Parmi toutes les chanteuses de jazz que les Montréalais cajolent, Holly Cole occupe une place à part. Retour sur une vieille histoire d'amour...

«Quand le Festival de jazz était rue Saint-Denis, mon amoureux de l'époque était un musicien montréalais et il habitait juste au coin, rue Ontario: on baignait dans la musique. J'aimais tout de la ville dans le temps et j'aime encore tout aujourd'hui... même si j'ai changé de boyfriend depuis.»

Holly Cole a la voix rauque quand La Presse la joint à sa résidence torontoise. «Vilaine allergie», nous dit la chanteuse qui aura sûrement retrouvé ses moyens quand elle prendra l'affiche du TNM jeudi, en préouverture du Festival de jazz de Montréal qui la reçoit pour une 12e fois en 34 ans d'existence. Et une cinquième fois pour plus d'un soir. Peu de chanteuses ou de musiciens peuvent en dire autant: quatre soirs au Cabaret du Festival, au Club Soda de l'avenue du Parc en 1991 et deux soirs à Maisonneuve deux ans plus tard; cinq soirs au TNM en 2003 et encore quatre au même endroit en 2007. «J'aime ce théâtre où je me sens parfaitement à l'aise. C'est un sentiment merveilleux pour une artiste comme moi qui ne vit que pour la scène et la communication directe qu'elle permet avec le public.»

La fille de Halifax, en fait, vient terminer à Montréal la portion québécoise de sa tournée Night qui l'avait menée en octobre de Sherbrooke à Shawinigan via Joliette et L'Assomption. Au menu toujours éclectique de Ms. Cole, des chansons de tous les genres et de toutes les époques qu'elle s'approprie sans à-coups avec sa voix à gros grain, grâce à son talent et à son audace, bien sûr, mais aussi grâce à l'art consommé des musiciens qui l'entourent, dont le pianiste Aaron Davis, comparse des débuts qu'elle retrouve avec l'autre membre du trio original, le contrebassiste David Piltch. Holly Cole parle de connivence, de confiance, de plaisir partagé.

Et, nuitamment, nous irons de You Only Live Twice, qu'avait chantée Nancy Sinatra pour le James Bond du même titre en 1967, à la sautillante Viva Las Vegas, autre inoubliable chanson-titre de film, par Elvis Presley celle-là. De Good Time Charlie's Got the Blues, de Danny O'Keefe (1967), à If You Go Away, version de Ne me quitte pas de Jacques Brel, très populaire chez les chanteuses anglophones. Et encore: If You Could Read My Mind, grande ballade du Canadien Gordon Lightfoot, et Whistlin' Past the Graveyard de Tom Waits à qui Mme Cole a déjà consacré un disque complet (Temptation, 1995).

«Je n'ai jamais rencontré Tom Waits, nous dira-t-elle, mais je lui ai parlé. Jamais des chansons que je fais de lui: je n'ai jamais demandé ou attendu son assentiment. Je m'en tiens à mon style et c'est tout.»

Dans les nombreux remerciements du CD - Holl Cole ferait belle figure à l'ADISQ -, les proches de la star (hollycole.com), des collaborateurs du Japon où elle a beaucoup de fans et «Andre Menard», cofondateur et directeur artistique du FIJM. «André Ménard m'a donné ma première chance de me faire valoir, se rappelle Holly Cole. Je lui avais envoyé une cassette et il m'avait programmée sur une grande scène extérieure avec mon quintette, en 1987. Après, il m'a toujours suivie et encouragée. André est un homme fidèle...»

Jeudi, avant le premier de ses trois récitals au TNM, André Ménard ira remettre à Holly Cole le prix Ella-Fitzgerald par lequel le Festival honore un chanteur ou une chanteuse - Aretha Franklin, Diana Krall, Liza Minelli, Etta James, Dee Dee Bridgewater - pour son influence sur la scène internationale. Dans le cas de Holly Cole, la dimension internationale se réduit au Japon où, comme ici, on apprécie ses talents d'interprète et son audace dans le choix des pièces. «Le jazz est dans toutes les musiques, lance la lauréate. Il s'agit de le trouver.»

Holly Cole au TNM, jeudi, vendredi et samedi, 20 h.