Si une dépression a inspiré le troisième album de Koriass, le résultat est tout sauf déprimant. Le rappeur reconnu pour sa plume et son flow a exorcisé ses démons pour en faire la source de son inspiration.

«Cet album n'a pas été facile. Mon équipe n'était pas certaine de la direction que je prenais et me disait: «Il y a de la pression, c'est ton troisième.»»

Inspiré par une dépression qui lui a fait perdre ses repères et qui l'a cloué sur le canapé de son appartement de la rue des Saules, Koriass a fait à sa tête. Pour son troisième album, il allait explorer les traces des démons de son passé et raconter comment il est parvenu à voir le bout du tunnel.

Koriass est l'un des rares rappeurs qui se sont infiltrés dans les réseaux plus traditionnels de l'industrie de la musique depuis quelques années. Il s'est produit en France ainsi qu'aux festivals Osheaga et South by Southwest. Il a remporté le Prix de la chanson de la SOCAN avec sa pièce St-Eustache, ainsi qu'une bourse de 25 000$ remise par la station de radio CKOI lors des FrancoFolies.

Tout cela est beau sur papier, mais on ne sait jamais quand un mal-être intérieur peut frapper... «Mon album Petites victoires était un album lumineux, alors mon équipe était frileuse à l'idée que je parle de dépression. Mais je leur ai dit: «Faites-moi confiance.»»

Le résultat: convaincant et loin d'être déprimant. Un puissant témoignage des vulnérabilités qui nous habitent et qui guettent notre bonheur. Au final, Koriass rend hommage à sa mère, à sa blonde et à sa fille.

Revivre le passé

Dans le premier extrait, MTL Nord, Koriass décrit une vie de «centres jeunesse» et sa mère «qui a brisé le cycle de la pauvreté héréditaire» en déménageant à Saint-Eustache. Dans un autre titre, Tsé veux dire, il raconte comment des mésaventures passées peuvent hanter un homme à jamais, que ce soit l'alcool au volant ou une rupture amoureuse.

«Il y a peu d'exagération et de fiction, mais tout ce que je dis est sincère et vrai. C'est un bel hommage à la famille. Je passe de la dépression à la rédemption à l'acceptation, explique-t-il. Il y a quelques chansons qui étaient difficiles à faire écouter à mes proches. Ma blonde, ma mère... Ma mère était un peu troublée... positivement.»

«Ma mère vient d'une famille alcoolique et sans éducation. Elle m'a eu à 18 ans, s'est fait abandonner par mon père qui est parti dans une secte, poursuit le jeune homme de 29 ans. J'ai toujours été sa priorité et c'est grâce à elle que j'ai grandi dans une vie heureuse.»

Les 14 pièces de Rue des Saules se succèdent presque sous la forme d'un récit. Dans la chanson Fleur sous la neige, Koriass se désole d'avoir négligé sa blonde. En parlant au «je» et au présent, le texte frappe fort. J'ai des images de mes deux mains sur des seins, mais j'oublie qu'il y a un coeur en dessous, se désole-t-il.

Koriass réfléchit également à voix haute sur la drogue, le rêve américain, la société des loisirs et sur le mariage -réussi, mais dangereux - entre le rhum et les calmants. S'il a toujours fait du rap introspectif, il n'est jamais allé aussi loin. «Il y a beaucoup d'orgueil dans le rap. Peu de rappeurs l'utilisent pour se confesser de façon thérapeutique, dit-il. Je suis sorti de ma dépression vraiment inspiré et ça m'a permis d'exorciser des trucs qui n'étaient pas guéris.»

Dans la pièce Long Time No See, Koriass retrouve son équilibre en parlant à un ami.

J'ai enfin fini d'avoir les blues/Mes démons voulaient me voir à genoux, mais là je suis debout [...]/Ma meilleure amie c'est ma blonde.

Malgré ses remises en question et sa période de grande vulnérabilité, Koriass n'a rien perdu de sa bravade et de son redoutable sens du punch. Surprise: la pièce Supernova est un échantillonnage du succès Les étoiles filantes des Cowboys Fringants. «J'ai fait un album qui me plaît. Je l'écoute de A à Z et je l'aime, dit Koriass. Je n'ai pas refait certaines erreurs, dont trop de featuring et de collaborations.»

Ceci explique cela, puisqu'une grande cohésion sonore enveloppe les pièces de Rue des Saules. Un aplomb mélodique tonifie des arrangements pop, folk, soul, R&B et électro à l'atmosphère nocturne. «Je voulais miser sur les mélodies. J'aime la musique d'émotion. Il faut que ce soit cru et senti. Le son est pop. Je l'ai beaucoup travaillé avec mon beat-maker et arrangeur Rough Sound.»

En spectacle au Club Soda

Ce soir, Koriass est en spectacle au Club Soda dans le cadre de Coup de coeur, avec le trio Loud Lary Ajust en première partie. Il se produira aux côtés de son groupe, et le public pourra voir le travail de l'éclairagiste Félix Desrochers. «L'éclairage vient ajouter à l'ambiance nocturne de l'album», souligne Koriass.

RAP :

KORIASS

Rue Des Saules

7e Ciel

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