En partenariat avec la galerie Station 16, le centre d'art contemporain L'Arsenal et l'agence Speakeasy présentent en ce moment neuf artistes internationaux du street art en création, au 2020, rue William, dans Griffintown, jusqu'à samedi. Et contrairement à ce qu'on pourrait croire, il n'y a pas que des graffitis...

Étonnant de voir des artistes du street art travailler à l'intérieur, loin des gaz d'échappement et des murs de briques. L'idée de Jean-François Bélisle (L'Arsenal) et Emily Robertson (Station 16), qui était de les réunir pour les voir créer ensemble «dans un studio de street art actif» dans une des grandes salles de l'Arsenal, représentait tout un défi. Mais il vaut la peine d'y faire un tour.

Le commissaire Alejandro Figueroa, ex-directeur de la Do Art Fondation (qui a tant fait pour le street art à Montréal), a choisi neuf artistes qui représentent des modes d'expression variés du street art.

Le plus connu dans le monde est certainement l'Allemand Case (membre du groupe Ma'Claim), qui a propulsé le street art sur la scène économique et industrielle. Il réalise en ce moment sur des matériaux recyclés une fresque réaliste, sorte de barricade de manif, avec une main qui semble entravée d'un côté et deux mains menottées de l'autre. Impressionnant.

On l'avait vu à Mural, au printemps dernier; le Portoricain Alexis Diaz était en train, hier, de dessiner un coeur duquel poussent des branches. Le tout non pas à la peinture en aérosol, mais à l'encre de Chine. Une minutie de moine.

À côté, d'intéressantes oeuvres de Sten et Lex, deux artistes italiens à Montréal pour la première fois. Ils créent des pochoirs après avoir dessiné des motifs sur du papier qu'ils vont ensuite coller puis découper, peindre avant de retirer ici et là des éléments pour laisser pendre des morceaux de papier. Cela donne des oeuvres géométriques intéressantes.

De son côté, Kevin Ledo, d'une incroyable capacité de travail, a créé six oeuvres de belle taille, s'inspirant d'icônes religieuses pour dessiner... ses amis et sa grand-mère. Dans des teintes plus douces que ses oeuvres extérieures, il réussit à «trouver la divinité» dans les gens. Le résultat est magnifique.

Passionné d'architecture, Philippe Allard était, hier, en train de créer une «maison de fortune» pour sans-abri, avec notamment des photos de graffitis et ces cartons que les mendiants placent devant eux dans la rue. Des cartons du style «Hungry & Broke. Anything helps. Merci!» ou «Un peu de change pour mangé» ou, encore plus incongru, «Too Ugly for Pro$titution»! Des cartons achetés aux mendiants. Une oeuvre d'art sociologique qui promet.

Les lieux sont aussi occupés par des oeuvres créées par les Français Jérôme Mesnager et Louis Bottero. Pionnier du street art en France, Mesnager (âgé de 53 ans) réalise des fresques avec ses personnages schématisés et dynamiques du plus bel effet. Beaucoup plus jeune, Bottero propose des dessins très graphiques. Dynamique, il présentera samedi soir (lors d'un cocktail dînatoire à 95 $) un défilé de mode, car ce touche-à-tout inspiré par la rue crée des vêtements avec ses illustrations qu'il vend en France «dans des concept stores».

S'inspirant elles aussi du quotidien, Marilène Gaudet et Karine Fournier sont toutes deux membres des Ville-Laines. Elles investissent l'espace public avec tissus et laines. Elles étaient hier en train de créer des champignons et d'habiller un piano qui crée une toile de peinture quand on y joue de la musique...

Fils du sculpteur Armand Vaillancourt, Alexis Vaillancourt préparait une grande oeuvre composée de personnages faisant du taï-chi. Le Montréalais Labrona a, lui, voulu utiliser du mobilier urbain, notamment des bidons, pour ne pas se déraciner de l'extérieur. Quand La Presse est passée, il était en train de dessiner les visages aux yeux en amande qui sont sa signature sur des bidons avant de les assembler. «J'en ferai peut-être un mur», dit-il.

Enfin, avec son masque sur la tête (pour ne pas être reconnu par la police, car il crée toujours dans la rue), WIA (pour What is Adam) proposera des oeuvres classiques de son style mêlant BD, pop art et références à la culture locale. Il y aura un immense bidon «sirop d'érable» et une belle blonde réalisée au pochoir.

À noter que les oeuvres sont toutes à vendre dans des prix dans les cinq chiffres... mais pour ceux qui n'ont pas les moyens, on peut repartir avec une estampe gratuite d'une signature graphique de chaque artiste.

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Jusqu'à samedi, de 10 h à 20 h.