Un bon spectacle, c'est parfois tout ce que ça prend dans la vie pour être heureux. On savoure le moment. Le temps s'arrête. Tout le reste est secondaire.

La présence de Violent Femmes et Postal Service alimentait une bonne part de notre intérêt à être au festival Coachella ce weekend. Deux groupes jamais vus en spectacle, mais dont les albums ont accompagné les aléas de notre vie pendant des années.

Maintenant, c'est chose faite. Et dans les deux cas, c'était du pur bonheur.

«Nous sommes un groupe imaginaire appelé Postal Service», a lancé à la foule le chanteur Ben Gibbard.

Postal Service n'est pas un groupe, mais plutôt le projet éphémère et épistolaire de Ben Gibbard (Death Cab For Cutie) et Jimmy Tamborello (Dntel et Figurine). Né de la correspondance musicale entre les deux musiciens aguerris, le disque Give Up est paru chez l'étiquette Sub Pop, en 2003.

Pour le dixième anniversaire de l'unique album de Postal Service, Gibbard et Tamborello ont décidé de faire quelques spectacles cet été. À voir l'intérêt de la foule et l'enthousiasme du duo sur scène, peut-être décideront-ils de prolonger l'aventure.

À l'image de Give Up, la magnifique pièce The District Sleeps Alone Tonight a mis le spectacle sur les rails. Avec sa gestuelle scénique si typique, Gibbard pivotait frénétiquement d'un pied à l'autre, les yeux fermés, comme si sa vie en dépendait.

Tamborello était en charge de la programmation derrière son ordinateur. Gibbard et lui étaient accompagnés de deux belles choristes et musiciennes, dont leur amie Jenny Lewis (Rilo Kiley), qui chantait sur l'album original.

Gibbard passait de la guitare, aux claviers et à la batterie d'un titre à l'autre. Une force organique venait embellir les effets électroniques des pièces.

À la fin du spectacle, les spectateurs sautillaient en entonnant tous en coeur les paroles de Such Great Heights avant que Postal Service les laisse avec Brand New Colony.

La foule était aux anges, savourant ce spectacle à la tenue improbable il y a quelques mois à peine. Pour beaucoup, Give Up est un album classique de la décennie 2000. Et son interprétation live le confirme encore davantage.

Violent Femmes au coucher du soleil

Le spectacle de Postal Service était prenant et planant. Plus tôt à l'heure de l'apéro, celui de Violent Femmes donnait plutôt un puissant effet «feel good» aux spectateurs, comme le disent les Américains.

C'est d'abord un choc de voir Gordon Gano, Brian Ritchie et Victor DeLorenzo nous balancer leurs chansons folk-punk de jeunesse tordue avec leur look de «pappys hippies». C'est un dur rappel que plus de 30 ans ont passé depuis leur album éponyme sorti en 1983.

Avec sa chemise ouverte sur une camisole blanche qui laisse paraître le poids de son âge, Gordon Gano parle d'emprunter la voiture de ses parents pour coucher avec une fille. Et vous savez quoi? On embarque totalement.

Avec le soleil qui se couchait sur les palmiers, Violent Femmes a accueilli la foule avec Blister In The Sun. Au grand bonheur de la foule, il allait a interprété l'intégral de son album éponyme.

«Nous n'avons pas joué depuis six ans. C'est une journée parfaite, a dit Gano. Et c'est la première fois que l'on joue les chansons de notre album dans l'ordre.»

Trente ans plus tard, le son folk-punk typique de Violent Femmes repose toujours sur un mélange unique d'ingrédients simples: la basse acoustique de Brian Ritchie, la batterie effleurée aux balais par Victor DeLorenzo, les rythmiques des chansons à la fois pop et inattendues, les arrangements de xylophone, et la voix baveuse de Gano.

Les retours insoupçonnés de Violent Femmes et Postal Service: voilà deux bons coups réussis du festival Coachella cette année.

En attendant New Order

Notre journée avait commencé sous la tente fermée baptisée Yuma avec un DJ set de The 2 Bears, formé de Joe Goddard (Hot Chip) et Raf Rundell. On aurait préféré savourer les excellentes chansons de duo au lieu de les entendre mixer. Mais c'était très divertissant de danser parmi les nombreux spectateurs incarnant le nom des deux DJs.

La chaleur était écrasante, samedi. Vivement les énormes tentes qui abritent les deux scènes secondaires.

À 17 h, Bat For Lashes se produisait devant une foule dense avec sa pop de création étoffée, qui revisite l'époque de Kate Bush avec une touche contemporaine électro.

En spectacle, Bat For Lashes se résume essentiellement aux charme et magnétisme de sa chanteuse Natasha Khan, née d'un père pakistanais et de mère anglaise. Quelle belle sorcière qui envoûte la foule avec son chant et ses mouvements de danse hypnotisants de séduction. Contrairement à Grimes, par exemple, sa voix est au front de la musique.

Et le spectacle d'Hot Chip en un mot? Excellent.

Au moment d'écrire ces lignes, la soirée se fait tard. Au grand malheur de beaucoup de festivaliers, Phoenix, New Order et Knife Party se produisent en même temps, juste avant Sigur Rós.

Un autre beau problème de Coachella.