L'araignée géante de Louise Bourgeois est, depuis quelques années, la «marque» du Musée des beaux-arts du Canada. Le titre de cette oeuvre en bronze qui fait peur aux petits enfants avant qu'ils n'entrent dans le musée: Maman. La maman de Louise Bourgeois était à la fois protectrice, étouffante et spécialisée dans la réparation de tapisseries. Si Louise Bourgeois avait été écrivaine, on dirait d'elle qu'elle faisait de l'autofiction. Le matériau principal de cette artiste, morte l'an dernier à l'âge de 98 ans, est en effet sa propre vie. Une vie que l'on devine angoissante et tourmentée.

Le musée d'Ottawa a récemment fait l'acquisition d'une autre oeuvre importante et imposante de Louise Bourgeois, Française d'origine, mais artiste de New York. Il s'agit d'une «Cellule» faisant partie d'une série que l'on a pu voir il y a quelques années au Musée d'art contemporain de Montréal.

La «cellule» d'Ottawa est une grande cage en métal dans laquelle se trouve, entre autres, un escalier en colimaçon, escalier que l'artiste a monté des milliers de fois pour se rendre à son atelier sur le toit de sa maison.

Pour faire connaître cette acquisition et rendre hommage à Mme Bourgeois, qui aurait eu 100 ans cette année, le musée lui consacre une exposition dans deux de ses salles d'art contemporain.

Ce n'est pas une grande exposition - une vingtaine de sculptures et quelques dessins -, mais c'est une exposition «intelligente». Elle met en parallèle des sculptures réalisées dans les années 40 et 50, et d'autres produites dans les dernières années de sa vie. On voit que les mêmes formes et les mêmes thèmes reviennent. Les plus anciennes sculptures, en bois, qui font penser à des pièces d'art primitif africain, sont des monolithes longilignes aux personnalités différentes qui semblent tenir debout par miracle (ils sont vissés dans le plancher). Chaque sculpture de cette série appelée «Personnages» a son propre nom.

Les oeuvres plus récentes, de la série «Écho», sont faites à partir des vêtements de l'artiste, qu'elle a étirés - pour ne pas dire torturés - afin de créer de nouvelles formes ensuite coulées dans le bronze, mais apparemment enduites de cire. On y trouve des formes semblables à celles présentes dans les premières oeuvres. Formes organiques, évocatrices, sexuées. Il y a, tout au long du parcours de cette exposition, des textes aux murs qui donnent une foule de renseignements sur la vie et l'oeuvre de Louise Bourgeois, à qui la gloire est arrivée bien tardivement.

Grande place à Wanda Koop

Louise Bourgeois a été la première femme à bénéficier, en 1982 (!), d'une exposition individuelle d'envergure au Museum of Modern Art, à New York. Elle avait alors 71 ans. Les femmes étaient rares dans les arts visuels, ou plutôt rarement reconnues. C'est beaucoup moins le cas aujourd'hui.

Le Musée des beaux-arts du Canada accueille, en grand, Wanda Koop, artiste de Winnipeg qui aura 60 ans cette année. Dans son cas, il s'agit d'une grande exposition dans plusieurs salles qui reçoivent 93 oeuvres souvent monumentales et quelques maquettes.

Wanda Koop est une artiste engagée dans sa communauté, et engagée aussi dans son art. Un art qui réfléchit sur «les effets qu'ont les moyens technologiques sur la nature». Ce peut être un masque de hockey, un jockey électronique, un paysage traqué par une boule en feu...

Sa production - souvent de grands tableaux sur contreplaqués - est très diversifiée et inclut la vidéo, la photo, le dessin, la danse, parfois tous confondus dans une seule oeuvre.

Pour cette exposition, Wanda Koop a aménagé un grand atelier qui pourrait ressembler au sien. Les murs sont recouverts de dessins reprenant les signes et symboles qu'elle utilise, mais aussi des photos et des écrans de télé. Sous vitrine se trouvent d'autres dessins, photos de famille, objets divers qu'elle utilise. Quelques maquettes représentent des expositions qui lui ont été consacrées, les oeuvres étant reproduites en miniature. Cet atelier est en quelque sorte une porte ouverte sur le travail d'une artiste d'envergure.

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Louise Bourgeois 1911-2020, au Musée des beaux-arts du Canada, jusqu'au 18 mars 2012. Wanda Koop. Sur le fil de l'expérience, jusqu'au 15 mai 2011.