Savez-vous pourquoi c'est aujourd'hui la Journée mondiale du livre? Il est toujours bon de l'apprendre: le 23 avril 1616 mouraient Cervantès et Shakespeare. Étrange qu'un tel jour funeste pour les lettres soit à l'origine d'une célébration créée par l'UNESCO il y a 15 ans, non? Mais ne soyez pas surpris si aujourd'hui, en achetant un livre chez votre libraire, vous recevez une rose: cela fait partie de la tradition en Catalogne, reprise ici par quelques valeureux.

La première fois que cela m'est arrivé, je croyais qu'on voulait remercier les lectrices qui font vivre les librairies... Touchant, quand on pense que les hommes d'aujourd'hui offrent de moins en moins de fleurs aux femmes. Alors mesdames, si votre conjoint ne visite jamais le fleuriste, rabattez-vous aujourd'hui sur votre libraire, qui en plus d'être galant, saura vous faire rêver par ses rayons bien garnis.

Exceptionnellement cette année, vous pourriez aussi recevoir gratuitement à l'achat d'un livre le recueil Ma librairie indépendante, si vous bouquinez dans les librairies membres de l'Association des libraires du Québec, qui souligne ainsi ses 40 ans. Ce petit livre regroupe des textes inédits de Jean-François Beauchemin, Nicolas Dickner, Robert Lalonde, Jean-Jacques Pelletier, Marie Hélène Poitras et Michel Tremblay, qui tous ensemble y vont d'une ode à leur libraire. Et pas seulement parce qu'ils mettent en vitrine leurs romans, bien sûr.

Les lecteurs étant gâtés de la sorte, je préfère croire que la Journée mondiale du livre est plutôt leur fête. Cette année, la JMLDA a d'ailleurs voulu mettre en lumière ceux qui ont pour métier de diffuser les livres; les libraires, bibliothécaires et professeurs qui nous renseignent et qui, pour être bons, doivent avant tout être de bons lecteurs.

Nous vous avons demandé vendredi dernier de nous parler d'une de ces personnes de votre entourage qui sait transmettre sa passion des livres. Vos réponses ont été éloquentes. Nous voulions choisir le meilleur, mais c'était impossible et crève-coeur. Dans l'ordre, ce sont les bibliothécaires qui arrivent les premiers, suivis des libraires, puis, à égalité, les professeurs et ces quelques personnes exceptionnelles pour qui les livres ne sont pas un métier, mais une vocation parallèle à temps plein. Par exemple, cette dame, Lise Marcil, proposée à nous par Karine Barette, parce qu'elle maintient une petite bibliothèque dans son bureau pour ses collègues à l'École du Barreau du Québec. «Elle nous envoie ponctuellement des bulletins pour annoncer les dernières additions ou ses plus récents coups de coeur. Elle ne presse jamais notre lecture ni ne réclame rapidement le retour de ses bouquins.» Voilà certainement une dame qui ne doit pas se plaindre de ne pas retrouver ses livres prêtés, ce qui me rend un peu honteuse de mon égoïsme.

«C'est toujours un risque quand on prête un livre de ne pas le retrouver, me dit Mme Marcil, surprise de mon appel, et émue d'avoir été stoolée par sa collègue. Mais pour moi, un livre ne doit pas mourir dans une bibliothèque. Sa raison d'être, c'est d'être lu. Et puis, après ça, les gens reviennent me voir et nous parlons du livre, ce qui ramène des beaux souvenirs de lecture, même quand ça fait longtemps qu'on a lu le livre. C'est un bonheur pour moi.» Mme Marcil est une lectrice de Nancy Huston, Margaret Atwood, Andreï Makine, Muriel Barbery et des polars scandinaves...

Nous n'avons pas réussi à joindre Stephan Arsenault du Colisée du livre, avenue du Mont-Royal, chaudement recommandé par ses lecteurs. Vingt-cinq ans de bons et loyaux services en ont fait un indispensable pour ses clients, qui lui apportent des cafés pour le remercier. Le meilleur en ville, selon Marlène Redon. «Au cours des années, il a appris à être un sociologue, un ami, une oreille, un conseiller et bien plus encore. Quand il s'absente pour un congé, la question de la journée est: où est Stephan?» En effet, où est-il? Ce phénomène ne travaille que les fins de semaine. Une autre de ses clientes, Élyse Benoît, en rajoute: «Ceux qui reviennent chaque semaine, collectionneurs et passionnés de livres, ne viennent que si Stephan est dans la vitrine. Tout le monde a un coiffeur, un docteur, un comptable; moi, j'ai un libraire!»

Dans toutes les lettres que vous nous avez envoyées, et que j'ai lues attentivement, une constante: vous n'aimez pas seulement lire, vous aimez ceux qui vous font lire. Une profonde affection et beaucoup de reconnaissance traversent vos mots, que vous avez pris la peine d'écrire pour leur lancer des fleurs - puisque la tradition aujourd'hui est de recevoir une rose. C'est une bibliothécaire, un libraire, un prof, une soeur, un frère, un ami, une mère... À vous, et à ceux que vous aimez, un grand merci et une belle Journée mondiale du livre.

Pour connaître toutes les activités de la JMLDA près de chez vous: www.jmlda.qc.ca.

 

 

Vos passeurs de livres

 

 

Quelques héros du livre en cette journée anniversaire, proposés par nos lecteurs.

> Éric Gougeon, libraire chez Imagine à Sainte-Dorothée (Marieve McGee)

> Kim Grimard, bibliothécaire au cégep de Granby (Daniel Marquis)

> David Cantin, libraire chez Zone de l'Université Laval (Marie-Andrée Boulanger)

> Lisette Sabourin, bibliothécaire, Académie Sainte-Thérèse (Cristophe Bélair)

> Lise Bujold, mère de Marie-France Gonthier

> Marie-Paule Savard, de la bouquinerie Écolivres à Lévis (Pierre Auger)

> Isabelle Moisan, bibliothèque Saint-Albert (Geneviève Lahaise)

> Lise Bellemare, ancienne prof de français à la polyvalente Calixa-Lavallée (Christiane Dupont)

> La librairie du Square (Manouane)

> Daniel Ducharme, dilettante (Carole Gagné)

> Daniel Marcotte, libraire à Cowansville (Raymonde Harrisson)

> Les libraires de la Boutique du livre à Place de la Cité, Québec (Clarisse Dehont)

> Les libraires de la Librairie Monet (Guy Archambault)

> Guy Desjardins, bibliothécaire, ville de Sorel-Tracy (Hélène Goulet)

> Benoit Lafleur, bibliothécaire au Collège Saint-Hilaire (François Pagé)

> Lyse Geoffroy, enseignante à Saint-Marc (Sophie Marchand)

> Catherine Hébert, bibliothécaire à Sainte-Julie (Marie Hébert)

> Hélène Tardif, bibliothécaire EPC-Bio de l'Université Laval (Nicholas Bencherki)

> Serge Clavet, retraité (Louis Poisson)

> Pierrette Denault, amie et prof retraitée (Bruno Lemieux)