Après le succès de l'expo Banlieue! de 2015, la Maison des arts de Laval poursuit sa réflexion sur l'identité suburbaine sous la forme d'une triennale. L'édition 2018 intitulée Là où se prépare le futur propose des oeuvres qui parlent de mobilité et d'espoirs de vie meilleure.

«Les gens qui déménagent en banlieue ont des attentes, dit Jasmine Colizza, muséologue et responsable de la salle Alfred-Pellan. Ils ont un idéal qu'ils souhaitent atteindre.»

Nous présentons les oeuvres de huit artistes de la triennale rencontrés à Laval. L'expo comprend également les créations de Sonny Assu, Eveline Boulva, Parisa Foroutan, Robert Hamilton, Emmanuelle Léonard, Mahmoud Obaidi et Marc-Antoine K. Phaneuf.

À l'occasion des Journées de la culture, une table ronde bilingue avec plusieurs artistes de la Triennale Banlieue! aura lieu le 30 septembre, de 13 h à 16 h. Pour le finissage, le 4 novembre, une performance sera donnée par La Famille Plouffe.

Triennale Banlieue! - Là où se prépare le futur, à la Maison des arts de Laval (1395, boul. de la Concorde Ouest, Laval), jusqu'au 4 novembre.

Huit artistes à découvrir

La Famille Plouffe

La Famille Plouffe est un collectif artistique constitué des parents, Émilie et Guillaume, et des enfants, Léo et Émeline. Les idées du groupe émergent lors de réflexions communes. Pour la Triennale, La Famille Plouffe s'est intéressée à l'ancien village de l'île Jésus L'Abord-à-Plouffe, intégré depuis dans Chomedey. Il fut longtemps une étape pour les cageux qui transportaient du bois de l'Outaouais jusqu'à Québec. Faite de matériaux et de symboles, l'installation D'abord cordial! présente une interprétation en bois du Tripedium de Chomedey, des cordes, des perches et des mains rappelant le travail des cageux et des éléments sculpturaux et vidéographiques évoquant l'époque de L'Abord-à-Plouffe.

Julie Lequin

À l'entrée de l'expo, l'installation de Julie Lequin, Cartographie du Manoir, aborde son déménagement décevant en banlieue, à Boucherville, il y a trois ans. Elle espérait y vivre une belle convivialité avec ses voisins, discutant avec eux par-dessus les haies, mais la réalité a été tout autre. Ainsi, son oeuvre est l'expression d'une banlieue imaginée. Elle a reproduit graphiquement son quartier, en dessinant ses maisons, et a écrit pour chacune d'elles un petit texte qui raconte l'histoire plus ou moins inventée de ses voisins. Un récit humoristique et documentaire sur l'état des maisons et celui de ses occupants!

Rajni Perera

L'artiste torontoise d'origine srilankaise Rajni Perera expose pour la première fois au Québec. Représentant une nouvelle tendance dans sa démarche artistique, sa murale My Dreams Started Dancing montre une petite fille qui dialogue, durant un rêve, avec trois personnages en train de danser. Un univers de science-fiction et de surréalisme qui lui permet d'évoquer son identité en tant qu'immigrée, la sexualité féminine, les questions de genre et la vie des banlieusards, une condition qu'elle dit avoir connue dans son enfance à North York et à Scarborough après être venue s'installer au Canada avec ses parents.

Catherine Bolduc

Dans la continuité de ses travaux sur les ombres, Catherine Bolduc présente L'île aux mouettes, une installation liée à un souvenir d'enfance, quand elle allait, l'été, au chalet de son grand-père, au lac Malartic, en Abitibiti. «L'idée de la banlieue, c'est s'éloigner de la ville pour habiter plus loin, pour moi, c'est un peu la quête du lieu idéal de vie», dit l'artiste née à Val-d'Or. L'île aux mouettes fait référence à un film de son père tourné sur le lac quand il était jeune. Pour reproduire l'atmosphère d'un lieu idéal, elle a éclairé, devant un rideau blanc, des plumes et des oiseaux artificiels et a figuré des oiseaux volant devant la lune en projetant de la lumière sur un mobile fait de coquillages...

Béchard Hudon

L'oeuvre La singularité du banal, du duo Béchard Hudon, est une installation sonore créée pour l'événement. Elle aborde la question du transport automobile entre les banlieues et les centres urbains via des ponts. L'installation est un cubicule diffusant la résonance intérieure du Pont de Québec, du pont de l'île d'Orléans et du tracel de Cap-Rouge telle qu'elle a été captée par des microphones et découlant de la circulation automobile et ferroviaire. Des sons différents selon les ponts. Des bruits qui expriment, dit Catherine Béchard, «la matérialité de l'expansion urbanistique».

Juliana Léveillé-Trudel et Natacha Clitandre

Natacha Clitandre a créé l'oeuvre Circulaires - appartenances et déplacements pour la greffer au volet théâtral de la Triennale, Enfabulation, un travail d'écriture et d'interprétation réalisé avec des citoyens lavallois et coordonné par l'auteure Juliana Léveillé-Trudel. Natacha Clitandre s'est rendue sur les lieux cités par ces citoyens dans leurs récits et a pris des photos à 360 degrés qui en tiennent compte. Enfabulation est présenté en public dans le cadre de la Triennale. «Pour permettre à des gens de raconter leurs histoires et pour découvrir la banlieue sous un angle très humain», dit Juliana Léveillé-Trudel. Enfabulation sera présenté à la salle Alfred-Pellan le 14 octobre prochain, à 14h.

Jean-Philippe Luckhurst-Cartier

Jean-Philippe Luckhurst-Cartier a étudié un secteur lavallois, situé entre le boulevard des Prairies et la gare de la Concorde, au moyen de la vidéo, du dessin et de la peinture pour comprendre la transformation d'un quartier jadis industriel en un espace revitalisé avec un projet de 1400 nouvelles unités d'habitation. Et pour rendre compte de ces lieux devenant un nouveau milieu de vie, au moyen de la performance, de la collecte d'objets et d'informations, d'une cartographie du quartier et de tableaux abstraits. Un regard qui pose des questions sur la politique d'urbanisation à Laval.

Henry Tsang

L'artiste vancouvérois Henry Tsang a comparé les maisons cossues d'inspiration européenne de l'Orange County de Los Angeles et celles qui ont été construites sur le même modèle près de l'aéroport de Pékin. Quand on regarde ses photos, on a du mal à discerner si l'on est en Californie ou en Chine. Le modèle étant d'inspiration française, italienne ou espagnole, où est l'authenticité? «Le monde rétrécit, dit Henry Tsang. Avant, quand on voyageait, on était dépaysé. On l'est de moins en moins. La politique, l'économie et la culture d'aujourd'hui sont devenues universelles.»