Le Musée québécois de culture populaire propose, à Trois-Rivières, une exposition approfondie sur la bande dessinée québécoise. Un rendez-vous pour petits et grands qui permet de mesurer la qualité et la diversité de la BD québécoise, un art en expansion dans la province et qui s'exporte...

Les premières oeuvres de BD publiées au Québec l'ont été dans le journal La Patrie, en 1904. Les histoires d'Onésime, d'Albert Chartier, ont eu du succès dès 1943, puis la tradition européenne de la BD s'est implantée progressivement chez nous avant d'exploser au début du siècle: 70 albums de bandes dessinées ont été édités en 2000 au Québec... et 217 l'an dernier! 

L'exposition trifluvienne porte un regard sur 23 bédéistes québécois, dont Michel Rabagliati, Iris Boudreau, Daniel Shelton, Zviane, Philippe Girard ou encore Jean-Paul Eid, et explique comment on crée une BD. De grands panneaux détaillent sa production en sept étapes, depuis l'élaboration du synopsis jusqu'à la mise en couleurs des planches, en passant par l'écriture du scénario, la recherche graphique, la mise en page, le crayonné (phase de peaufinage et création des phylactères ou bulles de dialogue) et enfin l'encrage. 

On peut ainsi admirer un carnet de croquis personnel de Michel Rabagliati dans lequel il élabore (en 2008) le passage où «Paul déménage à Saint-Léonard», précisant tout ce que Paul fait lors de son déménagement. On peut aussi voir deux pages du scénario du tome 1 de Purgatoire, la BD qu'Yves Rodier et Cécile Brosseau ont sortie en 2014. Ou découvrir comment Julie Rocheleau a effectué sa recherche du personnage de Bouzille pour La colère de Fantômas.

Autant de bédéistes que de styles

L'exposition montre comment un bédéiste répartit son histoire dans des cases juxtaposées. On constate le style de Thierry Labrosse, avec ses dessins très fouillés pour le tome 2 de son album Ab Irato: des scènes dynamiques et impressionnantes de vérité couplées à de gros plans de ses personnages. Par contre, le graphisme épuré de Djief, pour son album Saint-Germain, notamment, rappelle la précision du trait dans les toiles de Canaletto. On découvre aussi comment Jacques Lamontagne tient compte des lignes de fuite pour mettre en scène l'intérieur d'une bibliothèque française dans le tome 2 de son album Aspic

Le visiteur peut rester des heures dans cet espace à contempler les planches et les esquisses des bédéistes. Pour chaque bédéiste, le commissaire François Bourdages a fait produire un panneau sur lequel sont présentés sa biographie, la liste de ses publications et les prix et distinctions qu'il a reçus. L'exposition présente aussi quelques maisons d'édition du Québec. 

Les fanzines

Un espace est consacré aux fanzines (expression formée des mots fanatic magazine), ces petites publications qui ont essaimé dès les années 70 et qui provenaient souvent d'amateurs, dont certains sont devenus célèbres, notamment Jacques Lamontagne, André-Philippe Côté ou Julie Doucet. Le musée en expose une centaine, notamment L'oeuf (1974), Les aventures du capitaine Québec (1973), Joker (1985) ou Zeppelin (1992-1993).

L'exposition aborde aussi les succès de BD québécoises à l'étranger, notamment celui des Nombrils (avec les ados Jenny, Vicky et Karine), la création de Delaf et Dubuc qui a fait partie des 10 plus importants tirages de BD en Europe l'an dernier. Elle montre aussi une quarantaine de BD québécoises éditées en langue étrangère: espagnol, russe, coréen, italien, anglais, mais aussi et surtout allemand et néerlandais. Par exemple, Paul va a trabajar, de Michel Rabagliati, ou Ein philosophisch pornografischer sommer, de Jimmy Beaulieu!

L'immersion dans cet univers de la BD québécoise s'achève avec un espace pour lecteurs. Des poufs, des chaises et des fauteuils invitent les visiteurs à éplucher des BD mises à leur disposition. On peut aussi s'essayer à créer une planche de BD sur une feuille où six cases ont été dessinées. Et ainsi se prendre un instant pour ces vedettes de la BD d'ici que sont les Tristan Demers, François Lapierre, François Miville-Deschênes, Stéphanie Leduc, Mario Malouin ou encore Mikaël. 

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BDQ - L'art de la bande dessinée québécoise Au Musée québécois de culture populaire (200, rue Laviolette, Trois-Rivières), jusqu'au 28 janvier 2018 (oui, 2018!). Jusqu'à la fête du Travail, le musée est ouvert tous les jours de 10 h à 18 h.

Photo Éric Lajeunesse, fournie par le Musée québécois de culture populaire

Avec l’étape de mise en couleurs, on comprend qu’il y a de grandes variétés de colorer les planches de bandes dessinées. Chaque bédéiste a ainsi sa propre signature à ce sujet.