Le gâteau aux fruits industriel. Le «Snuggie» à l'effigie de Justin Bieber. Le pyjama trois fois trop grand. Le moule à gâteau en forme de dinde. Certains maîtrisent l'art d'offrir des cadeaux. D'autres, moins. À l'heure du regifting, où tout peut se négocier sur eBay, Kijiji et compagnie, comment gérer avec doigté les offrandes décevantes du père Noël?

Après un sondage maison, une conclusion s'impose: les mauvais donneurs sont parmi nous. Et même si c'est l'intention qui compte, leurs récidives sont souvent d'intarissables sources de fou rire ou d'embarras mal dissimulé.

«La compagne de feu mon grand-père a offert à mon père, il y a bien des années, une brosse à cheveux vibrante à pile. Certaines soies cachaient des tiges solides qui vibraient pour, soi-disant, masser le cuir chevelu. C'était bruyant, en plus. Mon père était déstabilisé, comme je l'ai rarement vu», raconte l'une des répondantes à notre petite enquête.

Du grattoir pour les fenêtres d'auto offert à un petit-fils qui ne possède pas de voiture au réveille-matin avec un visage de monstre en passant par les incontournables anges en céramique, un mauvais cadeau est vite arrivé. Rares sont ceux qui n'ont jamais été les innocentes victimes d'un errement momentané plein de bonnes intentions, telle une fleur en plastique qui vibre quand le soleil l'éclaire.

Pour récupérer de façon humoristique les bloopers de Noël, les soeurs Jillian et Michelle Madison ont créé le site WhyDidYouBuyMeThat.com, qui est une galerie de regrettables présents. Des chandails affreux, des shorts d'enfant à la MC Hammer, une couverture à l'effigie de *NSYNC reçue cinq ans après la rupture du groupe (par une jeune fille n'ayant jamais été fan), un panier avec des chats en peluche aux yeux fous... Ce site est un impitoyable cimetière virtuel des pires objets trouvés sous le sapin. Avec mises en contexte à l'appui.

«Ce n'est pas que je suis ingrate. C'est juste que ton cadeau était vraiment, vraiment nul» est la devise du site.

Passer (ou pas) au suivant

Spécialiste de l'étiquette, Julie Blais-Comeau est catégorique: afficher sur le web une photo d'un cadeau décevant est d'aussi mauvais goût que d'offrir un plant de poinsettias en plastique doré.

«Ce serait commettre une gaffe de tweeter ou d'afficher sur Facebook un cadeau qu'on a reçu. Parce qu'on transgresserait la première grande directive de l'étiquette, qui est de ne pas blesser quelqu'un», énonce Mme Blais-Comeau, qui ne s'oppose pas à l'idée de donner le cadeau décevant à quelqu'un d'autre. Mais à certaines conditions.

Elle suggère d'ailleurs de s'inspirer d'un célèbre épisode de Seinfeld, qui est à l'origine de l'expression regifting. Un grand principe est né, lors de cet épisode où Elaine découvre qu'une étiqueteuse qu'elle a offerte a été recyclée en cadeau: il est acceptable de passer au suivant, à condition que ce dernier soit dans un cercle amical très éloigné...

«On peut le faire en toute bonne conscience, avec des cadeaux d'hôtesse qui ont des dates de péremption, comme du chocolat ou une huile d'olive, par exemple», suggère Julie Blais-Comeau.

Signe d'un temps où on veut alléger la somme de nos possessions, les cartes-cadeaux sont de plus en plus populaires, sous les sapins. Le centre commercial préféré des acheteurs en ligne, le site Amazon, a annoncé récemment la création d'un outil de «conversion de cadeau». Avec ce service, les destinataires pourraient échanger le présent avant qu'il soit envoyé par la poste. Tout ça est bien pratique mais ne remplace pas la touchante paire de pantoufles en Phentex tricotée par tante Germaine.

«Au départ, il faut se rappeler que le dicton «c'est la pensée qui compte, plus que le cadeau» est toujours vrai. On ne va pas donner à quelqu'un d'autre un cadeau très personnalisé, ou qui a été fabriqué par la personne», poursuit Julie Blais-Comeau.

Alors, dites merci et souriez, en recevant ce Snuggie fabriqué à la main. Il pourrait être pratique pour regarder des reprises de Seinfeld.