Un rayon de soleil sur une toile obscurcie par des vernis a permis au musée du Louvre à Paris de redécouvrir une oeuvre du peintre français Nicolas Poussin (1594-1665) dans ses collections.

La toile, qui date des premières années romaines du peintre, représente Vénus allongée presque nue sur une draperie tandis que Mars, lui-même peu vêtu mais casqué, lui caresse le menton. Avec ses mains, la déesse lui «fait les cornes» sans que Mars s'en aperçoive tandis qu'Adonis, accompagné de ses chiens, n'est pas loin.

C'est l'oeil expert de Pierre Rosenberg, conservateur et ancien patron du musée du Louvre, qui a conduit à voir le tableau sous un autre jour.

Rosenberg raconte dans la revue du musée Grande galerie le destin de cette toile Mars et Vénus, provenant des collections de Louis XIV. Longtemps attribuée à Poussin, elle a été ensuite déclassée.

«1914 est une année fatale pour le tableau», relate l'Académicien français. Cette année-là deux des plus éminents spécialistes de Poussin, Otto Grautoff et Walter Friedlaender refusent l'attribution.

Imitation, faux, pastiche: tout au long du XXe siècle, le tableau est regardé avec sévérité. Pierre Rosenberg, lui-même, rejette l'attribution en 2009.

Une des raisons de ces avis négatifs tient au fait qu'un deuxième casque de Mars est posé au pied de la déesse. Poussin, si soucieux d'exactitude historique, aurait-il pu commettre une telle étourderie?, se demandent certains spécialistes.

Le tableau a aussi été «lourdement pénalisé par son aspect déplaisant», souligne M. Rosenberg. Et peut-être aussi par son sujet «franchement leste».

La toile dormait donc dans les réserves du Louvre et ne ressortait que rarement pour remplacer un Poussin prêté pour une exposition.

«C'est à l'occasion d'une telle présentation (et grâce à un heureux rayon de soleil) que nous pûmes l'examiner attentivement. Il nous parut évident qu'en dépit des épaisses couches d'un vernis marron particulièrement malvenu, le tableau revenait à Poussin», écrit M. Rosenberg.

À sa demande, Mars et Vénus a été examiné par le laboratoire du Centre de recherche et de restauration des musées de France et restauré dans les ateliers du Louvre. Des articles scientifiques vont être publiés prochainement pour expliquer cette réattribution.

Le tableau, qui a été coupé dans sa partie supérieure et agrandi sur les côtés à des dates non déterminées et pour des raisons inconnues, se trouve encore en restauration. Il n'est pas visible dans les salles du musée.