La Société des arts technologiques ne présente pas que des spectacles immersifs dans son dôme de la Satosphère. La SAT fait aussi de la recherche fondamentale et appliquée. La semaine dernière, son équipe du Metalab a procédé à quatre jours d'expériences sur un nouveau dispositif qui pourrait un jour être utilisé autant par des artistes, des universitaires ou des professionnels de la santé communiquant virtuellement depuis n'importe où dans le monde.

L'expérience à laquelle La Presse a assisté consiste en une installation de téléprésence immersive intitulée L'espace à dessiner - The Drawing Space. Des étudiants de Liverpool et du collège Dawson de Montréal l'ont testée simultanément. «Il s'agit d'une première mondiale», a lancé Luc Courchesne, directeur du Metalab, depuis le site de la Foundation for Art and Creative Technology (FACT), à Liverpool, sa silhouette apparaissant un peu floue sur les six écrans du dispositif Posture.

Posture permet de créer des environnements virtuels partagés en reliant des personnes situées en deux endroits différents de la planète. Jeudi, les étudiants britanniques et montréalais ont dessiné en 2D et en 3D, avec un pointeur manuel, en temps réel et par paires, dans cet environnement virtuel reproduit sur six écrans qui forment un panorama de 360º et dans lequel ils pouvaient se mouvoir.

L'expérience semble abstraite, aux frontières de l'art, de la technologie et de l'expérimental. C'est un volet du Living Lab de la SAT, qui travaille par exemple avec l'hôpital Sainte-Justine sur des possibilités d'intervention des arts technologiques à des fins thérapeutiques.

Patrick Dubé, directeur du Living Lab, explique l'importance de cette expérience inédite. «Quand on fait de la téléprésence avec Skype, les deux personnes sont face à face, se voient l'une et l'autre, mais il n'y a pas d'espace entre elles dans lequel elles pourraient interagir, dit-il. Avec ce dispositif, on essaie de créer un espace virtuel partagé dans lequel les deux personnes pourront interagir, manipuler des objets, voire téléporter leur image.»

La création de cette interface entre monde réel et monde virtuel est un défi ambitieux et fascinant. «Ce projet en est à ses débuts, dit Patrick Dubé. Cette expérience avec Liverpool nous permet d'avoir des réactions des usagers afin d'orienter la recherche. Cette fois-ci, on a utilisé le dessin, mais on pourrait aussi bien partager des données de cartographie ou des idées. Les usages restent à être découverts.»

«Aujourd'hui, on cherche à savoir comment on peut créer en réseau et comment trouver un troisième espace qui sera un terrain de jeux commun pour les créateurs qui voudront interagir, ajoute Monique Savoie, présidente fondatrice de la SAT. On vit aujourd'hui autant dans le réel que dans le virtuel, mais on cherche à voir comment on peut vivre dans cet espace virtuel en conservant notre corps et en développant une relation humaine. Sans devenir des objets ou des personnages.»

Ces recherches intéressent les artistes, mais aussi les institutions comme le nouveau CHUM. «Le CHUM voudrait qu'on prenne la maquette de leur projet architectural à des fins de compréhension des défis en matière de gestion des ressources humaines, dit Monique Savoie. Pour définir une visualisation des changements qui interviendront pour les employés. La SAT, c'est société, arts et technologie, alors on ne doit pas oublier d'être utiles pour la société...»