Inauguré en novembre prochain, le Pavillon pour la paix Michal et Renata Hornstein du Musée des beaux-arts de Montréal vient de recevoir une oeuvre prestigieuse en verre et acier, Le Noeud Pivoine, que le musée a achetée à l'artiste français Jean-Michel Othoniel. La Presse l'a rencontré.

L'an dernier, Jean-Michel Othoniel, célébrité de l'art contemporain français, a exposé pendant sept mois ses sculptures florales à l'Isabella Stewart Gardner Museum, à Boston. À l'entrée de l'exposition Secret Flower Sculptures était suspendue une sculpture élégante et imposante (elle pèse une tonne!) faite de boules de verre miroité: Le Noeud Pivoine. Venue voir l'exposition, la directrice et conservatrice en chef du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), Nathalie Bondil, est tombée sous le charme. Elle trouvait que, de par ses proportions et ses couleurs, l'oeuvre s'intégrerait parfaitement dans le nouveau pavillon de la rue Bishop. 

«Pour nous, il était important d'avoir une oeuvre d'un artiste international dans le nouveau pavillon, comme on a Le soleil de Chihuly dans un autre, dit Nathalie Bondil. Et nous voulions avoir une oeuvre suspendue», au plafond du troisième étage du pavillon.

La sculpture a été créée en 2014-2015 avec de grosses perles en verre, baroques et sensuelles. Les teintes dégradées de jaune, rouge, mauve, rose, orange et caramel tirent leur origine d'une aquarelle d'Othoniel. Sa forme découle d'une étude sur les noeuds qu'il a entreprise il y a trois ans.

Influencé par Lacan

«Mon travail était inspiré des noeuds, signes de l'infini, qu'avait dessinés [le psychanalyste] Jacques Lacan, dit l'artiste français, en entrevue au MBAM. La création représentait pour lui des mondes qui tournaient les uns autour des autres et formaient des noeuds. Comme il n'y avait pas d'ordinateur à l'époque, il avait représenté ça avec des petits bouts de ficelle!»

Jean-Michel Othoniel a toujours été passionné par les fleurs. Il a écrit un livre, L'herbier merveilleux, dans lequel il évoque le sens caché des fleurs dans la peinture depuis l'Antiquité. «Le livre permet, quand on va dans un musée, de comprendre la symbolique des fleurs peintes dans les tableaux anciens, dit-il. La signification d'une fleur au Moyen Âge ou à la Renaissance n'est parfois plus la même aujourd'hui.»

Le sens de la pivoine

La pivoine symbolise la beauté, mais c'est aussi «la rose des pauvres», pendant longtemps un symbole de honte pour la noblesse. Le Noeud Pivoine s'appelle d'ailleurs en anglais Peony, the Knot of Shame

«[La pivoine], c'est aussi un symbole de jeunesse, car elle est belle à toutes les étapes de sa vie. Elle est donc un signe d'espoir. À chaque étape de la vie, il y a de la beauté.»

Le fait que la pivoine puisse être un remède contre les maladies mentales a aussi beaucoup plu à Nathalie Bondil, puisque le nouveau pavillon sera aussi consacré à l'éducation et à l'art-thérapie, explique Jean-Michel Othoniel.

L'oeuvre est une boucle en acier inoxydable qui décrit cinq volutes et dans laquelle ont été passées 400 perles de verre. Les perles jaunes placées au centre représentent le pistil de la fleur. Toutes les perles ont été créées à Bâle, en Suisse, par le maître verrier Matteo Gonet. Jean-Michel Othoniel travaille avec le verre depuis plus de 20 ans et ne s'en lasse pas. 

«Chaque année, je trouve des idées nouvelles. La perle est devenue ma signature, car c'est un module qui me permet de faire des choses gigantesques.» 

Fasciné par la beauté, il n'a jamais exposé au Canada. C'est la première fois qu'une de ses oeuvres y entre dans une collection publique. Et c'est la plus grande sculpture de toutes celles acquises par des musées, dans le monde. 

«Le Noeud Pivoine va bien s'intégrer dans son espace du nouveau pavillon à cause du bois qui habille les murs et le soleil qui entre par les baies vitrées, dit Jean-Michel Othoniel. L'oeuvre sera visible à l'intérieur comme dans une sorte d'écrin, mais aussi de l'extérieur, notamment le soir quand elle sera éclairée.» 

L'artiste en un coup d'oeil

> Jean-Michel Othoniel 

> 52 ans 

> Né à Saint-Étienne, en France 

> Son exposition à la Fondation Cartier, à Paris, en 2003, a propulsé sa carrière. 

> Très collectionné en Asie. Il a exposé son Black Lotus, ce printemps à Séoul, et a installé une nouvelle oeuvre, Kin No Kokoro, au Japon.

> Le collectionneur québécois François Odermatt a acheté son oeuvre Salon Ottoman, un lit à baldaquin fait de 120 perles de verre de Murano.

> Une de ses oeuvres en perles d'or se trouve dans le parc Golden Gate, à San Francisco.

> Son grand projet Les belles danses, inauguré en 2015 à Versailles, est la première création pérenne dans le palais royal français depuis 300 ans.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

L'artiste Jean-Michel Othoniel était de passage à Montréal pour l'installation de sa sculpture Le Noeud Pivoine, à l'intérieur du nouveau pavillon du Musée des beaux-arts de Montréal qui sera inauguré en novembre, rue Bishop.