Rien que cette année, Nikki Yanofsky a chanté en duo avec Stevie Wonder et Quincy Jones l'a prise sous son aile. À 19 ans, l'enfant prodige montréalaise est désormais une artiste à part entière.

Au téléphone, elle ponctue encore ses réponses de petits éclats de rire et son propos n'a rien perdu de sa fraîcheur et de sa spontanéité. Mais Nikki Yanofsky n'est plus la fillette de 13 ans rencontrée à la maison familiale en prévision de ses concerts au Festival de jazz de 2007. Elle a 19 ans, deux albums à son crédit, et un troisième à venir d'ici peu qui pourrait la propulser véritablement dans les ligues majeures.

Remarquez, Nikki se débrouille quand même pas si mal pour une fille de son âge. Invitée fréquente du Festival de jazz, elle a chanté en Europe et aux États-Unis ainsi qu'à la cérémonie des Jeux olympiques de Vancouver. On ne compte plus ses collaborations avec des artistes importants, dont Wyclef Jean, et elle a travaillé avec des réalisateurs réputés, dont le regretté Phil Ramone et Tommy LiPuma qui sera honoré par le Festival de jazz dans quelques jours.

Pourtant, ce n'est probablement rien en comparaison de ce qui attend la jeune femme. Au début de l'année, le grand Quincy Jones l'a prise sous son aile et elle est désormais représentée par Quincy Jones Productions de par le monde. Monsieur Jones, qui a réalisé des albums d'Ella Fitzgerald et de Frank Sinatra aussi bien que le Thriller de Michael Jackson, est le producteur délégué du prochain album de Nikki, Little Secret, qui devrait paraître à l'automne. «Il est très impliqué: il peut suggérer à tout moment de changer une ligne ou de modifier un arrangement», explique Nikki.

C'est également Quincy Jones qui lui a ouvert les portes du prestigieux Berklee College of Music de Boston où Nikki a recruté récemment les cinq jeunes cracks de son nouveau groupe.

«Quincy est mon mentor, lance Nikki. J'avais 15 ans la première fois que je l'ai rencontré. Une connaissance commune lui avait dit: «Il faut que t'entendes cette fille, elle a du talent et elle chante du jazz.» On doit lui dire ça tout le temps... Mais comme je chantais Ella Fitzgerald et qu'il a été le réalisateur et l'orchestrateur d'Ella, il a accepté de me voir. Je suis donc allée chez lui, j'ai chanté Over the Rainbow et Lullaby of Birdland. J'étais tellement nerveuse, mais il a été très cool. C'est drôle parce qu'on ne s'est pas revus pendant presque un an avant de se croiser dans un festival de jazz en Europe. Je suis désormais l'un de ses petits projets.»

Un public de son âge

Quincy Jones n'ouvre pas uniquement les portes de Berklee College. Au Festival de jazz de Montréal comme partout ailleurs dans la tournée de la jeune Montréalaise, on peut lire Quincy Jones présente Nikki Yanofsky. «Dans les festivals de jazz, il y a beaucoup de gens qui ne me connaissent peut-être pas, mais ils savent certainement qui est Quincy Jones», dit Nikki.

Quincy Jones a 80 ans bien sonnés et Nikki a réalisé un rêve en chantant pour son anniversaire avec Stevie Wonder au début de l'année. Mais il incarne mieux que quiconque l'ouverture d'esprit que recherche la chanteuse de 19 ans.

«Avec cette tournée, mon objectif est de rejoindre des gens de mon âge pour apporter le jazz à ma génération. Je transpose des mélodies de jazz dans une forme pop, je les déguise pour que les gens ne sachent pas vraiment ce qu'ils écoutent, ce sont surtout des chansons le fun. Comme me le répète toujours Quincy: la bonne musique est de la bonne musique. Qui de mieux pour faire ça que le roi de ces deux univers, qui a travaillé avec Michael Jackson, Ella et Sinatra?»

Dans ce nouveau spectacle, Nikki donnera un aperçu de son album à venir en proposant des chansons de son cru, mais aussi l'une des trois reprises de l'album, People Are Strange des Doors, devenue une ballade orchestrale. «Elle est complètement différente, dit Nikki. Ça va être super de voir la réaction des gens avant même la sortie de l'album.»

Pot-pourri

Elle me parle également d'un pot-pourri de quatre chansons pop qui trônaient récemment dans les palmarès et qu'elle n'aurait jamais osé reprendre si ses jeunes musiciens ne l'avaient pas encouragée.

