Danses nocturnes, l'un des spectacles phares du 20e Festival international de la littérature qui rend hommage à la poésie de Sylvia Plath, conçu par la violoncelliste Sonia Wieder-Atherton et interprété par Charlotte Rampling, a connu lors de sa première quelques difficultés qui rendent cette critique difficile à écrire.

C'est que, dans ce spectacle qui dure à peine une heure, l'ouverture promettait d'être puissante avec le poème Lady Lazarus. Or, dès le départ, Mme Rampling a connu un trou de mémoire. Un vrai. Ce satané trou de mémoire qui terrorise tous les comédiens. La dame a dû s'excuser et n'a pas eu d'autre choix que d'aller chercher les textes sur papier et de recommencer du début. Comme si ce n'était pas assez, la comédienne a dû subir ensuite des problèmes de micro qui ont forcé un technicien à monter sur scène pour corriger la situation. Et, encore une fois, il a fallu reprendre un poème.

Ce sont des choses qui arrivent, mais difficile de vivre pire début de spectacle. On comprend tout à fait que Charlotte Rampling ait été déstabilisée pour la suite - la salle, compréhensive, a applaudi son courage dans la tourmente. Mais, c'est triste à écrire, le charme était rompu.

Car l'une des particularités de Danses nocturnes est de proposer sur écran noir, derrière les interprètes, une traduction des poèmes récités en anglais par Charlotte Rampling. Sauf qu'avec ces ratés, bien souvent, la traduction ne concordait pas avec la lecture, ce qui n'a fait qu'ajouter à la diversion pour les spectateurs, déjà eux-mêmes déstabilisés. Pour tout dire, nous étions stressés pour les deux artistes.

Mais Charlotte Rampling et Sonia Wieder-Atherton n'ont pas baissé les bras. Elles ont poursuivi malgré tout, et nous avons quand même pu comprendre l'essence de Danses nocturnes, très musicale. La musique des mots de Sylvia Plath, bien sûr - et n'eut été de tous ces problèmes, on constate que Charlotte Rampling a certainement la voix pour les dire. Mais aussi la musique de Benjamin Britten, superbement jouée par Sonia Wieder-Atherton, qui a eu la belle idée de l'unir à l'écriture de Plath. Danses nocturnes tient autant du récital que de la lecture, les pièces de Britten prenant presque plus de place que les textes. Et ces textes, puisqu'ils sont lus dans leur version originale anglaise, résonneront beaucoup plus chez les spectateurs qui comprennent la langue de Shakespeare, même si l'exercice n'est pas inintéressant pour les spectateurs francophones curieux.

La sélection des extraits, qu'on imagine très personnelle, donne un aperçu de la force poétique de Plath, mais ses fidèles lecteurs pourraient rester sur leur faim. Outre Lady Lazarus, ils entendront The Night Dances - qui donne son nom au spectacle - Edge, Ariel, Letter in November... en tout, onze courtes lectures dans une atmosphère de recueillement - quand tout va bien. On souhaite sincèrement que Charlotte Rampling et Sonia Wieder-Atherton aient pu surmonter cette première plutôt catastrophique, afin d'offrir la pleine mesure de leurs talents pour les deux dernières représentations.

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Danses nocturnes, avec Charlotte Rampling et Sonia Wieder-Atherton, samedi soir 20 h, et dimanche, 14 h, à la Cinquième Salle de la Place des Arts.