Quelles sont les expositions à voir ce week-end? Chaque vendredi, nos critiques en arts visuels proposent une tournée montréalaise de galeries et de centres d'artistes. À vos cimaises!

Tristesse et humour

La Fonderie Darling mêle le très sérieux au ludique avec deux créateurs présentés dans le cadre de BNLMTL 2014, Li Ran et Lawrence Weiner, ainsi qu'une artiste montréalaise, Karen Kraven.

Le court métrage de Li Ran Before Indulgence, After Freedom traite de l'ambiguïté de la Chine moderne. 

Une caméra filme cinq hommes qui parlent d'eux, de leur vie et de grands philosophes et scientifiques comme si ceux-ci étaient des personnages de l'actualité ou de fiction. 

Toute la finesse de cette proposition se situe dans le montage. En collant des énoncés ensemble, le vidéaste fabrique un récit qui pourrait se tenir, à la fois poétique et hyperréaliste.

Le résultat montre surtout la détresse, la solitude, voire le gouffre au-dessus duquel se tiennent ces hommes à l'avenir incertain et tristes à en mourir. Ce petit film gagne à être vu et revu.

Au mur dans la grande salle de la Fonderie, éclairée comme il se doit par la lumière naturelle, une phrase de Lawrence Weiner en anglais qui se traduit ainsi: Le raccourcissement d'un arc-boutant contre sur près ou autour du cercle arctique.

Près de 50 ans après avoir été écrite, cette phrase et les autres de Weiner qu'on peut voir au MAC et à la Place Ville Marie dans le cadre de la Biennale montrent que derrière l'art conceptuel, il reste la réalité pure et crue: la précarité du monde d'hier se poursuit aujourd'hui. 

Karen Kraven

En conclusion de cette visite à la Fonderie, il ne faut pas manquer l'art ludique de Karen Kraven. L'artiste basée à Montréal s'amuse et nous amuse avec Razzle Dazzle Sis Boom Bah

L'installation comprend des filets de tennis et de badminton, des chapeaux et des billets de banque en porcelaine distribués et cachés partout dans la salle. Si le titre renvoie aux sports et à la guerre, le rendu final s'en moque un peu. L'artiste nous a pris dans ses filets. 

C'est du théâtre! Et du bon.

__________________________________________________________________________

Li Ran, Lawrence Weiner et Karen Kraven à la Fonderie Darling, jusqu'au 7 décembre.

Passions artistiques

L'avocat Stephen Angers collectionne depuis 25 ans. Sa galerie d'art affaires, ouverte depuis quatre ans, propose en ce moment une mini-rétrospective de quelques-uns des artistes qu'elle représente.

La Galerie Angers est trop petite pour la passion qui l'habite. Et pour cause. Son propriétaire, Stephen Angers, l'a ouverte dans son cabinet du Vieux-Montréal. L'ampleur de sa collection l'oblige maintenant à penser à la déménager.

Même s'il vient d'une famille de mécènes et de collectionneurs proches de Marc-Aurèle Fortin, notamment, Stephen Angers ne s'intéressait guère à l'art contemporain au départ. Ses nombreux voyages en Europe ont cependant «formé sa jeunesse».

«C'est lors d'une longue visite de Beaubourg avec des amis que j'ai eu la piqûre, raconte-t-il. Je reviens maintenant de chacun de mes voyages avec une ou deux oeuvres.»

Ses goûts sont variés et audacieux, comme en fait foi l'exposition en cours dans sa galerie-bureau. Angers présente, entre autres, un dessin percutant de l'animateur humoriste Pierre Brassard, intitulé Unifolie, qui fait référence à l'actualité récente.

Le collectionneur aime aussi l'art chinois contemporain, Chen Man et Cheng Lei notamment. Il possède et montre dans son cabinet des oeuvres de Nadia Myre et d'Irene Whittome.

«Je suis conscient que ce n'est pas donné à tous d'avoir des goûts aussi variés, mais c'est une véritable passion», dit-il.

La galerie expose également en ce moment des toiles de Dominique Sarrazin et de Julie Thériault, des photos d'Yves Vaillancourt et de Denis Laramée, ainsi que des travaux plus exploratoires de Malgosia Bajkowska.

Comme beaucoup d'autres dans le monde de l'art, Stephen Angers considère plusieurs de ses artistes comme des amis. Loin de lui l'idée de la course aux enchères. Connaître et faire connaître est sa devise.

«Je n'ai rien d'un Gagosian ou d'un Saatchi. Je suis un petit joueur qui s'amuse. L'art contemporain pour moi est un milieu très convivial où il n'y a pas de compétition. C'est pour ça que j'hésite encore un peu à agrandir la galerie; j'ai peur que ça devienne trop lourd.»

_________________________________________________________________________

À la Galerie Angers (405, rue Saint-Dizier), jusqu'au 31 janvier 2015.

Photo: fournie par la Galerie Angers

Pierre Brassard, Unifolie, 2014.

Les autres expos à voir

HAROLD KLUNDER, DENIS JUNEAU ET FRANÇOISE SULLIVAN

La galerie Simon Blais propose, jusqu'au 20 décembre, une triple exposition picturale avec des oeuvres récentes et colorées du peintre d'origine hollandaise Harold Klunder, les derniers tableaux du regretté plasticien montréalais Denis Juneau, mort le mois dernier, et la plus récente production sur toile de la toujours dynamique Françoise Sullivan. Un panorama de la peinture montréalaise en trois chapitres.

Peintures récentes d'Harold Klunder, Denis Juneau et Françoise Sullivan, à la galerie Simon Blais (5420, boulevard Saint-Laurent), jusqu'au 20 décembre.

RENÉ GAGNON

Même s'il a 86 ans et des problèmes de santé, le peintre saguenéen René Gagnon peint encore tous les jours. La Galerie 203 organise, jusqu'au 13 décembre, l'exposition De rêve et de paysages, un survol de ses 60 ans de carrière avec la présentation d'une quinzaine de toiles. L'artiste lance en même temps une biographie. Plusieurs de ses oeuvres sont exposées au Musée des beaux-arts de Montréal, au Musée régional de la Pulperie de Chicoutimi et au Musée d'art contemporain de Baie-Saint-Paul.

De rêve et de paysages, de René Gagnon, Galerie 203 (227, rue Notre-Dame Ouest), jusqu'au 13 décembre.

JULIE ESCOFFIER ET CAROLINE MAUXION

Dans le cadre de son programme d'exposition et de mentorat qui soutient les artistes de la relève, la galerie Les Territoires diffuse une double programmation d'ici au 20 décembre. Avec À l'ombre de mouche, la Lyonnaise Julie Escoffier propose une exposition qui lie la photographie à la pêche, au leurre et à la représentation. De son côté, la Montréalaise d'origine française Caroline Mauxion présente peu n'est pas rien, un travail photographique réalisé en atelier.

À l'ombre de mouche, de Julie Escoffier, et peu n'est pas rien, de Caroline Mauxion, à la galerie Les Territoires, Édifice Le Belgo (372, rue Sainte-Catherine Ouest, # 527), jusqu'au 20 décembre.