Moment Factory a été choisi pour animer durant tout l'automne 2013 le mur sud du pavillon Président-Kennedy de l'UQAM et la promenade des Artistes longeant le boulevard de Maisonneuve avec un projet interactif intitulé Mégaphone, inspiré du mouvement étudiant du printemps dernier.

Le studio montréalais de nouveaux médias et de divertissement spécialisé dans la conception et la production d'environnements multimédias est sorti gagnant d'un concours lancé en avril par le Partenariat du Quartier des spectacles et l'Office national du film dans le cadre du projet PPP-Parti Pris Pluriel, un investissement de 250 000 $.

Ce projet consistait à soumettre une idée d'installation interactive «suscitant une réflexion sur la réconciliation entre l'individu et le collectif». Mégaphone a été retenu parmi 54 propositions par un jury présidé par le cinéaste François Girard. La création de Moment Factory permettra aux piétons qui se rendront le soir près du pavillon de l'UQAM situé à l'angle de l'avenue du Président-Kennedy et de la rue Jeanne-Mance, de prendre publiquement la parole au moyen de porte-voix installés le long de la promenade des Artistes. Leurs mots seront transcrits en temps réel sur les bandes de béton beiges de la façade du pavillon universitaire.

«C'est un projet de réappropriation de l'espace public, dit François Girard. À Montréal, on a besoin de ce genre de projet, de questionner l'anonymat et l'individualisme des citoyens contemporains et de les appeler à se rencontrer.»

Quand les propositions de création ont été soumises, le Québec était en pleine ébullition sociale et au coeur du printemps érable, ce qui a influencé le projet Parti Pris Pluriel. «On était en plein dans les casseroles, c'était magnifique mais on avait aussi envie que ça parle, ajoute François Girard. Alors Mégaphone incarnait le mieux l'esprit de ce qu'on voulait, par sa pertinence.»

Responsable du département Technologie et Innovation à Moment Factory, Vincent Pasquier explique que cette expérience de transcription en temps réel des mots d'une voix humaine sur une façade est une première.

«L'objectif principal sera de rassembler les gens sur le site pour créer une expérience physique collective, une autre expérience sur le bâtiment et une autre sur un site web où l'on archivera les paroles des passants pour que les gens puissent consulter de nouveau ces paroles dans le futur et donner leur point de vue par rapport à ce qui s'est dit.»

«Les mots seront placés sur le bâtiment mais il y aura aussi un habillage graphique qui dérivera des mots eux-mêmes, ajoute Étienne Paquette, en charge de la scénarisation du projet. Quand ils seront au mégaphone, les passants se trouveront dans un nuage de paroles provenant d'orateurs du passé en référence aux espaces publics montréalais, par exemple les mots d'un Camilien Houde ou des Nuits de la poésie. Il y aura donc la mémoire du passé et celle qu'on est en train de constituer.»

Moment Factory veut par cette création interactive illustrer «la dimension sociale de l'expression individuelle et faire ressortir certains ressorts de la mémoire collective». La réalisation du projet sera ainsi à la fois une oeuvre d'art picturale vivante et un nouvel espace original pour la liberté d'expression.

«Pour nous à l'ONF, l'interactivité doit sortir des écrans et venir sur les places publiques», dit Hugues Sweeney, coproducteur du projet. Le directeur de la programmation au Partenariat du Quartier des spectacles, Pascal Lefebvre, estime que Mégaphone pourrait éventuellement durer plus que trois mois. «On va voir la force du projet, dit-il. Ça peut évoluer, comme les balançoires de la promenade des Artistes sont devenues un rituel annuel.»