Le bouillonnement culturel et artistique de Paris sous le règne de Louis XV et l'émergence d'une nouvelle élite capable de s'offrir les plus beaux fruits de cet âge d'or du «génie de l'esprit français», font l'objet d'une grande exposition au Musée Getty de Los Angeles.

L'exposition Paris: Life & Luxury, qui mêle peinture, arts décoratifs, sculpture, mais aussi instruments de musique, partitions, livres et objets religieux, offre jusqu'en août aux habitants de la mégalopole californienne une plongée dans «la vie et le luxe» du XVIIIe siècle français.

«Après la Régence (de Philippe, duc d'Orléans), le règne de Louis XV a globalement été une période de stabilité et d'expansion économique, et plusieurs couches de la société ont pu grimper dans l'échelle sociale», explique à l'AFP Charissa Bremer-David, commissaire de l'exposition.

«C'est la naissance de la société de consommation, combinée à une remarquable floraison artistique», souligne-t-elle.

Selon Mme Bremer-David, trois facteurs ont contribué à l'excellence et à la vitalité artistique de la France à la moitié du XVIIIe siècle: «le savoir-faire des artisans», hérité du règne de Louis XIV, «le développement du commerce international, qui a fait entrer en France des bois exotiques d'Afrique et d'Amérique ou des porcelaines d'Extrême-Orient, et l'influence de ces nouveaux matériaux dans l'inspiration des artistes et des artisans».

L'exposition, qui voyagera à Houston à l'automne, est construite comme un cheminement à travers une journée-type dans une riche famille parisienne, du lever au coucher.

Chaque moment de la journée est évoqué à travers oeuvres et objets d'art, du lit au crucifix de la prière du soir, en passant par l'argenterie du déjeuner, le clavecin du salon de musique, ou la table de jeux.

«Sous Louis XIV, les arts étaient unifiés sous la protection de la couronne et des palais royaux. Seule une toute petite élite pouvait alors décorer avec luxe son château ou sa maison de ville», poursuit Mme Bremer-David.

Mais sous Louis XV, une nouvelle classe - l'élite financière, notamment - commence à jouir d'une fortune qui lui permet d'acquérir oeuvres et objets d'art de grande qualité, «contribuant à disséminer le - bon - goût hors des palais royaux», explique la commissaire.

Le musée parisien des Arts décoratifs a prêté de nombreuses oeuvres au Getty, notamment un étonnant «tableau mécanique» de Nicolas Spayement, dans lequel une soixantaine de sujets peuvent entrer en mouvement grâce un complexe système d'engrenages et de leviers dissimulé dans le cadre.

Mais la plus grande partie des oeuvres provient cependant des collections du musée Getty, l'un des plus prestigieux et les plus richement dotés des États-Unis, notamment un exceptionnel Lit à la duchesse brodé de soie et de fils d'argent, qui n'avait jamais été exposé en raison de sa fragilité.

«Aucun lit de qualité comparable n'a survécu ailleurs dans le monde, pas même en France», assure Mme Bremer-David.

Pour elle, l'exposition est une illustration parfaite du «génie de l'esprit français, inventif et intelligent. Une expression très intellectuelle mais présentée de façon harmonieuse et jamais pédante».

C'est enfin un hommage à «l'honnête homme à la française, éduqué, mû par la raison, étranger à la superstition, capable d'apprécier le talent des artisans et les objets précieux, et doté d'une certaine générosité de goût et d'esprit - que je retrouve encore aujourd'hui chez les Français», dit-elle.