George Benson est un homme aux multiples talents. L'ennui, c'est qu'on ne sait jamais lesquels il va exploiter quand on achète un billet pour son spectacle: aura-t-on droit au guitariste inspiré, digne héritier de Wes Montgomery, ou au crooner qui boude sa guitare et chante une enfilade de clichés au-dessus d'une mélasse de claviers.

Hier, George Benson était dans une de ses très bonnes soirées. Prêt à satisfaire tous ses fans, qu'ils préfèrent le chanteur à la voix soyeuse, le guitariste imaginatif, l'artiste rhythm and blues qui scatte en duo avec sa guitare ou le sympathique bonhomme qui sait mettre son public à l'aise.

 

C'est justement ce qu'il a voulu faire en jouant l'instrumentale Breezin' dès son arrivée sur scène: rassurer son public habituel qui aurait pu craindre en apercevant un orchestre d'une trentaine de musiciens que ce concert consacré à Nat King Cole évacuerait tous les succès de son favori. C'est sans doute ce qu'a voulu lui signifier un fan quand il a crié Give Me the Night après l'un des derniers emprunts à Cole, (I Love You) For Sentimental Reasons. Très habile, la vedette a récupéré cette demande précoce en disant qu'on en était presque rendu au «party Benson».

Disons-le tout de go, son hommage a Nat King Cole a été fait avec autant de goût que de classe. Benson a la voix qu'il faut pour faire honneur aux ballades classiques du répertoire du grand disparu, de Mona Lisa à Smile (de Charlie Chaplin) sans oublier Walking My Baby Back Home, Route 66, la country Ramblin' Rose et Nature Boy qu'il a présentées l'une après l'autre en nous expliquant ce qu'elles signifiaient pour lui. Il n'a presque pas touché à sa guitare, mais il n'avait pas à le faire tellement les cordes et son groupe de musiciens faisaient du beau travail.

Pas bête, Benson a choisi de rejouer Nature Boy à sa manière pour faire le pont entre le segment Nat King Cole et son propre répertoire. Après presque une heure de musique, on l'a enfin entendu scatter puis nous servir un solo de guitare qui annonçait de belles choses. Puis les cordes et les six choristes ont quitté la scène et Benson et son groupe se sont consacrés essentiellement à ses succès les plus entraînants comme Turn Your Love Around, Give Me the Night et, en rappel, On Broadway qui a tiré de son sommeil ma jeune voisine que ses parents avaient traînée à Wilfrid-Pelletier. Comme il avait presque atteint son quota de ballades avec les chansons de Nat King Cole, Benson n'en a presque plus joué sauf l'obligatoire The Masquerade dont il a à la blague dit qu'il ne s'en lasserait jamais parce qu'elle lui avait rapporté 20 millions de dollars.

À la fin, ce public très sage était debout et dansait encore quand George Benson a retraité vers sa loge au son d'une musique de Michael Jackson.