Karine Giboulo présente ses nouvelles oeuvres dans une exposition, Arnait, qui traite de la vie de femmes inuites en milieu urbain. La sculptrice pose sur leur réalité montréalaise un regard tendre, voire amical.

L'art humaniste de Karine Giboulo s'est penché depuis 12 mois sur la vie en ville de femmes inuites. Avec Arnait («femme», en langue inuite), l'artiste montréalaise a trouvé un sujet à la mesure de sa grande empathie.

«Durant la dernière année, j'ai côtoyé des femmes de la communauté inuite de Montréal sur une base régulière, explique-t-elle en entrevue. Des amitiés sincères entre certaines d'entre elles et moi se sont nouées. Certaines ont aussi participé à la création des oeuvres.»

Créatrice hors pair d'univers en miniatures, Karine Giboulo présente une dizaine d'oeuvres, principalement en argile de polymère couverte d'acrylique, qui décrivent des conditions de vie parfois difficiles, mais où, cette fois, elle évite toute forme de satire sociale.

«On connaît les problématiques inuites et celles des autres Premières Nations en ville. Je voulais plutôt faire connaître et montrer le beau. L'idée est de montrer ce qu'on ne connaît pas de leur réalité.»

L'artiste ne souhaitait pas cacher non plus des problèmes comme ceux de l'itinérance, mais elle a décidé de les faire passer au second plan, en quelque sorte.

«J'ai rencontré Mialy Sharky, qui est très présente dans mes oeuvres. On la voit dans une église refuge, mais je ne me suis pas concentrée sur les aspects négatifs.»

Même s'il s'agit de la vie en ville, ajoute-t-elle, les Inuites portent la vastitude de leur contrée en elles.

«On la sent. Ils font des rassemblements et des repas communautaires auxquels j'ai assisté. Leur culture n'est pas morte parce qu'ils vivent ici. Elles y sont profondément attachées.»

Une sculpture traditionnelle en pierre à savon de Mialy Sharky fait partie de l'exposition. Une autre pièce représente une femme couchée par terre, recouverte d'un étrange tissu.

«J'ai travaillé avec Daisy Savard. Nous avons ramassé des contraventions qui sont données parfois aux femmes inuites pour être étendues au sol. Daisy les a cousues pour en faire une courtepointe traditionnelle. Moi, j'ai créé le personnage.»

L'exposition est complétée par des portraits photographiques accompagnés de témoignages sur leur vie urbaine.

«C'est très différent de ce que j'ai fait auparavant, conclut-elle. J'ai fait de très belles rencontres grâce à ce projet. Le problème, je crois, c'est qu'on ne se connaît et on ne se parle pas.»

L'artiste a créé des liens d'amitié avec certaines des Inuites, assistant même à des fêtes familiales.

«Nous avons ouvert l'exposition en leur présence et c'était tellement émouvant de voir leurs réactions. Elles étaient fières. Il y a un besoin criant de rapprocher les Québécois et les communautés autochtones. L'art peut créer des ponts.»

Arnait est présentée jusqu'au 3 novembre à la salle d'exposition de l'espace culturel Georges-Émile-Lapalme de la Place des Arts.

PHOTO MIKE PATTEN, FOURNIE PAR LA PLACE DES ARTS

Karine Giboulo, Je suis Quallunaat (ma première rencontre avec Mary), bois, argile de polymère et acrylique, 2018

Autres expositions

> Joe Lima

La galerie McClure présente The Edge of the Infinite, de Joe Lima, des matrices en bois et une variété d'estampes de ce peintre, sculpteur et graveur né aux Açores (Portugal) et exerçant à Montréal. Un artiste qui s'intéresse aux espaces architecturaux, aux lieux extérieurs comme aux environnements microscopiques.

The Edge of the Infinite, de Joe Lima, à la galerie McClure (350, avenue Victoria, Montréal), jusqu'au 29 septembre

> Megan Dickie

Megan Dickie, qui enseigne à l'Université de Victoria, présente sa vidéo Blue Skies à l'OEil de Poisson, à Québec, jusqu'au 14 octobre. Blue Skies met en scène une cowgirl solitaire. Aux prises avec une sculpture monumentale s'élevant d'un étui suspendu entre ses jambes, elle peine à danser. En 10 lieux distincts, le personnage tente d'accomplir une même chorégraphie malgré la présence de cet objet phallique scintillant. En complément de la vidéo, Megan Dickie présente trois sculptures qui explorent les mêmes notions d'extravagance, de monumentalité et de relations de pouvoir.

Blue Skies, de Megan Dickie, à l'OEil de Poisson (Québec), jusqu'au 14 octobre.

> Heward et Lauda à Darling

La Fonderie Darling présente The Silver Cord - John Heward/Jean-François Lauda, jusqu'au 9 décembre. Le titre est relié à un conseil que donnait Agnes Martin à ses étudiants («Hold onto the silver cord») concernant l'inspiration et l'improvisation. Deux éléments qui relient John Heward et JF Lauda, deux peintres engagés dans une abstraction chargée de gestuelle et de géométrie.

The Silver Cord - John Heward/Jean-François Lauda, à la Fonderie Darling (745, rue Ottawa, Montréal), jusqu'au 9 décembre.

Photo Libby Oliver, fournie par l’Oeil de poisson

Blue Skies (capture d'écran), 2018, Megan Dickie