Mention d'honneur au concours de peinture RBC 2014, Nicolas Lachance est sur une belle lancée. En moins de cinq ans, son travail dense et rigoureux a déjà suscité beaucoup d'admiration chez les connaisseurs.

Nicolas Lachance est un représentant du courant d'air frais qui souffle en arts visuels. Un vent de renouveau, en peinture notamment, qui laisse entrevoir des lendemains à la prédominance de l'art conceptuel.

Protégé du réputé galeriste René Blouin, l'artiste de 34 ans vient d'exposer jusqu'au 19 décembre chez Optica. Le diplômé de l'UQAM mijote bien d'autres projets. Et pourtant...

«Je suis entré au bac en touriste. Ce n'est qu'en dernière année, avec le prof Michel Bricault, que cela a changé. Il m'a vraiment fait voir quelque chose dans la peinture. Ça a bouleversé ma vie. J'ai décidé de continuer.»

Après deux ans de travail intense en studio, sa première exposition a eu lieu en 2012. Il est ensuite passé par une résidence à la Fonderie Darling. Son art n'a rien de conceptuel, au sens «jeffkoonien» du terme. Sa pratique se base davantage sur le geste et les matériaux que sur l'idée, aussi géniale soit-elle.

«Ce n'est pas gratuit. Dans le fond, c'est toujours une question d'image. Au-delà de la peinture, je suis à la recherche d'une marque originelle. Il suffit parfois de faire un geste pour la révéler.»

Ambiguïtés 

La tache, le débordement, l'écoulement, la poussière... tout peut lui servir. S'il était écrivain, on dirait qu'il est un maître des métaphores.

«C'est comme une éponge gorgée de savon. Il suffit de la presser un peu pour qu'apparaisse un motif. Après, le travail de peinture commence. La densité d'une image frappe l'inconscient, c'est ce que j'essaie de créer.»

En voyant ses grands tableaux mauves chez Optica, le visiteur pouvait se demander s'il s'agissait d'une impression ou d'une peinture. L'intérêt de sa recherche se cache justement dans cette ambiguïté.

«Ça pose la question: qu'est-ce qu'on regarde? J'aime les oeuvres exigeantes. Je déteste le travail qui se fait comme une démonstration de jonglerie où la peinture est basée sur les effets.»

Sujet et matière 

Aux yeux du jeune peintre, la toile est un matériau comme les autres. Et sa quête n'est jamais finie: marouflage, sablage, peinture industrielle, gypse, copie carbone... On s'éloigne carrément des ballons gonflables ou des vaches coupées en deux. Nicolas Lachance fait se rencontrer le sujet et la matière.

«C'est difficile de savoir ce qui nous frappe, ce qui nous happe en art. Autant en arts visuels qu'au cinéma, qu'en musique ou en poésie, d'ailleurs. Les images qui sont comme des virus m'intéressent beaucoup. Ce qui se propage, qui s'infiltre doucement, qui prend du temps.»

Avec Nicolas Lachance, on est dans la durée. L'oeuvre qui ne se donne pas au premier coup d'oeil et, pour y arriver, le travail qui s'abreuve d'accidents, de bavures, de jonctions, d'erreurs... Le temps est son allié.

«Un tableau peut prendre six mois. Après l'expérimentation, il se dégage des lignes de force. À partir de là, le travail se développe. La question de l'image, ce n'est pas qu'une pâte pigmentée avec une brosse sur une surface. La question de l'image est beaucoup plus riche, dense, secrète et mystérieuse aussi.»