Professeur de philosophie grecque et mélomane, il a remporté en 2007 le Grand Prix de la Ville de Montréal pour Partita pour Glenn Gould, et le Prix du Gouverneur général 2011 pour Wanderer.

Q: À l'ère du vedettariat instantané, l'écrivain doit-il être médiatique pour être lu?

L'écrivain doit pouvoir compter sur une critique littéraire réfléchie, elle est en voie de disparition. Beaucoup d'écrivains se trouvent ainsi condamnés à n'être lus par personne, et ceux qui sont lus ne le sont pas toujours pour les bonnes raisons. Je pense que nous assisterons à une reconfiguration de la critique sur le web, où de nouvelles communautés de lecteurs partageront leurs lectures et leurs jugements. Le pouvoir médiatique n'est déjà plus le seul à faire exister un écrivain.

Q: Les écrivains ont-ils le choix de composer avec les médias sociaux - Facebook, Twitter, blogue et autres?

Il y a un risque permanent de malentendu. Ces réseaux peuvent contribuer à diffuser le travail des écrivains, ils peuvent même susciter l'écriture, mais ils peuvent également saturer la communication et diluer les oeuvres dans une immense rumeur où aucune écriture n'est reconnaissable. Les écrivains ont-ils besoin de cette diffusion pour exister? Ils ont surtout besoin de véritables lecteurs.

Q: Avez-vous l'impression que les médias mettent trop l'accent sur la personnalité de l'auteur et pas assez sur le livre?

Cet équilibre est toujours délicat et il dépend de chaque écrivain. Certains sont très détachés de leur oeuvre et protègent parfois ce qui ressemble à un anonymat. Pensons à Réjean Ducharme. Mais d'autres engagent toute leur vie dans leurs livres et tout peut contribuer à éclairer leur travail. Chacun demeure maître de son image et chacun peut y ajouter ce qu'il souhaite y faire voir. L'important me semble que les médias respectent la volonté de chacun.

Q: Quel rôle les salons du livre jouent-ils dans votre carrière?

Je n'ai pas de carrière d'écrivain, je suis un professeur de philosophie grecque qui a eu le bonheur de voir deux essais sur la musique toucher un public. Lors de ces salons, j'ai été très surpris par la possibilité d'un échange direct avec des inconnus, qui m'ont raconté leur histoire et qui m'ont dit le rôle de la musique dans leur vie. Leur dédicacer un livre a été pour moi comme écrire une lettre à un ami, même si je sais que je ne reverrai sans doute aucun d'entre eux.

Q: Pourquoi écrivez-vous?

Durant ma vie de professeur, j'ai fait un travail savant, réservé à des spécialistes. Quand j'ai senti que le verrou avait sauté et que le surmoi académique avait cessé de me paralyser, j'ai découvert le plaisir de m'engager dans une écriture sur les sujets qui n'avaient cessé de me nourrir, de me fasciner: la musique, la forme de la vie, le rôle de l'art dans la construction d'une existence signifiante.

Q: Avez-vous une anecdote de salon du livre à nous raconter?

Lors d'une séance de signature, je n'ai pas reconnu un homme de mon âge qui se faisait insistant. Je ne savais quoi lui dire, mais après un moment, il me donna un indice précieux, en nommant un professeur que nous avions eu au collège. Je le reconnus tout de suite, et mon émotion était grande de savoir que parmi ces lecteurs que je ne connais pas, il s'en trouvait un qui avait usé sa culotte sur les mêmes bancs que moi. Je lui suis encore reconnaissant de s'être présenté devant le petit stand avec toute notre jeunesse dans son bagage.

_________________________________________________________________________

> Gilles Archambault reçoit Georges Leroux, samedi, 14h, au Carrefour Desjardins.

> Table ronde Berceau de la culture, dimanche, 14h30, sur la Grande Place.