Avec Beat Nation, le MAC présente un panorama de l'art autochtone contemporain nord-américain. L'exposition d'oeuvres de 24 artistes souligne combien la préservation des traditions et l'appropriation des nouvelles technologies et de la musique moderne marquent l'expression des artistes autochtones d'aujourd'hui.

Paradoxalement, c'est le jeu d'un acteur hollywoodien d'origine italienne, Iron Eyes Cody, qui ouvre l'expositionen évoquant ce que peut signifier l'amérindianité. Le film du DJ inuit madeskimo est à l'image de Beat Nation, qui fait la démonstration que l'art autochtone est influencé par les cultures modernes et vice-versa.

La première salle s'ouvre avec le légendaire oiseau tonnerre (le thunderbird) des totems que le lauréat du Sobey 2013, l'artiste cri Duane Linklater, a représenté avec un néon rouge. On se croirait à l'entrée d'une taverne, comme l'a justement dit Kathleen Ritter, co-commissaire de Beat Nation.

Le lien entre modernité et tradition autochtone est aussi exploité par l'Alaskain Nicholas Galanin et les deux très beaux films de sa série Tsu Heidei Shugaxtutaan, dans lesquels le danseur contemporain David «Elsewhere» Bernal s'exprime sur une musique autochtone, tandis que le Tlingit Dan Littlefield exécute une danse traditionnelle sur une musique électronique.

KC Adams et Maria Hupfield font aussi ce lien, notammenten transformant avec une belle dextérité des objets usuels occidentaux en oeuvres d'art.



Identité et territoire

L'affirmation de son identité et le marquage du territoire sont illustrés par l'immense photographie Cliff Painting de Marianne Nicolson, artiste de Victoria membre de la nation des Kwakwaka'wakw. L'image montre le pictogramme de 11 m de hauteur qu'elle a réalisé sur une petite falaise, en Colombie-Britannique.

Nicholas Galanin a fait demême en gravant à la main le mot Indians (utilisant le logo de l'équipe de baseball de Cleveland) dans différentes pierres, notamment en Alaska, imitant ce que faisaient ses ancêtres il y a entre 400 et 700 ans.

Préserver ses racines, Dana Claxton s'y attelle en rendant hommage à la famille amérindienne avec sa série photographique The Mustang Suite. Elle a photographié une famille lakota dans un quotidien où se complètent l'ancien et le nouveau. Une magnifique série appartenant au Musée des beaux-arts du Canada.

Prise de parole

L'idée du langage et de la prise de parole est également au coeur de cette exposition où les artistes distillent impressions, revendications et parfois rancoeurs.

C'est le cas de Kent Monkman, toujours prompt à décrier les errements du passé colonial et les interprétations historiques des vainqueurs, ou encore de Jackson 2Bears, qui présente une nouvelle vidéo dans laquelle les images se réfèrent à l'histoire mouvementée du Canada, vue à travers la lorgnette amérindienne.

L'exposition - à laquelle participent également Mark Igloliorte, Rolande Souliere, Raymond Boisjoly, Sonny Assu, Jordan Bennett et Dustinn Craig - est saisissante et dynamique. Le travail réalisé par les trois commissaires, Mark Lanctôt, Kathleen Ritter et Tania Willard, est notable.

Il serait toutefois peut-être temps que le MAC songe à proposer des audio guides musicologiques, comme le fait le Musée des beaux-arts quand l'occasion s'y prête. Beat Nation aurait été une vitrine appropriée pour bien des musiciens autochtones, canadiens ou américains, tels que A Tribe Called Red, Simian, Shauit, Elisapie Isaac, Melisa Pash ou Litefoot. L'audioguide aurait confirmé, en l'élargissant, le métissage des cultures de notre continent.

Née d'une initiative vancouvéroise sur l'internet (beatnation.org), l'exposition «est enévolution», fait valoir le musée.

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Beat Nation: art, hip-hop et culture autochtone, au Musée d'art contemporain de Montréal jusqu'au 5 janvier.

Photo: David Boily, La Presse

Vélos Lowrider de l'artiste Dylan Minor.