Près de 50 ans après sa mort, le MoMA de New York présente à partir du 15 juin une vaste exposition sur l'architecte, urbaniste, peintre, et homme de lettres français Le Corbusier, la première de cette ampleur jamais montée par le célèbre musée d'Art moderne.

Sur le thème Le Corbusier, un atlas des paysages modernes, l'exposition présente quelque 320 de ses oeuvres, dessins, maquettes, photos, projets, croquis, mais aussi de nombreuses toiles et aquarelles de ce visionnaire souvent intraitable, qui rêvait aussi d'être reconnu pour sa peinture.

«C'est Le Corbusier observant le paysage, fabriquant des paysages. On a considéré que c'était un architecte qui méprisait les villes, qui voulait tout réduire à la même aune, on dit c'est le père des grands ensembles, ce qui est largement faux. C'est une oeuvre qui mérite d'être redécouverte autrement, aussi pour ses qualités poétiques et artistiques», explique à l'AFP Jean-Louis Cohen, l'un des deux conservateurs de l'exposition, professeur d'architecture à l'Université de New York.

Ses constructions n'étaient pas seulement des «machines-à-habiter» (une expression de Le Corbusier) mais aussi des «machines à regarder le paysage», ajoute-t-il.

De la Suisse à l'Inde, un architecte globe-trotteur

L'exposition s'écrit de façon chronologique, mais aussi géographique, du Jura suisse où Le Corbusier, né Charles-Édouard Jeanneret-Gris le 6 octobre 1887, apprend d'abord la peinture, jusqu'au sud de la France où il est mort le 27 août 1965, en passant par Paris, l'Italie, l'Autriche, l'Allemagne, Istanbul, la Grèce, Buenos Aires, Rio, Moscou, Alger, l'Inde...

Et elle explore une oeuvre multiforme, de la plus intime de ses constructions à ses plus grands projets d'urbanisme, comme la création de la ville indienne de Chandigarh.

Quatre intérieurs, dont son cabanon de Roquebrune-Cap-Martin, et une pièce de la «Maison Blanche», construite pour ses parents à La-Chaux-de Fonds, sa ville natale, ont également été reconstitués.

On y perçoit ainsi l'évolution - et la constance - du «plus grand architecte du 20e siècle», le «premier» à avoir ainsi parcouru ainsi le monde, selon Jean-Louis Cohen.

Certains de ses 400 projets - dont plusieurs maquettes sont exposées - ne verront jamais le jour, générant parfois chez Le Corbusier, naturalisé Français en 1930, de solides frustrations. Mais il a laissé au total quelque 75 constructions dans une douzaine de pays.

Sa relation avec les États-Unis et le MoMA en particulier, sera marquée pendant des années par «les projets ratés et les malentendus», et «beaucoup d'acrimonie de la part de Le Corbusier».

En 1953, ses exigences sont telles, quand le MoMA lui annonce vouloir organiser une grande exposition de son oeuvre, que le projet sera abandonné après trois ans d'impossibles négociations.

«Il voulait tout contrôler», explique M. Cohen, soulignant qu'il entendait aussi se faire chèrement payer.

La rétrospective s'ouvre finalement, 60 ans après ce projet avorté.

Elle dure du 15 juin au 23 septembre et a coûté près d'un million $.

La Fondation Le Corbusier à Paris a prêté de nombreuses oeuvres. D'autres viennent du Fonds Le Corbusier de La Chaux-de-Fonds, d'autres de la collection propre du MoMA.

L'exposition voyagera ensuite en Espagne, à Barcelone du 6 au 11 Mai 2014 et à Madrid du 11 juin au 19 octobre 2014 à la Fundacio La Caixa.