Contrairement à Montréal, Saint-Tite n'a pas 40 festivals. Le village de la Mauricie en a un, un beau, un gros, qui ne s'affuble pas du qualificatif «international» parce qu'une partie de ses vedettes et visiteurs vient d'outre-frontière. Où, par ailleurs, sa réputation n'a cessé de grandir depuis que le bottier Boulet, fort en marketing, a organisé le premier en 1967; l'année de l'Expo, 6000 personnes avaient assisté aux compétitions de rodéo au stade de baseball de l'endroit.

Hier, sous un magnifique soleil de septembre, le Festival Western de Saint-Tite (FWST) a clos le premier week-end de sa 44e présentation alors que plus de 100 000 personnes ont assisté à la traditionnelle parade, «le plus grand défilé de voitures hippomobiles du Canada». Ici un «huit» de Clydesdales , là, une «team» de Percherons, une des races favorites de nos grands-pères. Entre ces attelages impeccablement harnachés, plus de 200 cavaliers de plusieurs régions du Québec montant des Quarter-horses, Haflingers, Canadiens ou Palominos.

Dans son premier siècle d'inutilité économique, le cheval n'en a pas moins gardé un immense pouvoir d'attraction, par sa beauté, sa force, par cette âme que l'homme cherchera toujours à cerner. Mais «le Western» - les Saint-Titiens prononcent rarement le mot «festival»: ils vont «au Western» -, c'est beaucoup plus que les chevaux. «Notre événement est fait de quatre composantes: le rodéo, les spectacles, la danse et le monde», nous explique Pascal Lafrenière, un ancien de Desjardins devenu directeur général de ce grand festival qu'il veut «professionnel, sécuritaire et plaisant». Et qui l'est!

«Professionnel», le FWST l'est d'abord dans les (huit) compétitions de rodéo de taureaux, du bullriding de top niveau présenté à guichet fermé (7500 spectateurs) aux Grandes Estrades, construites à cette fin en 1972. La partie danse consiste par ailleurs en des soirées de danse en ligne que cowboys et cowgirls exécutent avec une apparente nonchalance, les pouces accrochés à la ceinture. Samedi après-midi, plus de 300 personnes ont payé 12$ pour assister à un stage de perfectionnement, workshop donné par des professionnels de la danse country où, en cas de blanc chorégraphique, il est toujours possible de suivre les pas de la voisine.

Belle programmation country

En musique, le «Western» préfère le country... au western, un genre qui, au Québec surtout, occupe le bas de la gamme musicale «des chansons de cowboy». Jeudi aux (trop) Grandes Estrades, le FWST s'est ouvert avec le duo américain Big and Rich (Fake I.D.) et la chanteuse Gretchen Wilson, un trio qui, a-t-on lu, semble préférer le rock au country. La Québécoise Andrée Watters a chanté en première partie, elle qui profitait du festival pour lancer samedi un CD intitulé justement Country Rock.

Vendredi, ARTV a enregistré l'émission Pour l'amour du country à l'aréna de Saint-Tite, temporairement rebaptisé Country Club Desjardins (500 spectateurs), avec Renée, Martel, Georges Hamel, Laurence Jalbert et Édith Butler.

Le lendemain, Rock Voisine n'a pas changé une note du programme de son spectacle Americana qu'il a présenté au Centre Bell à la fin du printemps; belle soirée encore avec le fils du Témiscouata, aussi à l'aise avec Willie Nelson qu'avec Willie Lamothe.

Demain, Saint-Tite reçoit les Country Girls - Sylvie Moreau et Sandra Dumaresq - qui conjuguent comédie et chanson country. Le fait saillant musical du festival semble toutefois programmé pour jeudi alors que Shawn Barker présentera The Man in Black, un hommage à Johnny Cash qui a fait les belles heures du Capitole de Québec.

Le festival se terminera samedi avec le retour à Saint-Tite de Georges Hamel, «gentlemen de la musique country» qui va chercher ses Félix au gala de l'ADISQ dans l'indifférence totale des gens de l'industrie qui n'embrassent pas la définition du country de Kid Rock: «trois accords et la vérité», comme on peut l'entendre dans la rue... ou au Poulailler country Loto-Québec.

Indispensable chapeau

La grande scène du Festival Western de Saint-Tite, toutefois, reste les rues de ce village de 3500 habitants où déambulent, tranquillement, bière à la main, plus de 600 000 visiteurs chaque année. Ils n'ont pas de cheval, mais ils arborent l'attribut principal du cowboy: le chapeau, qui est en vente partout. Pendant son Festival, Saint-Tite se transforme en un immense souk. On y trouve dans les centaines d'étals, aussi bien des vêtements et bijoux de qualité que des boxers vendus par paquet de 8 pour 20$.

Ce mercantilisme est cependant parfaitement assumé, tant par les visiteurs que par les Saint-Titiens qui profitent économiquement de leur festival en louant des espaces où parquent roulottes et véhicules récréatifs, par ailleurs vendus par centaines dans un champ à l'extrémité du village. Certains parlent du «festival de la roulotte « dont le nombre - 10 000! - dépasse largement celui des chevaux (500).

Qu'à cela ne tienne! Le VR n'est pas plus obligatoire que le cheval au Festival western de Saint-Tite où un simple chapeau fait de vous un cowboy pour la vie.