Après deux Métropolis en moins d'un an, précédé de deux spectacles au Corona et à Osheaga, Woodkid se produisait hier sous les étoiles pour le grand spectacle d'ouverture gratuit du Festival de jazz. Le pari : transporter son spectacle hautement visuel à l'extérieur avec une valeur orchestrale ajoutée. Un pari réussi au bout d'un puissant crescendo d'intensité.

Sous les souffles d'un trombone évoquant l'arrivée d'un navire, portée par une musique orchestrale annonçant l'avènement de quelque chose de grand, Woodkid s'est élancé au tambour. Il a chanté les paroles à fleur de peau de Baltimore's Fireflies, accompagné de 23 musiciens.

Son sourire radieux contrastait avec l'intensité dramatique de la chanson, mais voulait tout dire sur l'ampleur et l'enthousiasme des dizaines de milliers de yeux rivés sur lui. Des fidèles de Woodkid - reconnus pour leur ferveur et leur adoration - et des gens présents pour découvrir son univers unique, qui mêle musique pop, images, et arrangements orchestraux cinématographiques.

Woodkid a annoncé Where I Love, « une chanson qui parle de ma mère » interprétée de façon magnifique et mélancolique à la façon Antony Hegarty. Son interprétation de Boat Song : tout aussi prenante et puissante.

« J'ai quelque chose à vous dire : I Love You », a-t-il lancé à la foule - comme il le fait habituellement- avant d'offrir une version sentie de sa chanson aux percussions haletantes comme des battements de coeur.

De notre point de vue, les projections avaient moins d'impact qu'au Métroplis, même avec la puissance orchestrale de ses 23 musiciens. Ce n'était peut-être pas aussi spectaculaire sur la scène, mais avec la foule recueillie en silence devant lui, l'ensemble créait une immense bulle majestueuse, magnifiée par les cuivres, les cordes, les percussions et le piano des arrangements.

« Quel honneur d'avoir été invité ce soir », a dit Woodkid à la foule, estomaqué. On vous a préparé quelques surprises et des nouveaux titres », a-t-il annoncé.

« C'est intimidant », a laissé tomber Woodkid au premier tiers du spectacle.

Pour reprendre ses paroles, Woodkid semblait en effet intimidé et pas complètement en possession de ses moyens en début de parcours. Il a annoncé par erreur interpréter une chanson de son premier EP, Brooklyn. C'était plutôt le moment de dévoiler au public une nouvelle pièce.

À mi-parcours, l'intensité du spectacle a monté d'un cran quand les ombres de 10 personnes aux tambours sont apparues en contraste devant l'écran géant. Ce passage cérémonial et percussif du spectacle a saisi et secoué la foule qui a manifesté son appréciation avec de chauds applaudissements.

« Est-ce que vous en voulez encore ? » a crié Woodkid, avant de maintenir l'intensité avec son tube Iron. L'intimidation de la tête d'affiche de la soirée ? Complètement disparue. Il s'agitait sur scène tel un chef d'orchestre et il a fait sauter les milliers de spectateurs comme une tribu. La scène : à en avoir la chair de poule. Mémorable, peut-être même marquant dans l'histoire du Festival de jazz.

L'arrivée des 10 percussionnistes aux tambours a complètement changé la donne du spectacle, venant fouetter d'une fougue militaire et viscérale le public.

C'était un pari audacieux de la part du Festival de jazz d'ouvrir l'événement avec un spectacle orchestral aussi émotif et non une messe funk dansante, par exemple. Un pari réussi. Le pari extérieur de Woodkid aussi.

Comme le disait Beck la veille, la foule de Montréal est particulière. Une foule curieuse et intéressée prête à un peu d'audace. Hier, elle a fini par acclamer massivement Woodkid.

«Merci Montréal, a hurlé Woodkid avec émotion, en pleurs et sous le choc. Merci du fond du coeur...vraiment!»

«J'ai juste envie que ça dure...»

Photo Bernard Brault, La Presse

La place des Festivals était bondée.