujours cherché à marier les différents aspects - harmoniques, rythmiques, etc. - de la tradition et de l'avant-garde. Je suis passé de Chick Corea et Return to Forever à Bill Evans, Miles et Coltrane, puis à Bud Powell. J'ai écouté Paul Bley et Earth Wind&Fire que je regrette d'avoir manqué lundi. Je me suis nourri de toutes les musiques, finalement, pour essayer de produire du matériel original.

Être le fils de Robert Bourassa a-t-il eu un effet sur votre carrière?

Oui, trop de pub, au début. J'avais trop d'entrevues, trop de critiques. J'étais jeune et c'était difficile, par moments, d'être «le fils de Boubou» qui jouait du jazz. Mais je suppose que ça faisait partie de la game: j'étais le fils du premier ministre... Mon père, par ailleurs, ne s'est jamais opposé à mon choix de faire de la musique. Même s'il m'avait fait inscrire à des cours de comptabilité et d'économie. Au cas où...

Que nous réserve le concert de ce soir à L'Astral?

Je serai avec les membres de mon quatuor: Guy Boisvert à la basse, Philippe Melanson à la batterie et André Leroux au saxophone. Et j'ai invité les musiciens avec qui j'ai collaboré au cours des 10 dernières années. Michel Donato qui joue avec moi dans le projet Bill Evans, tout comme Pierre Tanguay que j'ai invité avec Jean Derome, pour leur côté moderne. Il y aura aussi le percussionniste Aboulaye Koné qui joue du djembé, et ma blonde, Jeanne Rochette, pour quelques chansons. Une belle gang...

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François Bourassa et invités 30 ans de carrière, à L'Astral samedi soir, 21 h.