On ne saurait imaginer timing plus adéquat, pour la parution de l'essai De quoi le Québec a-t-il besoin?, entretiens sous la direction de Jean Barbe, Marie-France Bazzo et Vincent Marissal. Polaroïd d'une société à la croisée des chemins, ces «fragments d'un dialogue essentiel» arrivent en librairie en même temps que le mouvement des Indignés gagne Montréal et pendant un automne de turbulence politique provinciale.

«Ce livre arrive alors qu'on est dans une espèce de ressac», concède Marie-France Bazzo qui, sur le plateau de Bazzo.TV ou dans le célèbre «Tempo» de l'émission, a interrogé les Christian Dufour, Evelyne de la Chenelière, Roy Dupuis et Dany Laferrière, en quête d'un remède tonique pour sortir le Québec de sa léthargie chronique.

Il en ressort un ouvrage où la sagesse d'un Roméo Dallaire avoisine la soif de compassion d'un Roy Dupuis, où la réflexion poétique d'une Evelyne de la Chenelière répond aux élans spirituels d'un Dany Laferrière et les intuitions d'une Lucie Pagé.

Un souffle d'espoir planerait-il, dans un climat pollué par tant de corruption et de collusion? «Je suis convaincue que oui, même si je suis à la fois pessimiste et persuadée qu'on s'en va vers un mur. Or, on a tout ce qu'il faut pour s'en sortir. Ça fait quand même 400 ans qu'on est là. On a réussi à garder notre langue, on est une culture unique, très vive, avec des institutions originales, une manière de faire tout à fait enviable. On a bien sûr des problèmes immenses mais aussi toutes les solutions», lance d'un seul souffle l'animatrice et productrice qui, aux côtés de ses collaborateurs Jean Barbe et Vincent Marissal (qui seront entourés de quelques interviewés du livre), dirigera une table ronde sur le sujet au Salon du livre.

Militants de gauche comme de droite, artistes, penseurs, politiciens, offrent ainsi leurs réflexions pour brasser le Québec, répondant à des questions comme «De quoi le Québec a-t-il besoin? De quoi faut-il se débarrasser pour aller de l'avant? Y a-t-il des signes avant-coureurs de changement?»

Et dans tous ces élans où le désabusement se retrouve au banc des accusés, l'indépendance brille par son absence. «C'est vraiment étonnant comment les choses ne s'articulent plus dans des axes fédéralistes-souverainistes», estime Marie-France Bazzo, qui voit dans les propos de ses interlocuteurs les signes de l'émergence d'un nouveau paradigme politique.

Est-ce d'un sauveur que le Québec a besoin? Pas vraiment, songe l'animatrice qui a remarqué que ce culte du leader charismatique à la René Lévesque, a peut-être fait son temps. «Quand on a commencé à poser la question à l'émission, il y a deux ans, une majorité de gens déclarait que le Québec s'en allait vers un mur et que c'était d'un messie qu'il avait besoin. Mais graduellement, cela a changé un peu. Les gens répondaient des choses comme «le Québec a besoin de faire attention à lui», «de se regarder un peu...»

«Le gravier avant de monter les fondations.» C'est ainsi que Marie-France Bazzo qualifie les mouvements populaires qui définissent le climat actuel. Un premier diagnostic, mais certainement pas la fin des débats.

Marie-France Bazzo animera la table ronde «De quoi le Québec a-t-il besoin?» samedi, 14 h 30, sur la Grande Place.