Le festival Elektra et la Biennale internationale d'art numérique (BIAN) laissent toute la place à la machine cette année.

L'enfer, c'est eux autres. Bill Vorn et Louis-Philippe Demers sont des docteurs Frankenstein de l'art robotique. Ils ne créent pas de monstre, mais les robots de leur pièce de performance robotique Inferno portent virtuellement ce péril en eux. Et si la machine perdait la tête... 

Imaginez. Vous entrez dans une salle à l'éclairage tamisé où 24 exosquelettes robotisés semblent flotter dans l'espace en attente de participants. Parce que ce sont les spectateurs qui porteront l'appareil et donneront le spectacle. Bill Vorn et Louis-Philippe Demers sont à la console numérique pour diriger les robots, pour vous diriger.

« Inferno s'inspire de l'idée de boucle infinie ou d'un mécanisme perpétuel. La machine en est l'archétype. C'est l'enfer au sens de mécanisme punitif et de soumission », explique Louis-Philippe Demers.

Une musique électronique rythme la performance. Chaque participant est libre de bouger les jambes et les pieds, mais tout le haut du corps est sous l'emprise de la machine.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Sur une musique électronique, les mouvements des 24 exosquelettes robotisés sont contrôlés par les artistes, qui peuvent ainsi offrir un spectacle différent chaque fois. 

Les deux créateurs n'en sont pas à leurs premiers robots. 

« Notre approche est différente cette fois-ci, relate Bill Vorn. Quand on travaille sur une installation, même si la distance est plus grande que lors d'une performance entre l'homme et la machine, l'intention est de les fusionner. Avec Inferno, on rapproche l'expérience le plus près de l'humain. »

Apprendre

Ils ont présenté ce spectacle ailleurs avant de s'amener à Montréal. Premier constat : ils apprennent autant que les spectateurs dans cette danse avec la machine.

« Le paradoxe qu'on a observé, c'est que ce n'est pas trop l'enfer. Ça devient très ludique. Les gens aiment ça. Ils se font contrôler et ils se laissent aller », dit Louis-Philippe Demers. 

Et les participants réagissent très différemment les uns des autres à cette « manipulation » robotisée.

« L'idéal est de se laisser aller, résume Louis-Philippe Demers. Si on n'embarque pas dans la musique, c'est plus difficile. Certains nous ont parlé de transe. Pour d'autres, ça ressemble à un work-out au gymnase. C'est la fête la plupart du temps. »

Soumission

La performance suggère tout de même l'idée d'une soumission à la machine, qui hante la science-fiction depuis toujours.

« La réflexion du spectateur ne s'opère pas sur le coup, croit Bill Vorn. Ce sont les sens qui sont stimulés. Après, par contre, ils y réfléchissent. Ça dépend de l'idée qu'ils avaient en arrivant. »

Le travail sur Inferno a commencé il y a quatre ans et se faisait à temps perdu. Bill Vorn enseigne à l'Université Concordia, mais Louis-Philippe Demers, de son côté, est professeur à Singapour. 

Il faut dire que la machine des subventions gouvernementales en art numérique n'est pas toujours adaptée à la discipline. 

« C'est un long processus. On a dû faire appel à la coproduction, mais on est habitués, disent-ils. Nous sommes des patenteux parce qu'on fait presque tout nous-mêmes. »

À Arsenal les 3 juin (20 h et 23 h) et 4 juin (23 h). Le festival Elektra se déroule du 1er au 5 juin et la Biennale internationale d'art numérique, du 3 juin au 3 juillet.



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