La Ville de Repentigny a inauguré, hier, son nouveau lieu de culture et de spectacle, le Centre d'art Diane-Dufresne, avec le vernissage de l'exposition DDXL consacrée aux oeuvres d'art de Diane Dufresne et de Richard Langevin, et présentée jusqu'au 21 février.

Dessiné par l'architecte Maxime-Alexis Frappier, le nouveau centre d'art de Repentigny va battre pendant près de cinq mois au rythme de l'univers créatif et poétique de Diane Dufresne et de Richard Langevin. Tous deux avaient exposé à Repentigny en 2011 et, touchée par le génie de la grande dame de la chanson québécoise, la mairesse Chantal Deschamps a estimé que le nom de Diane Dufresne était celui qui incarnait le mieux la vocation multidisciplinaire du nouvel espace culturel.

L'exposition inaugurale DDXL illustre l'éclectisme de Diane Dufresne qui, combiné aux prouesses scénographiques de Richard Langevin, assure... un résultat XL ou Extra Large. Avec son conjoint, elle a en effet créé, en neuf mois, trente-sept nouvelles toiles, vingt dessins, trois installations et écrit un «carnet de bord» qui joue le rôle de carnet d'exposition tout en étant un témoignage sur la condition de l'artiste pendant sa période créative.

«C'était pour montrer que l'on vit aussi à travers la création et si je peux donner une telle pulsion à d'autres, tant mieux, car tout le monde peut créer», a dit Diane Dufresne en entretien au centre d'art.

Influences

L'exposition DDXL est présentée dans deux salles, mais aussi à l'extérieur puisque Richard Langevin a réalisé une sculpture monumentale, Crescend'eau, dans le bassin aquatique bordant l'entrée du centre d'art. Une oeuvre qui rend hommage au talent artistique de Diane Dufresne.

À l'intérieur, on découvre plusieurs séries de peintures. Des acryliques sur toile où l'on retrouve le style de femmes que peint Diane Dufresne. Des femmes longilignes et énergiques, à la fois esquissées et chimériques. Dans une série de 20 petits cadres, ces femmes sont parées de vêtements colorés et originaux. Diane Dufresne aurait fait une excellente styliste. «Oui, j'aurais aimé ça, dessiner des robes», dit-elle.

Plus loin, on peut apprécier les influences picturales de Diane Dufresne. Elle a ainsi peint trois oeuvres À la Dubuffette, rappelant le style des Quatre personnages de Jean Dubuffet, en 1974, ainsi que trois toiles abstraites de grand format évoquant la période automatiste, notamment son Oh! Zabois, travaillé à la spatule, et le De bois et d'averses, où ses aplats verticaux se mêlent harmonieusement à des textures feuillues.

«Avec le Frère Jérôme [qui lui a donné des cours de peinture], la gestuelle, c'était la base, dit Diane Dufresne. Il fallait garder son instinct. C'est ce que j'aime le plus faire. J'appelle ça «mes coups de poings sur la gueule»! Toute la violence que j'ai à l'intérieur passe là-dedans.»

Des installations

Nouvelle passion du duo artistique, l'installation est à l'honneur. Ils ont tous deux réalisé une installation sur l'art ménager car, disent-ils, «sans ménagement, l'art ménager nous lessive une partie de notre existence»!

Cette installation consiste en deux machines à laver frontales portées par des jambes féminines. Au-dessus, deux lustres ont été placés, l'un constitué de bouteilles d'eau de toilette - collection de Diane Dufresne - et l'autre fait de cintres en bois.

Une autre installation, intitulée J'm'en rolls, présente la voiture Bentley 1956 qu'Yvon Deschamps avait offerte à Diane Dufresne en 1982. Le visiteur peut s'asseoir sur la banquette arrière et dessiner sur une feuille de papier ou écrire une réflexion. Toutes ces feuilles, Diane Dufresne espère un jour les réunir pour créer une oeuvre à Montréal. Peut-être dans le métro. Peut-être à l'occasion du 375e anniversaire de la métropole.

«Faudrait que j'aille voir le maire, dit-elle. Ce serait bien que ce soit toujours en mouvement, que cela devienne une murale qui se transforme...»

Vidéoclip inédit

L'installation la plus impressionnante de l'expo s'appelle Exit en herbe. Il s'agit d'une immense pièce dans laquelle le duo d'artistes a fait aménager un jardin d'abondance. Sur de l'herbe synthétique, des bancs ont été placés près d'une balançoire en forme de cercueil! Le visiteur pourra s'y balancer tandis que dans son dos, un vidéoclip inédit de Diane Dufresne (tourné par Jacques Beauchemin) diffuse sa dernière chanson composée avec Jean-Phi Goncalves et qui s'intitule J'écris avant de m'effacer. Un titre approprié, reconnaît Diane Dufresne dans un grand éclat de rire.

«C'était pour exprimer le fait que la création défie aussi la mort, dit-elle. Les [hommes de] Cro-Magnon risquaient leur vie quand ils descendaient dans des grottes pour faire des dessins. On a voulu que l'installation ne soit pas lugubre, car la créativité, c'est ce qui reste après la mort.» «On ne regardera plus le salon funéraire comme avant», ajoute Richard Langevin.

Une grande joie

Diane Dufresne est ravie de se voir ainsi honorée par la Ville de Repentigny.

«Ils voulaient quelqu'un de vivant pour donner le nom au centre d'art, dit-elle. Et ils voulaient une expo, alors on y est allés à fond! Cet honneur, c'est une récompense et aussi une grande joie de participer à un centre créatif quand, de nos jours, on ne parle que d'argent et de drames. On espère que le public viendra ici pour participer à la création et qu'il se balancera dans la tombe comme dans une Rolls! Et qu'il aura du plaisir!»