Les 24es Nuits d'Afrique se sont conclues dimanche au Métropolis avec le spectacle de Kassav, superformation de Martinique/Guadeloupe. Deux jours avant de rendre public leur bilan officiel, les organisateurs du festival estimaient déjà que les concerts payants ont rempli leurs salles à 80% de leur capacité.

Place Émilie-Gamelin, on affirme un retour en force de l'achalandage aux concerts gratuits (et autres activités), le plus considérable des «quatre ou cinq dernières années». Pour la journée entière de samedi, 32 000 personnes ont investi le Village des Nuits d'Afrique, comparativement à 22 000 pour la même journée en 2009. Sans dévoiler de résultats précis, on annonce des ventes records de produits dérivés. Par ailleurs, le site internet des Nuits d'Afrique a été fréquenté par 62 000 visiteurs uniques, soit une augmentation de 40% par rapport à l'an dernier.

Les meilleurs moments

Présentée au National, la Berbère Marocaine Hindi Zahra a laissé la plus forte impression. Mélange actualisé de rock, folk, groove sud-marocain et blues saharien, l'angle musical choisi par la chanteuse a carrément fait boum. Déjà connue des amateurs de nouvelle musique populaire africaine, l'Ivoirienne Dobet Gnaoré a fait croître son pouvoir d'attraction, menant à croire qu'elle est en train de devenir une des grandes chanteuses du continent noir.

Pour sa finesse, pour son infusion de racines ougandaises, pour ses adaptations acoustiques de références jazzy-funk, le multiinstrumentiste et chanteur ougandais Kinobe a aussi séduit les connaisseurs. Pour sa grande voix, pour son jeu intense à la guitare, pour son coeur et ses bras ouverts, la Française Marianne Aya Omac a aussi conquis les fans venus à sa découverte au Balattou. Vétéran de haute volée, artiste raffiné et très ouvert d'esprit, le chanteur Sénégalais Omar Pene a aussi touché le coeur des férus de chanson ouest-africaine.

Les révélations

En ce qui me concerne, la révélation des 24es Nuits d'Afrique se nomme Mallu Magalhaes. S'exprimant en anglais comme en portugais brésilien, cette Paulista de 17 ans a su s'imposer seule sur scène. Voix unique, références très variées pour une artiste de cet âge, très fortes influences country-folk (surtout Bob Dylan et Johnny Cash), influences brésiliennes de plus en plus fortes. Et on n'a encore rien vu, rien entendu ! Par ailleurs, moult festivaliers retiennent le Montréalais d'origine haïtienne Wesli, qui a embrasé le Lambi le week-end dernier - que j'ai malheureusement loupé et que je compte bien voir sur une scène d'ici dans un avenir proche.

Les «pas pires» moments

Sans s'imposer parmi les grandes formations reggae d'Afrique, les Refugee All Stars de Sierra Leone ont créé au Cabaret du Mile-End l'événement festif auquel on était en droit de s'attendre. Groupe sympathique et fervent, très aimé du public venu à sa rencontre au Cabaret du Mile-End. Révélation radio-canadienne pour 2009-2010, la formation montréalaise Bambara Trans nous a donné une petite idée de son potentiel sur la grande scène au Village des Nuits d'Afrique. Au confluent de la musique populaire urbaine d'Afrique du Sud et du son Motown des grandes années, la chanteuse sud-africaine Nomfusi et les Lucky Charms ont également charmé le public du Balattou et du Village.

Les moins bons moments

La déception en salle a été le chanteur ivoirien Ismaël Agana, fils d'Alpha Blondy qui fait dans le roots reggae comme le paternel. Enfin, je parle de la première moitié de son spectacle au Cabaret du Mile-End, lymphatique et peu imaginatif. Déceptions un peu moins grandes, les concerts du groupe congolais Konono # 1 et Sarazino (Algérie, Équateur et Côte-d'Ivoire), présentés tous deux il y a deux vendredis dans des salles clairsemées, ont été peu convaincants.

En résumé

Après un déclin prolongé de leur direction artistique, les Nuits d'Afrique renouent avec l'audace et la créativité depuis une couple d'années. Trop timidement? Il faudra faire encore davantage l'an prochain, surtout pour le 25e. Pour se démarquer clairement comme LA grande manifestation estivale des musiques métisses à Montréal, les Nuits d'Afrique auront besoin d'encore plus de diversité, plus de musiques destinées aux publics jeunes, plus de nouvelles tendances afin d'étoffer cette approche classique qui a ses fans fidèles.