«Il y a tellement de chansons d'aujourd'hui que je ne chanterais jamais parce qu'elles ne correspondent pas à mon style, des chansons qui tournent à la radio et au son desquelles j'aime danser. Mon directeur musical, Will [Wells] a suggéré de se les approprier en les transformant et d'en faire un pot-pourri. Parmi celles-ci, il y a Sexy and I Know It de LMFAO dont on fait un genre de blues, et Thrift Shop de Macklemore qui est un peu jazzée.»

Nikki pouffe de rire et se met à chanter dans le combiné: «I'm gonna pop some tags, only got twenty dollars in my pocket.» On ne devrait pas s'ennuyer avec elle au TNM.

Nikki Yanofsky, au TNM, les 4, 5 et 6 juillet.

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DE DONATO À NIKKI...

(Daniel Lemay)



En prévision du 34e Festival international de jazz de Montréal, La Presse a réuni trois générations de Montréalais qui prendront l'affiche de l'une ou l'autre des salles à compter de jeudi. Et on a demandé à ces cracks quel était le meilleur spectacle auquel ils avaient assisté au fil des ans. Spectacle d'un autre artiste, s'entend...

Michel Donato 

Contrebasse

2 juillet, L'Astral

Avec son pote Pierre Tanguay à la batterie, le vétéran jouera ici du Bach jazzéifié... Donato explore toujours: «Il y a quelques années, au Gesù, j'ai vu le trompettiste polonais Tomasz Stanko avec un groupe de jeunes. Il y avait là un kid qui jouait de la basse électrique qu'il tenait à la hauteur des genoux, comme certains rockers dans le temps. Un show effrayant!»

Jacques Kuba Séguin 

Trompette

28 juin, L'Astral

La découverte jazz 2012 de Radio-Canada prépare une tournée an Europe avec Litania Projekt, un disque né de sa rencontre avec le contrebassiste Frédéric Alarie au plus récent Festival de Rimouski. Rencontre du jazz et du néo-classique comme dans son plus beau souvenir: «Le pianiste George Gruntz au Gesù, à la fin des années 90. Avec des orchestrations inhabituelles pour un big band. Pas de solos en rang d'oignons... Ça ressemblait à un concert classique.»

Alain Caron 

Basse

3 juillet, Gesù

L'ex-UZEB présente Multiple faces, son huitième disque qu'il espère voir trouver les bonnes oreilles. «On fait des disques pour communiquer ce qu'on a à dire...» Son meilleur souvenir? «J'ai eu la chance d'assister à un concert d'Oscar Peterson, assis à quelques pieds de lui sur la scène de Wilfrid-Pelletier avec une vingtaine d'autres spectateurs. C'était le concept: des gens sur la scène et dans la salle...»

Nikki Yanofsky 

Chanteuse



4-5-6 juillet, TNM

La nouvelle darling du Festival de jazz - et du R'n'B nord-américain - a lancé sa tournée Quincy Jones présente Nikki Yanofsky hier à Rochester. Beau souvenir... en perspective pour une princesse de 19 ans qui en a déjà beaucoup. Et au FIJM? «Moi, c'est Stevie Wonder à l'inauguration de la place des Festivals il y a quatre ans. Il pleuvait et les gens sont restés... Ce festival est merveilleux. Ma ville aussi.»

Benoît Charest 

Guitare

28 juin, Dièse Onze

4 juillet, Jean-Duceppe

Le guitariste ouvre le Festival en trio dans la rue Saint-Denis avant de livrer l'intégralité de la musique des Triplettes de Belleville en synchronie pendant la projection du film: beau projet. Un beau souvenir: «John Scofield avec Miles Davis au St-Denis en 1985. C'était la tournée You're Under Arrest et Miles s'était conduit comme un véritable control freak

Chet Doxas 

Saxophone



30 juin, L'Astral

À L'Atral, et dans le concert des Triplettes avec Charest, et dans celui des frères Brubeck en hommage à leur père disparu. Et il visitera sûrement son frère Jim aux jam sessions du Hyatt... Saxo souvenir, Chester? «Wayne Shorter Quartet en 2006 avec Brian Blade, John Patitucci et Danilo Perez. J'avais fait la première partie avec mon quartet et j'ai écouté le concert de Wayne des coulisses. Wow!»

Christine Jensen 

Saxophone

1er juillet l'Astral

La saxophoniste et chef d'orchestre sera aussi du premier concert de l'Orchestre national de jazz de Montréal,

le 6 juillet. «Mon meilleur souvenir, c'est Shirley Horn avec le Quartet West de Charlie Haden et un ensemble à cordes, il y a une douzaine d'années. Quel talent, cette chanteuse! Et cette force dans la livraison des chansons au rythme lent. Ç'a été son dernier spectacle à Montréal...»