Qu'est-ce qui peut bien réunir Rembrandt, Kim Kardashian et Andy Warhol ? «Le potentiel créatif du selfie», répond le directeur de la Saatchi Gallery avant l'ouverture vendredi d'une exposition sur l'autoportrait dans tous ses états.

Avec l'explosion du numérique et le développement des téléphones intelligents, se prendre en photo est devenu un nouveau sport mondial. Et qui mieux que la vedette de télé-réalité Kim Kardashian pour personnifier ce nouvel art de se montrer qui désespère certains et en obsède d'autres ?

A l'exposition From Selfie to Self-Expression à la Saatchi Gallery, Kardashian, qui a publié en 2015 un ouvrage rassemblant ses meilleurs selfies, appelé Selfish, figure évidemment en bonne place. Mais elle est loin d'être seule.

Renoir, Picasso, Cézanne, Monet, Rembrandt ou Van Gogh fournissent une «dream team» de maîtres dont les autoportraits, projetés sur des écrans, viennent rappeler que l'homme n'a pas attendu l'invention du téléphone pour se tirer le portrait.

L'unique différence c'est qu'autrefois «l'exercice était réservé aux artistes qui avaient le talent, les outils et les matériaux», souligne Nigel Hurst, directeur exécutif de la Saatchi Gallery à l'AFP.

C'est le développement du miroir, rappelle-t-il, qui a contribué à populariser un nouveau genre. Certains le tourneront en dérision, comme le peintre français Joseph Ducreux avec son Autoportrait en moqueur (1793) sur lequel il pointe le doigt vers le spectateur, sourire sarcastique aux lèvres.

Modernité oblige, on peut «liker» ces oeuvres à la Saatchi Gallery sur des téléphones intelligents accrochés à côté des écrans.

L'émergence de la photographie ouvre de nouveaux champs, largement explorés à travers des artistes comme Andy Warhol, Tracey Emin ou Cindy Sherman.

Pour arriver finalement au selfie représenté par des images qui ont été «retweetées» des milliers de fois, comme l'autoportrait accidentel d'un singe ou le selfie de la première ministre danoise Helle Thorning-Schmidt avec Barack Obama.

Le selfie d'Ellen DeGeneres avec le gratin d'Hollywood aux Oscars, devenue l'image la plus partagée de la planète, est naturellement aux premières loges.

À la portée de tout le monde, le selfie offre aussi un terrain de jeu inépuisable aux artistes contemporains, telle la Britannique Juno Calypso, 27 ans, qui a créé un personnage qu'elle met en scène sous toutes les coutures.

«Parfois je commence à 22 h et je ne finis pas avant cinq heures du matin», dit-elle à l'AFP, insistant sur le fait que ce n'est «pas que du fun», mais une vraie démarche.